Thunderbay |
 Réalisé par Anthony Mann
Avec James Stewart, Joanne Dru, Gilbert Roland
Aventures, USA, 1h37 - 1954 |
5.5/10 |
Résumé : 1946. Démobilisés de l'US Navy, Steve Martin et Johnny Gambi ont décidé d'investir toutes leurs économies dans un rêve fou : construire une plate forme pétrolière au large des côtes de la Louisiane. Ils se heurtent à l'opposition musclée des pêcheurs de crevette, qui craignent que cela détruise la faune de la région.
Le pitch fait rêver hein ? Malgré de nombreux problèmes d'écriture ce n'est pas aussi honteux que je le pensais, surtout grâce à la conviction de J. Stewart, que l'on retrouve ici dans son rôle de gars que rien n'arrête, qui parviendrait à nous faire vendre n'importe quelle idée ou rêve, et le rythme du film qui fait qu'on s'ennuie peu si on accepte de revoir ses attentes à la baisse, notamment dans une forme dont on reconnaît difficilement la patte d'A. Mann. On se retrouve dans un film d'aventure à l'ancienne, avec l'idée classique de deux obstinations opposées, celle du village de pêcheurs de crevettes qui voient l'arrivée d'étrangers sous un mauvais oeil, contre celle du foreur de pétrole qui va tout faire pour s'établir.
Ainsi, l'idée de départ ressemble beaucoup à
There will be blood, mais à une époque où on nous vantait que la modernité, c'est bien, car ça donne du travail à tout le monde, et encore plus limite, que l'écologie peut cohabiter avec l'économie pétrolière. Le parti-pris est donc tendancieux : le courage des ouvriers est mis en avant, tandis que les pêcheurs sont vus comme des gêneurs enfantins qui ne voient pas leur intérêt. C'est même très drôle de voir S. Martin (J. Stewart) leur jeter des bâtons de dynamite pour les calmer (et ça marche). Cependant, ce n'est pas un film totalement pro-moderne, puisque derrière cette entreprise technologique et cette quête du pétrole, se cache surtout l'obstination d'un homme qui est parti de rien, et qui va tout mettre dedans, épaulé par un mécène idéaliste qui pense comme lui, et un sidekick qui fait rejaillir la tension qui l'habite lui-même entre devoirs, sentiments, égoïsme, et sociabilité (particulièrement autour de la compagnie des femmes et de la beuverie).


Si on met de côté ce message pro-moderne sentant la naphta, l'histoire se tient, suivant de près la construction de la plate-forme pétrolière (d'ailleurs les scènes qui l'accompagnent sont les meilleurs du film, animées par une tension que l'on retrouve peu dans le film), ayant à faire face à l'inquiétude de la bande des pêcheurs et les quelques tensions internes dues à l'obstination de S. Martin. Dommage par contre que les personnages secondaires soient si souvent mal écrits et interprétés : alors que les deux filles représentent la tension entre modernité et communauté, l'une d'entre-elles passe du coq à l'âne en se jetant, d'un coup, dans les bras du chercheur de pétrole (alors qu'elle défendait peu avant un féminisme lui aussi caricatural) ; le pêcheur bon bougre mais impulsif, ne reconnaît ses erreurs qu'après que son ami soit tué bêtement lors d'une tentative de sabotage ; les pêcheurs se révoltent car on leur vole leurs femmes, donnant lieu à une bataille rangée des bateaux naviguant à deux à l'heure ... Des situations mal écrites comme ça, on en a à la pelle, que l'on retrouve dans d'autres films de Mann, mais là ça ne fonctionne tout simplement pas, frisant souvent le ridicule (par exemple, la baston dans le bar est collector, on dirait du Terence Hill). Sans compter cette fin rose bonbon qui arrange tout le monde, pécheurs et ouvriers, mais on reste dans le ton gentillet de l'ensemble. Bref, un film mineur, qui a beaucoup vieilli, mais qui demeure somme toute divertissant pour tout amateur du genre.


L'un des films les plus mineurs des années 50 du réal', à cause d'un scénario grossièrement écrit, et une représentation vieillotte de la modernité. Reste l'interprétation de J. Stewart parfait dans son personnage, capable de nous vendre n'importe quel rêve, même puant.