[Dunandan] Mes critiques en 2012

Modérateur: Dunandan

Chemins de la liberté (Les) - 8/10

Messagepar Dunandan » Lun 16 Juil 2012, 08:57

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Les chemins de la liberté, Peter Weir (2011)

C'est du pur film de survie, qui se déroule dans un contexte précis, les goulags en Sibérie et la tyrannie du communisme. En une explication textuelle et une délation forcée, le sujet est posé, pour qu'on puisse enfin se concentrer sur l'essentiel, à savoir les détails tournant autour des conditions de survie, d'une part dans les camps, puis à l'extérieur qui en sera une extension pure et simple. Car comme l'a proclamé l'un des gardiens, la véritable prison ce n'est pas eux, les gardiens, mais la nature, qui les coupe de toute civilisation.

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L'une des conditions de réussite pour un film de survie, c'est la crédibilité. Mission réussie globalement, hormis l'évasion qui est vraiment trop rapidement exécutée. Même le passage progressif du russe à l'anglais est assez plausible, certains d'entre-eux l'ayant appris au contact d'étrangers, et le vocabulaire étant relativement simple. Les lieux de captivité ainsi que les détails de survie sont convaincants, la moindre miette étant un nectar, la graisse, un outil, et le troc, une règle primordiale (parfois très violent le troc ...). Plusieurs types de personnages nous sont présentés, qui formeront le groupe d'évasion, et parmi eux : le "gentil" (prêt à ajouter de nouveaux membres sans raison préalable), le réaliste (guidé par la survie pure), le franc-tireur (se démarquant par une témérité qui va s'avérer précieuse), l'artiste, et plus tard, une fille. Tous des composants qui deviendront peu à peu essentiels, alors qu'au départ, seuls le pragmatisme et la méfiance mutuelle semblaient être l'unique vertu requise, et qui suffisaient dans le camp puisque malgré les restrictions, un toit, de la bouffe et de l'eau, ça change tout. En effet, pour tenir aussi longtemps sur une si longue distance, ils se rendront compte qu'il leur faut un petit "plus", qui ne repose pas sur le chacun pour soi, mais sur l'équilibre des forces. Ainsi l'artiste, tout comme la femme, apparemment inutiles, apportent l'humanité aux autres, délient les langues, là où les réalistes apportent la bouffe ou autres éléments essentiels comme la direction géographique ou la survie purement physique. Nous retrouvons donc ici tous les thèmes de prédilection de Weir : liberté, le problème des frontières, et enfin la communauté humaine. Il y a même quelques scènes qui m'ont rappelé ses autres films, comme deux mirages qu'expérimentent deux d'entre-eux en état de fatigue extrême, et qui représente leur foyer. Cette confrontation entre réel et idéal, ici sur un plan physique, est l'une des grandes interrogations constantes du réalisateur.

