[Velvet] Blabla et laïus cinématographiques 2017

Modérateur: Dunandan

Kong : Skull Island - 3/10

Messagepar Velvet » Ven 30 Juin 2017, 13:28

[color=#FF00FF]Kong: Skull Island de Jordan Vogt-Roberts (2017) - 3/10 [/color]


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Les blockbusters bestiaires commencent de plus en plus à fleurir dans le jargon hollywoodien, notamment quand celui-ci se réapproprie les mythes du passé. Quand ce n’est pas Gareth Edwards qui marche sur les pas du géant qu’est Godzilla, ou lorsque ce n’est pas Guillermo Del Toro qui joue avec les codes du film de Kaiju avec Pacific Rim, c’est dorénavant Jordan Vogt-Roberts qui fait ressortir du placard le monstre emblématique qu’est King Kong. Et Skull Island ressemble plus à un Pacific Rim que d’un Godzilla dans son approche cinématographique : faire dévier le film de genre dans une modernité spectaculaire qui ne cesse de dépasser les limites du « Bigger and Louder ». Entreprise intéressante si elle se retrouve entre les mains d’un auteur ayant une véritable envie d’incorporer une personnalité un tant soit peu minime à son récit : ce qui n’est pas malheureusement pas le cas de Skull Island qui malgré ses qualités évidentes à l’écran, se noie dans un potager de références pachydermiques et dans la fadeur de sa représentation. Si l’on veut vulgariser la situation, on peut remarquer que ce nouveau King Kong souffre du même syndrome que celui qui a vu naître Jurassic World : l’image soignée n’entretient aucune ambiance et semble générique au possible, manifestant la faiblesse presque abyssale de ce qui se déroule devant nos yeux.

Et surtout, le soin apporté à l’ergonomie visuelle n’arrive en rien à dissimuler les carences d’un scénario dont l’écriture semble avoir été reléguée au second rang : personnages archétypaux (scientifique névrosé, colonel patriotique, photographe féministe, troupe de militaire solidaire), second degré hypocrite, références placardées de façon outrancière, humour pataud assez faiblard, empathie presque néante quant au cheminement du récit. Que le scénario soit mis de côté pour faire de Skull Island un divertissement régressif voire badass et un plaisir presque coupable ébouriffant, pourquoi pas : l’idée donne envie. Sauf qu’ici ce n’est pas le cas. Dernièrement, on a pu assister à la confirmation de la qualité d’une franchise qu’est John Wick qui se démène avec son costume un peu cheap mais qui sait aussi s’habiller avec son amour pour le cinéma de genre et l’envie d’en découdre, faisant d’elle une balade de film d’action au charisme saisissant. Et c’est ce qui manque irrévocablement à Skull Island : une présence, un charisme qui tient en haleine.

C’est d’autant plus dommageable que Kong n’a jamais été aussi imposant tant par sa puissance que par sa taille. Jordan Vogt-Roberts n’a pas fait les choses à moitié et a dessiné les traits d’un King Kong géant et l’iconise comme étant le dieu d’une terre encore inconnue et dont la thématique de la nature comme gisement divin, et du défenseur d’une humanité inoffensive face à des menaces souterraines rappelle celle du Godzilla de Gareth Edwards. Mais tout comme ce dernier, le problème provient des interludes entre les différentes phases de combat bestiaire qui voit le récit avancer à hauteur d’homme. C’est durant ces moments parfois assez longuets et anecdotiques que le film perd en implication empathique, faisant perdre une certaine dramaturgie aux secousses monstrueuses, à l’image du climax final aussi imposant visuellement que vain narrativement. On peut prendre l’exemple de la scène de destruction à Tokyo dans Pacific Rim qui avait su mêler le spectaculaire à l’intime. Malheureusement Skull Island ne regorge d’aucune scène de cette force cinématographique.

Et à force de vouloir édulcorer son univers, remplir des trous d’air avec des personnages qui n’ont rien à dire de nouveau, diminuer la tension primitive de son décorum (au contraire d’un Apocalypse Now ou d’un Predator), Skull Island perd en puissance : le film a beau frapper de partout, mettre des mandales mémorables avec ses bestioles dangereuses, l’implication chez le spectateur est réduite au strict minimum et gâche la moindre parcelle de plaisir. Certes, le film, notamment dans son dernier tiers arrive à prendre par la main grâce au soin enfin apporté à l’atmosphère, à ses moments de bravoures gigantesques et à ses idées de mise en scène, mais cela n’empêche pas de penser que l’on vient de voir un spectacle très vite oubliable.
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Jour dans la vie de Billy Lynn (Un) - 7,5/10

Messagepar Velvet » Mer 05 Juil 2017, 12:27

Un jour dans la vie de Billy Lynn d'Ang Lee (2017) - 7,5/10


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Le retour au bercail n’est pas si idyllique. Ce ne sont plus les balles qui fusent mais des applaudissements qui surgissent des entrailles des stades vociférants d’un pays qui a besoin de se réconforter derrière l’effigie de ses jeunes têtes blondes. Voici le drôle de sort d’une bande de jeunes héros de guerre, qui après être revenus à la maison, sont célébrés par tout un pays lors d’une tournée, une commémoration publique devant les remercier de leur courage.