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Après le détail des conditions de survie, l'autre gros point fort et central du film est la photographie © National Geographic, absolument magnifique, très bien mise en valeur, autre élément important du film puisque la seconde partie n'est en fait qu'une longue randonnée. Nous passons parfois un peu trop rapidement d'un environnement à l'autre (surtout à la fin avec le passage de l'Himalaya, qui devrait être une épopée en soi, mais qui se déroule en 2-3 plans), et il manque un peu de repères temporels par ci par là. Mais globalement il serait quand même possible de retracer précisément leur périple par la diversité des lieux rencontrés qui ont certainement fait l'objet de repérages précis. Et puis je ne peux être qu'impressionné par l'immersion provoquée par ces grands extérieurs en vue panoramique. Il s'agit d'un véritable personnage à part entière, gardiens silencieux et écrasants pour ces prisonniers en quête de liberté, qui se fondent totalement dans ces immensités désertiques durant certains plans. Les effets sur le corps de cette longue marche sont très bien vus : assèchement de la peau, pieds qui gonflent, mirages, amaigrissement, dents pourries, regards hallucinés et désespérés. Le coeur de ces scènes est la manière dont le groupe parvient à s'adapter face à leurs différents environnements naturels, les vêtements d'hiver devenant dans le désert des protections contre le soleil et le sable, ou encore les animaux y compris les plus dangereux devenant des guides naturels vers les sources d'eau. Face à la mort et l'épuisement total, tous deviennent différents, revenant à l'essentiel : tout repose sur deux besoins, les besoins physiques (eau et nourriture), et le contact humain, qui va bien au-delà du simple respect de la vérité ou du pragmatisme, où le soutien et la compréhension mutuels (relancés par la fille, qui découvre que les autres ont gardé l'habitude de la suspicion depuis le camp de travail), sans détours sophistiqués, ce que j'appelle la survie mentale, deviennent tout aussi importants que la survie pure et simple du corps (je retiens aussi cette scène où on découvre un temple complètement détruit, un lieu de spiritualité interdit en terre communiste). Chacun porte une histoire complexe en lui-même que l'on apprend peu à peu. Pour moi, cette évolution mentale se faisant au détriment du corps est le véritable fil du conducteur du récit, son facteur de cohésion, plus encore que le défilement logique des environnements. Enfin, les derniers plans en sur-impression sont à la fois simples et beaux, un peu à l'image de la réalisation du film. Celle-ci est en effet sobre par sa mise en scène, sans esbroufe, mais aussi magnifique par les thèmes abordés et leur traitement, et aussi par la valorisation des extérieurs. Pour revenir à cette scène finale, elle concentre l'essence du film, résume sa plus longue marche, celle qui sépare les individus de l'avènement de l'histoire où enfin toutes les conditions de la liberté seront remplies, et les frontières entre les individus, abolies. A l'image du début, c'est concis, efficace, un petit concentré d'émotions.

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Malgré de petits problèmes de fluidité dans le détail, une très belle épopée humaine, tour à tour réaliste et humaniste, désespérée et courageuse, avec au coeur la survie de la communauté humaine face à son environnement naturel. Parmi les points forts, je retiens la crédibilité des situations de survie et la photographie.

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Re: [Dunandan] Mes critiques en 2012

Messagepar Dunandan » Lun 16 Juil 2012, 21:18

Bon j'ai rajouté/modifié quelques captures :mrgreen:
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Re: [Dunandan] Mes critiques en 2012

Messagepar Scalp » Lun 16 Juil 2012, 21:20

T'es un grand malade :mrgreen:
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Re: [Dunandan] Mes critiques en 2012

Messagepar angel.heart » Lun 16 Juil 2012, 21:24

C'est clair ! T'as encore oublié de prendre tes médicaments!?... :eheh:
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Re: [Dunandan] Mes critiques en 2012

Messagepar Dunandan » Lun 16 Juil 2012, 21:28

J'ai édité au moins 4 fois qui n'ont été comptées qu'une fois 8) (ça doit être moi la cause de tous ces ralentissements sur le serveur :eheh:).

Non mais ce genre de films ça donne envie de mettre un tas de captures, puisque c'est une ballade de 2h00 voilà.
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Conan le barbare - 9/10

Messagepar Dunandan » Mer 18 Juil 2012, 00:57

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Conan le barbare, John Milius (1982)

Pas revu depuis 10 ans, et force est de constater que [b]Conan est le genre de film qui mûrit très bien, d'autant plus lorsqu'on est fan des comics comme je le suis (le scénario a été bâti à partir des romans, mais la BD s'en est largement inspirée). Milius a su tout simplement saisir l'essence de ce personnage, sa mythologie, et surtout, encore moins évident, son ambiance visuelle et sonore, avec un level design qui a peu vieilli, et l'un des plus beaux scores du genre qui insuffle un souffle épique incroyable à l'ensemble. Très certainement le meilleur film de Heroic Fantasy jusqu'au SDA, et le plus grand dans le sous-genre de la Dark Fantasy.

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Très rapidement, le spectateur est plongé dans le monde violent et barbare de ces âges sombres et fantastiques, ces temps-là où la civilisation émergeait à peine à la lumière. D'abord, grâce à une voix off caverneuse et littéraire, qui interviendra à la manière des descriptions dans la BD, aidant beaucoup à l'immersion. Ensuite, par une citation (Nietzsche, Ce qui ne te tue pas te rend plus fort), qui capture l'attitude existentielle de Conan face aux drames personnels qui le forgeront comme du métal, dur et froid. Arnold Schwarzennegger tient ici l'un de ses plus grands rôles emblématiques avec Terminator, où sa musculature et même son fort accent jouent une importance capitale pour camper cette brute épaisse. Et enfin par le biais d'un dialogue père/fils fondateur qui explique, à travers le secret de l'acier, la religion de son peuple, et ce qu'est un homme. Ce dernier objectif hantera Conan. Tous les aspects de sa personnalité seront explorés selon une certaine évolution (barbare, guerrier, voleur, et enfin roi : par rapport au roman, il manque peut-être que la piraterie, mais ça aurait trop chargé la barque), et à travers deux fils conducteurs, une histoire classique de vengeance (tout son peuple, ses parents y compris, exterminés durant un razzia), doublée d'une quête initiatique qui ne se trouve pas dans le roman à ma connaissance mais qui inscrit le récit de plein pied dans la fantasy. Sans oublier que Milius adore ce genre de personnages forts, comme il l'a déjà prouvé dans Le Lion et le vent, et on sent ainsi tout l'amour que leur porte ce dernier, sans cynisme ou lourdeur comique, portant en étendard les valeurs de l'héroïsme et du courage, et traitant à égalité hommes et femmes (par exemple, Valeria est l'alter-ego féminin de Conan).

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Ainsi, les hommes, tout comme les femmes et les enfants, sont malmenés, comme en témoigne ce razzia (qui revient dans beaucoup des films de Milius, comme une sorte d'initiation à la vie ...) violent et sans concession au début qui animera la vengeance de Conan, où le sang coule à flot (un point commun avec Verhoeven, je me demande s'ils n'auraient pas une filiation cachée ...), et où les femmes sont guerrières, et les enfants, envoyés en esclavage. Le dernier combat qui oppose la mère de Conan aux envahisseurs recèle une beauté que je n'avais pas comprise auparavant : avant le coup final, il y a une attente, une méditation et une chorégraphie du geste qui semblent s'inspirer de la force de cette femme, et plus largement, du mystère de l'acier provoqué en eux par la lame que ces guerriers ont pris au père de Conan, apparemment admiratifs du soin inouï qu'il lui a apporté. Dommage par contre que les combats à l'épée ne soient pas très rapides, mais en contre-partie, ils sont généreux en hémoglobine, sont souvent montrés en plans iconiques, et ont malgré tout une force particulière grâce à la musique et la mise en scène (il est d'ailleurs évident que le SDA a piqué quelques idées, comme par exemple l'archer qui dégomme certains des cavaliers ennemis à lui tout seul en faisant mouche à chaque coup, comme un certain Legolas). De plus, les armes et armures ont bien la classe (épées, haches, marteaux de guerres, et arcs constituent l'inventaire, avec un petit soupçon de magie), et chacun a sa propre technique de combat. Pour parler des autres acteurs, ils ne sont pas formidables, mais sont bien dirigés, ont la gueule de l'emploi, et un style à eux. Bref, un coup d'oeil que Milius partage encore avec Verhoeven.