Ce pays gauche et grandiloquent qui s’émerveille devant cet uniforme qui scande leur fierté dans le monde entier. Ang Lee, avec Un jour dans la vie de Billy Lynn ne fait pas un film de guerre, ni même une simple étude de caractère traumatique post guerre, comme avait pu le faire dernièrement Clint Eastwood avec American Sniper mais au contraire, attise la curiosité avec ce personnage de Billy Lynn, devenu héros après être allé secourir un camarade de tranchée sous le feu ennemi. Non, Ang Lee redistribue les cartes et agence avec intelligence un film qui tente de décrire le double visage du militaire américain et son aura héroïque avec une dualité qui s’avère multiples : l’individualité et la collectivité, sur le sol ennemi ou sur le sol américain, la famille et la famille militaire, l’image qu’il renvoie ou qui lui est renvoyée de lui-même. Il serait assez déroutant et réducteur de dire que l’œuvre d’Ang Lee ne soit qu’un simple film anti militariste tant le réalisateur dévoile une bienveillance assez fine pour les militaires qu’il décrit comme de la chair à canon qu’on envoie se faire tuer pour des raisons parfois insolubles mais dont les spasmes collatéraux renforcent leur sentiment de fraternité.

D’ailleurs, c’est là où le film tire son épingle du jeu : au lieu de tirer à boulet rouge sur les militaires et d’en faire des hommes assoiffés de sang se croyant au-dessus de toute logique morale ou même politique, Un jour dans la vie de Billy Lynn ne réalise pas un film anti guerre, mais prend un chemin de traverse intéressant, parfois proche du faux et de la parodie, et décide de visualiser avec une ironie douce cette Amérique, qui pour le bien d’une démocratie auto proclamée, envoie ses enfants de la patrie sur les champs de bataille alors qu’ils pourraient s’amuser comme les autres sur un terrain de foot. Et même si le film oscille entre scènes se déroulant sur le front, qui de part ailleurs sont extrêmement bien filmées, et ce retour à la maison dans ses limousines octroyées pour cette tournée « des stades », Ang Lee comprend bien que la guerre n’a pas de frontière et devient même plus difficile à gérer à l’intérieur qu’à l’extérieur. Mais au lieu de nous ressortir le coup du militaire qui dort mal ou qui devient psychologiquement instable et inapte à la communication (le film est plus poignant que cela), la projection du militaire à travers les yeux du peuple, et les enjeux internes de la guerre dans son aspect métaphorique sont l’épicentre du film.

Devant le regard d’idolâtrie de cheerleaders juvéniles ou la reconnaissance du père de famille amenant sa petite famille au stade de foot, Ang Lee dématérialise le militaire pour en faire un paratonnerre psychologique pour toute une nation : sur le front, le soldat est une arme moderne et technologique étant la force de frappe de l’Amérique et sur le sol américain, il est un étendard, un visage qui est un amas de pixel sur l’écran, une marque, une publicité du spectacle qui permet aux américains de se sentir eux-mêmes américains. Tout est fait dans le but d’en mettre plein les mirettes et de ne servir qu’à la gloire incestueuse du pays : une science de l’Entertainment qui n’a aucune limite, où la soit disante sécurité du monde est remerciée dans un show de Beyoncé, dans un Etat où l’on préfère oublier les morts pour magnifier un héroïsme vain.
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It comes at night - 8/10

Messagepar Velvet » Jeu 21 Déc 2017, 11:26

It comes at night de Trey Edwards Shults (2017) - 8/10


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A24 est toute de même une boite de production qui commence doucement à se faire un nom dans la sphère cinématographique indé. Spring Breakers, Under the Skin, Green Room, Moonlight, The Rover, Ex Machina, The Witch, American Honey, The Lobster, et j’en passe et des meilleurs. Maintenant It Comes At Night et bientôt Good Time. La ratio qualité/sortie pourrait faire pâlir les plus grands du monde du 7ème art. C’est impressionnant de voir le cinéma que nous connaissons de nos jours donner naissance à une entité de production avec autant de créations aussi novatrices qu’ambivalentes.