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L'histoire en elle-même est un modèle de simplicité (une quête personnelle, et une histoire de vengeance), mais se nourrit aussi énormément de son background. Mis à part Willow dans le genre, rarement un tel effort a été donné aux décors : ils ont beaucoup de caractère et de vie (le village de Conan, la ville de la tour, et le temple de la religion de Seth), et ils ne font pas cheap malgré leur âge. On s'y croirait vraiment, d'autant plus qu'il y a plein de petits détails décadents qui le font bien (dire que ça a été censuré, c'est déjà bien glauque ...). La première partie du film porte surtout sur la naissance de Conan, de ses aptitudes et de ses motivations. Ce que le roman fait en une dizaine de volumes, Milius le développe en quelques scènes, durant la captivité de Conan, à qui on lui enseigne plein de trucs car c'est un sacré gaillard, le dernier à ne pas mourir sous le coup de l'esclavage, puis ensuite véritable dieu du combat à mort, ancêtre des gladiateurs romains à qui on vouait un culte sans pareil. Ainsi, la formation de son caractère est détaillée, qui fait de lui bien plus qu'un barbare : une volonté inébranlable, l'aptitude au combat, la culture générale, et enfin les femmes qui feront partie de sa vie, souvent dévêtues de manière bien généreuse. Un autre aspect important, la religion, aussi primordiale que le secret de l'acier dans le traitement de la Fantasy et particulièrement de Conan, où ses aventures sont toujours teintées de violence, de sexualité débridée, mais aussi de religion, muettes ou malfaisantes. Il n'y a que deux sortes de dieux, ceux des 4 éléments, empreints d'une certaine sagesse (dieux des vents), ou de défiance envers les hommes (Crom, religion de Conan), ou ceux qui s'enveloppent de superstition et de fantastique, et viennent s'accaparer des esprits faibles. Cette gué-guerre entre religions est un aspect primordial du film, et décidera même de son issue finale.

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Après une assez longue errance, et différentes expériences accomplies (le vol, l'amour, et une vie facile), développées dans la première partie, les motivations de Conan se réveillent de nouveau, tiraillées vers l'aventure et une soif de vengeance inassouvie. Toute la destinée du personnage est saisie dans cet élan, tendue entre une vie remplie de promesses (un revenu de voleur et une femme qu'il aime) et entre ce besoin de se mettre à l'épreuve et de se donner un but. La tragédie de son existence sera d'aller de but en but, jamais satisfait de son existence présente, mais constitue aussi ce qui fait le sel de ce personnage, qui finira par comprendre l'essence de l'acier vis-vis de son bourreau en une scène magnétique, à l'issue de laquelle il se fera enfin seul maître de son destin, mais pour combien de temps ? Le dernier plan ainsi que le texte qui l'accompagne offrent une portée incroyable au film, car ça laisse des aventures encore non écrites, et qui correspondent à une certaine période du roman et de la BD. Un lien parfait entre ces deux types de formats.

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Un des meilleurs films d'Heroic-Fantasy. Milius saisit vraiment bien l'essence de la BD Conan tout en l'adaptant à sa sauce. Un chef d'oeuvre épique, puissant, contenant une histoire simple, mais nourrie d'un background incroyablement riche, et portée par une musique particulièrement grandiose.
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Re: [Dunandan] Mes critiques en 2012

Messagepar Heatmann » Mer 18 Juil 2012, 06:53

:super:

par contre Milius a surtout baser sont film , comme il le dit , sur les ecrit des nombreux roman de Robert E howard , et pas les comics qui on suivit .
Oliver stone a baser sont scenario sur plus de 25 differente aventure de conan rependue tout au long des Chronicles of conan de howard ( crown of blood , the conquering sword , , et meme pas seulement conan d'ailleur . Thulsa doom c'est un bad guy que howard a ecrit pour Kull d'ailleur .
victoria elle vient du chapitre " queen of the black coast " mais tout ce qui fait le personnage est enfaite un autre perso qui est lui dans " red nails " , et enfin subotai est une total invention , nul part ecrit dans le roman de howard ni comics , c'etait enfaite le bras droit de genghis khan
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Re: [Dunandan] Mes critiques en 2012

Messagepar Dunandan » Mer 18 Juil 2012, 08:30

Oui je vais rectifier ça, en fait la BD s'est inspirée énormément des romans, et même certaines histoires sont quasiment inchangées d'un format à l'autre, d'où mon erreur :mrgreen:
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Tigre & Dragon - 8,5/10

Messagepar Dunandan » Mer 18 Juil 2012, 10:31

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Titre & Dragon, Ang Lee (2000)

Tigre et Dragon représente ma première expérience dans le WXP, et rien que par l'ouverture matérielle qu'il a suscité envers les autres produits du genre, il occupe une place spéciale pour moi. Mais soyons clair, ce film n'ajoute rien au genre dans son fond après en avoir découvert pas mal après coup, mais il en est par contre une synthèse brillante, avec des thèmes parfaitement agencés et mis en scène, qui offrent beaucoup de niveaux de lecture. On y trouve donc tous les ingrédients classiques de la SB, unifiés autour de la présence d'une pratiquante douée en arts-martiaux, erreur de la nature, car à la fois noble et enseignée à se battre, deux choses contradictoires en soi. D'abord attirée par une épée magique qui questionne la dignité de son porteur et le sens de la violence, elle éveille ensuite l'intérêt d'un authentique maître qui repère son potentiel énorme, et essaie de lui inculquer le self-control, effritant ainsi le caractère hermétique de ce type d'enseignement. Ensuite, elle et ce maître se retrouvent en plein milieu d'histoires amoureuses secrètes et interdites qui contrarient leurs plans préétablis, mais le désir d'aventure de cette jeune femme est plus fort que tout, avec en arrière-plan une trame dramatique qui se met calmement en place. De leur côté, les combats rivalisent de beauté, très variés dans leurs enchaînements et armes utilisées, et chorégraphiés par Woo Yuen Ping, mais en même temps ne sont qu'un best of de son oeuvre. D'ailleurs, toute la scène de l'auberge est un gros hommage au genre, avec des combattants portants des armes très diverses et des noms à rallonge, tous tournés en ridicule par leur adversaire désireuse d'en finir avec les écoles officielles.

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Mais ce qui fait l'attrait principal de ce film, c'est sa forme, car Ang Lee est un véritable esthète de l'image. Une impression de légèreté, de romantisme, et de poésie, émane de tout le film, porté aussi par une musique planante et mélancolique, et faisant parfois ressembler les affrontements à des ballets ou des ébats amoureux. Une idée déjà exploitée (je pense notamment à King Hu pour les chorégraphies dansantes, et à Chu Yuan pour la complexité du scénario et l'esthétique globale chatoyante), mais portée ici à son paroxysme. Une certaine immersion du spectateur les anime aussi, la caméra se faisant l'épouse de leurs mouvements, les suivant comme leur ombre. Ainsi, certains combats sont majestueux, comme celui des bambous, ou encore celui qui oppose les deux femmes, engageant pour notre plus grand plaisir une succession d'armes blanches. C'est une direction esthétique que prendra avec plus ou moins de bonheur certains films d'arts-martiaux, car ainsi ça peut abuser en câbles, ralentis, ou découpages qui nuisent à la lisibilité des enchaînements ou à l'impact des coups. Ici au contraire, cette vision des choses sert très bien le sujet du film, et s'adapte au pouls des personnages, brimés par les interdits, entre devoir et sentiments, tradition et modernité, famille et élan individuel, sérénité et passion, et enfin luttant entre les différentes carcans sociaux, des thèmes finalement universels, et qui expliquent en grande partie le succès international du film. Cependant, la réalisation est parfois un peu trop sage, comme par exemple ce début qui traîne un peu des pieds, trop dialogué, se contentant d'alterner plans fixes et champs/contre-champs. Mais l'ensemble est quand même de haute tenue, et compte de beaux extérieurs bien mis en scène (la forêt de bambous, le désert de Mongolie, le Temple de Wu-Tang dans les montagnes ...). Enfin, le casting est de grande qualité, comptant Chow Yun Fat, très solennel et crédible en maître, bien qu'il soit l'un des rares acteurs non expert en arts-martiaux du film, et surtout Michelle Yeoh et Zhang Ziyi, atouts de charmes et redoutables combattantes, ainsi que Pei-Pei Cheng, star de l'âge d'or de la SB.
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Rien d'original dans le fond ou les chorégraphies, mais un sujet qui est transcendé par son ton et sa mise en scène poétiques, et porté par une brochette d'acteurs charismatiques et filmés avec grâce. Un très bel hommage au genre, et qui a marqué l'esthétique du cinéma d'arts-martiaux, en bien ou en mal.
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Re: [Dunandan] Mes critiques en 2012