La première chose qu’il est possible de noter est que chacun de ces projets détient une personnalité artistique assez évidente à l’œil. It Comes at Night ne déroge pas à cette volonté d’afficher une proposition de cinéma différente, qui s’avère être le deuxième long métrage du jeune réalisateur américain Trey Edward Shults. Même si l’œuvre contient ses propres fondamentaux et sa propre force de mise en scène, It Comes at night n’est pas si éloigné d’un certain pan de la nouvelle facette du cinéma indé/horrifique qui s’agrandit actuellement, en faisant agiter sa science de la réalisation pour faire ressortir ses messages thématiques voire politiques.

Le projet qu’est It Comes at Night ressemble un peu à celui de The Witch : film de genre qui s’imprègne des mœurs d’une famille isolée où le doute et la peur vont s’abattre dans l’esprit de chacun d’eux, famille elle-même recluse dans une baraque abandonnée au milieu d’une forêt cachant bien des ombres. Puis, il y a cette qualité dans la réalisation, qui éviscère les codes horrifiques pour en faire une esthétique de l’épure et dont le minimalisme en devient presque anxiogène. La réalisation ne joue pas sur les jump scares mais accentue sa puissance sonore et joue sur les contrastes de lumière et sur la porosité des situations pour échelonner sa peur. Alors que la campagne de communication qui entourait le film voulait en faire le film d’horreur de l’été, le métrage de Trey Edward Shults est rien de tout cela, malgré certaines incartades horrifiques dans les songes de l’un des personnages.

It Comes at Night se rapproche du genre post apocalyptique et le survival en huis clos strident, aux confins de La Route de John Hillcoat, avec cette contamination invisible qui gangrène le monde qui nous est présenté et deux familles qui vivent sous le même toit dont la confiance l’une envers l’autre va basculer petit à petit. La contamination, on ne connait pas son origine, ni sa dimension mondiale. La seule possibilité pour nous de la contempler sont les conséquences que cela occasionne sur l’humain comme en témoigne cette première séquence aussi poignante que mise sous tension : où cette famille qui avec tristesse, brule et tue le grand père contaminé car sa guérison est impossible. Dès les premiers instants, le film installe son style : économie des informations, émotion disparate, montage rêche, photographie poisseuse, personnage simple mais tout de suite prégnant, et iconisation de la peur par l’image.

Les 30 premières minutes sont une leçon de cinéma de tension : avec cette séquence où il est question de l’effraction de la maison par un homme qui souhaite trouver refuge pour lui et sa famille, puis suivi de toute cette partie dans la forêt jusqu’à l’arrivée de la deuxième famille dans l’antre de vie. Le montage permet une réelle immersion viscérale et le mixage entre la musique et l’image accroit l’implication narrative et la pertinence de la réalisation.

La principale qualité, mais qui pour certains devient un défaut inhérent au métrage, est l’économie de moyen inséré par le film. Le spectateur, selon le réalisateur, est à la même place que les personnages : ce que savent les personnages, le spectateur le sait et inversement. C’est pour cela que le film contient de nombreuses zones d’ombres sans réponse, notamment à mi-parcours, lorsque la peur va s’insérer de part et d’autre de la maison : la provenance de cette contamination, la réalité sur le passé et les intentions de la deuxième famille qui est hébergée par la première, qui sont les personnes qui ont attaqué la voiture des deux pères de famille, qu’a vu le chien dans les tréfonds de la forêt, qui a ouvert cette fameuse porte laissant entrer le mal au sein de cette petite communauté paisible.

Les spectateurs, comme les personnages restent dans le doute. Et c’est ça toute la puissance du film, qui lie alors le fond et la forme avec une précision qui forge le respect : voir un film qui tombe dans l’anti artificiel, le non explicatif le plus total mais dans le même temps arrive à faire surgir de l’empathie pour les personnages. L’épicentre du film n’est pas la contamination en elle-même, mais les conséquences que cela apporte sur les relations humaines. Le doute qui s’immisce dans la tête des personnages est le vrai fardeau de l’humain, la peur de l’inconnu, la non confiance à l’autre. Il n’y a ni victime ni bourreau, juste une terre où l’on doit survivre face à l’autre. Trey Edwards Shults nous présente un monde presque animal, armé jusqu’aux dents où les règles sont celles de la vengeance ou de la justice de l’homme sur l’homme. Dans la manière de filmer une violence sèche et non démonstrative, de réhabiliter l’homme dans son environnement naturel, It Comes at Night rappelle par moments Blue Ruin de Jérémy Saulnier ou la filmographie de Kelly Reichardt, comme en témoigne ses dix dernières minutes finales, où l’intensité se fera aussi malaisante que fataliste.
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