Messagepar Jimmy Two Times » Mer 18 Juil 2012, 12:03

Si il y a bien une chose qu'on ne peut pas retirer à ce Tigre et Dragon, c'est la façon dont il a contribué à démocratiser le cinéma asiatique dans nos contrées (et pas que). Pour moi, c'est le film qui m'a permis de découvrir le WXP et je me rappelle encore de ma séance ciné en compagnie de Marie Jeanne. La scène dans les arbres, j'y étais aussi :mrgreen: . Je lui collerai sûrement un bon 8.
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Re: [Dunandan] Mes critiques en 2012

Messagepar alinoe » Mer 18 Juil 2012, 12:30

Pour ta critique passionnante de Conan le barbare :
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Re: [Dunandan] Mes critiques en 2012

Messagepar Dunandan » Mer 18 Juil 2012, 20:16

Jimmy Two Times a écrit:Si il y a bien une chose qu'on ne peut pas retirer à ce Tigre et Dragon, c'est la façon dont il a contribué à démocratiser le cinéma asiatique dans nos contrées (et pas que). Pour moi, c'est le film qui m'a permis de découvrir le WXP et je me rappelle encore de ma séance ciné en compagnie de Marie Jeanne. La scène dans les arbres, j'y étais aussi :mrgreen: . Je lui collerai sûrement un bon 8.


Moi aussi d'ailleurs, j'ai oublié de le dire :chut: (j'en profite pour rajouter quelques trucs :mrgreen:)

Merci Alinoe :super:
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Faucon maltais (Le) - 6/10

Messagepar Dunandan » Jeu 19 Juil 2012, 22:55

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Le faucon maltais, John Huston (1941)

Le Faucon maltais, première oeuvre de John Huston, est considéré comme l'un des films noirs qui aurait "normalisé" le genre, mais je trouve que Assurance sur la mort est bien plus approprié pour ce "titre", plus "archétypal" à mon goût. Ils ont en commun l'intention de construire un récit huilé et la présence de la femme fatale. Mais je trouve l'intrigue du premier film bien bancale. Les motivations du détective en charge sont en effet trop nébuleuses, bien qu'unifiées par cette imprévisibilité et cette sauvagerie qui font sa marque de fabrique. Il rentre dans les rouages d'une machination, dont il est tantôt la victime, tantôt le maître des marionnettes, mais sans jamais être inquiété de ce qui lui arrive à lui ou aux autres. Cette froideur, qu'on pourrait appeler cynisme ou professionnalisme, reflète également une histoire mal calibrée, où les réactions des différents protagonistes sonnent souvent fausses ou invraisemblables (par exemple, la manière dont le détective se sort de chaque situation, à mains nues contre un pistolet en un seul coup de poing, ou encore en sauvant la situation en improvisant un alibi aux policiers alors que ces derniers semblaient fortement suspicieux).

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Cependant, le tableau n'est pas entièrement "noir". Le récit, malgré de grosses lourdeurs de rythme dû à de trop nombreux dialogues qui vont dans toutes les directions, et des révélations finales qui ont de la peine à expliquer l'incohérence de certains comportements, est tout de même assez mystérieux pour tenir en haleine le spectateur attentif et patient (la dernière capture donne une petite idée de l'état dans lequel j'étais à la fin du film). Ensuite, la personnalité du détective, malgré son aspect monolithique, sans expressions, révèle une complexité parfois fascinante (Humphrey Bogart). Jusqu'à quel point il est impliqué dans cette histoire, le doute demeure jusqu'au final, bien que cette ambiguïté soit préservée de manière un peu maladroite. Car comment est-il possible de garder cette froideur et avoir plusieurs coups à l'avance sans révéler quelques failles de sa part, même si ce comportement est justifiable à la lumière du dénouement, celui-ci étant en fait animé essentiellement par l'argent et la volonté de comprendre ? Cette absence d'émotions a bien sûr un impact sur le rythme, qui ne comporte quasiment aucun pic ou tension. Puis franchement, l'histoire d'amour qui se profile à l'horizon, on n'y croît pas du tout, et ça aurait été mieux que ça reste un motif de manipulation. Enfin, les thèmes de John Huston sont déjà bien là, et pourrait donc intéresser l'amateur du cinéaste : le mystère exotique qui est à la base de ces intrigues et jeux de massacre, la noirceur de la nature humaine flottant dans un vent de suspicion et de mensonges (si bien que jusqu'au bout, il est impossible de déterminer exactement les tenants et aboutissants de chacun), et enfin la déconfiture qui guette les âmes enflammées par la richesse.

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Un classique du film noir que je trouve un peu démérité malgré le succès qu'il rencontra en son époque, à cause d'un récit mal équilibré, rarement passionnant, mais pas entièrement mauvais sur le fond. Ce film est aussi un premier essai pour dépeindre la noirceur et l'ambivalence de la nature humaine, précurseur de toute une oeuvre à venir.
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Salvador - 7,5/10

Messagepar Dunandan » Ven 20 Juil 2012, 06:39

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Salvador, Oliver Stone (1986)

Chaque fois qu'Oliver Stone s'empare un sujet, ce dernier fait rarement les choses à moitié. Pour ce faire, il opte pour un style mi-fiction mi-documentaire, qui anticipe déjà son style clipesque, dans son intention de refléter la tension explosive des lieux de l'action, le Salvador, via le point de vue réaliste d'un photographe de guerre. Un véritable film coup de poing qui surligne parfois un peu trop les choses et ne cache pas la position de l'auteur par rapport à la gestion américaine du conflit, répétant inlassablement les erreurs du passé en suivant les mêmes facteurs. Un excès constant de l'oeuvre du réalisateur, mais qui a au moins le mérite de nous faire poser les pieds là où ça fait mal, balayant d'un revers de pellicule une vision arrondie et consensuelle d'un conflit souvent oublié.

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Pour commencer, on ne peut pas dire que Stone ménage ses personnages principaux. Pas de vision héroïque qui émane du journalisme. Celui que l'on suit (James Woods, très bon dans ce rôle) est sympathique mais peu scrupuleux. Il émerge avec son pote d'une situation bien merdique, sans avenir, tous deux anciens vétérans de guerre, comme on l'apprendra plus tard et qui peut expliquer leur comportement de débauchés et de ras-le-bol de cette Amérique qui n'a plus rien à leur donner. Le film est un peu à long à démarrer, mais cette introduction permet de mieux cerner ces personnages au bord de la rupture. Le Sud est ainsi pour eux un Eldorado où ils espèrent se refaire sur tous les plans, et profiter à fond du système côté sexe, alcool, drogues & Cie. Mais ils déchantent rapidement, se retrouvant posés sur une véritable bombe.

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Le journaliste, le personnage de loin le plus intéressant, se compromet souvent, agissant comme un vautour comme en témoignent ces photos de cadavres pour quelques billets, et graissant la patte de ceux qu'il déteste pour accéder à quelques photos ou informations intéressantes pour un scoop, mais préservant tout de même au fond de lui l'idéal de transmettre des informations "brutes". Ainsi, il est aimé un peu par tout le monde, parfois même un peu trop (la nonne, l'ambassadeur, le dictateur ...), comme s'il ne pouvait pas choisir son camp, en attente de glaner n'importe quelle information pour se remettre en selle. Ce portrait déjà peu flatteur est contrasté ensuite par deux extrêmes. D'un côté, un journalisme formaté et dorant au soleil dans les hôtels de luxe nous distribuant directement les images en Occident (pas étonnant que Stone passera au vitriol les médias dans Tueurs nés), bien pire que lui dans le genre, car n'ayant aucun contact avec la réalité et la vérité qui sont déformées par les intermédiaires officiels. D'autre part, il y a le journaliste "parfait" (il ressemble beaucoup au sergent idéaliste de Platoon) qui se trouve dans l'autre position extrême, et qui a les pieds dans la merde comme le personnage principal, mais se distingue par un idéal fort pour lequel il est prêt à mettre sa vie en danger : prendre la photo montrant l'origine de la souffrance des victimes de la guerre.

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A travers ces multiples faisceaux, toute une réalité nous est donc dévoilée, peut-être un peu trop découpée en stéréotypes. Malgré une représentation réaliste, c'est quand même beaucoup noir/blanc : d'un côté, une vie composée de choses simples, de paradis artificiels, et de communistes, qui forment le gros des troupes des révolutionnaires, à laquelle se heurte un régime militarisé et tyrannique, où seuls les paysans communistes, les humanitaires, et l'église animée par un prêtre-théologien de la Libération (l'un des seuls courants chrétiens à oser parler librement de révolution politique aux pauvres), leur offrent une quelconque résistance.

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Le script est essentiellement structuré en deux parties, l'engagement ambivalent du journaliste-photographe au conflit, et la sensibilité de la situation politique. Le passage ne se fait pas en douceur et montre avec beaucoup de détails, et sans trop de subtilité, la montée de cette violence (meurtre du prêtre, capture des nonnes, ...), ainsi que le "mur" de chaque intervenant important auquel se heurte le journaliste (militaires américains en seule quête du contrôle territorial, journalistes de la télévision renvoyant à une réalité faussée et manipulée). Ce qui me gêne un peu plus, c'est le passage des motivations personnelles (via une femme, magnifique il est vrai, que l'on retrouvera dans les deux Predator) à l'engagement profond du journaliste qui m'apparaît un peu trop précipité, marquée au fer rouge (genre ce serait un beau salaud s'il ne réagissait pas après ce qui lui arrive), bien que l'émotion soit belle et présente, sincère, humaine. Enfin, le final est vraiment intense, avec ces appareils-photos qui deviennent de vraies armes de guerre, une chose très peu commune dans le genre du film de guerre. Et l'absence de happy-end nous renvoie à la gueule la difficulté de l'information pour arriver au public, et l'urgence à prendre conscience d'une telle réalité.

Un véritable brûlot sur cette page de l'histoire américaine post-traumatique de la guerre du Viêtnam, souvent oubliée. Un point de vue original et peu traité : le journalisme de guerre. Un récit qui manque un peu de subtilité dans sa dénonciation, mais qui demeure réaliste dans sa description des protagonistes, et cerne les enjeux principaux.
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Film: Salvador
Note: 7/10
Auteur: Alegas

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Re: [Dunandan] Mes critiques en 2012

Messagepar Heatmann » Ven 20 Juil 2012, 07:01

:super: nickel , excellente critique , par contre moi je trouve que les drama personnel , ca apporte justement pour s'attacher au perso et eviter qu'ils ne soit que des pantin qui font avancer l'histoire , ca fait de l'emotion et un lien pour aider a l'identification

apres ben ouai , du tout bon salvador , le fait que ce soit un recit autobiographique de Richard boyle ( le perso de woods ) qui a pondue donc le script avec stone sur sa propre vie , apporte beaucoup a ce coter documentaire-veraciter , il fallait que ce soit visceral , pas le choix a la demi mesure ou consensus hollywoodien .
le film est quand super bien equilibrer entre des personnage qui prennent bien de la place, interressant et fouiller ( pis putain de perf de woods et belushi , parmis leur meilleur ) , mais aussi une attaque en backgound de la politique de soutient de la CIA et leur responsabiliter dans ce chaos des guerrilla d'amerique du sud , reflectant aussi la brutalites et frenesie des acts perpetrer ,
mais pour autant le perso de boyle n'est pas la pour jouer le moraliste ou le baromettre de la bonne penser , non bien au contraire , il est la , au millieu, temoin , mais reste humain et partial , completement cynique , junky , une sorte de hunter S thompson "serieux" , cramer ... pis le final :love:

un bon gros morceaux de cinema , que je trouve tres tres sous estimes
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