[maltese] Mes avis en 2020

Modérateur: Dunandan

Colonel Blimp - 8/10

Messagepar maltese » Ven 06 Mar 2020, 12:18

The Life and Death of Colonel Blimp

(Colonel Blimp)

Michael Powell et Emeric Pressburger, 1943


Fresque mélodramatique imposante et particulièrement audacieuse pour l’époque : réaliser en 1943 un film qui raconte l’amitié à travers les décennies et les guerres d’un officier anglais et d’un officier allemand, il fallait oser. Le film s’attirera de nombreuses critiques sur ce point, étant également vu comme une moquerie d’un certain establishment anglais – Churchill lui-même, se sentant visé, aurait essayé de censurer le film, sans succès.

Le « Colonel Blimp », c’est en fait un personnage de caricature anglaise, moquant ces vieux militaires de l’époque. Powell et Pressburger reprennent cette figure comique pour proposer, au travers d’une belle construction en flash-back, un regard sur la vie passée d’un vieux général anglais, ridiculisé par les jeunes « héros » actuels mais qui aura lui aussi connu toutes les illusions et désillusions de la jeunesse. Héros de multiples guerres, jeune homme fougueux et plein d’entrain prêt à contredire sa hiérarchie, puis homme plus sage mais déjà figure d’un ancien monde (voir notamment la scène avec les soldats américains), le soldat Candy aura effectivement traversé de nombreuses épreuves avant d’être considéré comme dépassé. Mais ce sont les rencontres avec cet officier allemand qu’il combat d’abord en duel en 1902, et cette jeune anglaise vivant à Berlin, qui influent le plus sur sa vie.

Une réflexion douce-amère sur le temps qui passe, les occasions manquées et ce qui reste d’une vie remplie qui appartient déjà au passé et à l’oubli avant qu’on ait eu le temps de s’en rendre compte. D’une certaine manière, on se dit que Scorsese aura fait son propre Colonel Blimp avec The Irishman. Mais le film de Powell et Pressburger fait moins dans la noirceur et « l’austère », ne serait-ce que formellement, avec des décors et un technicolor magnifiques, nous plongeant aussi bien dans le Berlin fastueux du début du vingtième siècle que dans le bourbier de la Première Guerre mondiale ou dans la campagne anglaise de l’après-guerre.

La richesse thématique du film se double d’une très belle histoire d’amitié. En faisant de son personnage principal un héros aux convictions fortes mais empreint d’une certaine naïveté, et en donnant le rôle plus profond et lucide au personnage Allemand, qui comprend bien mieux que l’Anglais les conséquences et implications des deux Guerres mondiales, Powell et Pressburger prennent un parti-pris encore une fois assez osé pour l’époque. C’est ce qui fait aussi la beauté de cette histoire et de cette relation ; chacun a besoin de l’autre, pour faire face aux horreurs de la guerre et de la montée du Mal – par-delà les nations et les origines. Et ce duo devient un étonnant trio via une représentation originale de l’amour et de la « femme idéale », toujours incarnée par Deborah Kerr mais dans différents rôles, comme une beauté qui jamais ne change – en tout cas sous nos yeux, car la mort et le temps qui passe ne sont jamais loin.

Comme pour toutes les grandes fresques, on sent que c’est un film qui nécessitera plusieurs visions pour être appréhendé au mieux, car, bien que l’histoire se suive assez simplement, il y a vraiment de nombreux thèmes qui sont abordés, concernant l’amour, l’amitié, la jeunesse, la vieillesse, la paix, la guerre, la vie et la mort. Un film plein, mais qui, bien que présentant de nombreux tableaux imposants, fait surtout la part belle aux relations intimes entre ses personnages principaux, et de très belle manière.
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Film: Colonel Blimp
Note: 7/10
Auteur: Alegas

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Re: [maltese] Mes avis en 2020

Messagepar Alegas » Ven 06 Mar 2020, 12:37

Celui-là (et plusieurs autres Powell/Pressburger) ça fait tellement longtemps que je l'ai en stock et que je repousse la découverte sans aucune raison valable. :|
"Our films were never intended for a passive audience. There are enough of those kinds of films being made. We wanted our audience to have to work, to have to think, to have to actually participate in order to enjoy them."

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Re: [maltese] Mes avis en 2020

Messagepar maltese » Ven 06 Mar 2020, 13:06

Un peu pareil, ça fait des années que je l'avais et que je ne le regardais pas (ma déception devant Le Narcisse Noir est sans doute aussi une explication).
La longueur peut faire hésiter, mais faut se motiver à se lancer, c'est vite prenant :super:
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Re: [maltese] Mes avis en 2020

Messagepar Alegas » Ven 06 Mar 2020, 13:51

maltese a écrit:(ma déception devant Le Narcisse Noir est sans doute aussi une explication).


C'est le dernier en date que j'ai découvert, et ouais moi aussi j'ai été déçu vu la très haute réput (genre meilleur du duo derrière Red Shoes).
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Re: [maltese] Mes avis en 2020

Messagepar Dunandan » Ven 06 Mar 2020, 17:13

Ah perso j'avais beaucoup aimé Le Narcisse noir. C'était mon premier du duo, donc peut-être à revoir pour mieux l'estimer (faut dire aussi qu'à l'époque la thématique me parlait davantage).
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Re: [maltese] Mes avis en 2020

Messagepar maltese » Ven 06 Mar 2020, 18:05

Ça m'a donné envie de le retenter effectivement :super:
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Re: [maltese] Mes avis en 2020

Messagepar maltese » Dim 22 Mar 2020, 13:21

Avec cette ambiance particulière, il y a comme un phénomène d'attraction-répulsion envers les œuvres parlant ouvertement de contagions, effondrement de la civilisation, etc... Sans être vraiment paniqué par ce qui se passe actuellement, je n'ai pas spécialement envie de me tourner vers des œuvres traitant directement le sujet (je vois que beaucoup, ici ou ailleurs, se tournent vers Contagion de Soderberg, d'autres films sur des pandémies, La Peste de Camus, etc...). Je ne sais pas si c'est ce dont j'ai besoin pour l'instant. Par contre, j'ai ressenti le besoin de me tourner vers celui qui est, pour moi, LE cinéaste de la fin du monde : John Carpenter. Il y a sa "trilogie" de l'Apocalypse bien sûr, mais je pense que dans chacun de ses films, ou presque, on ressent toujours cette notion d'urgence, d'un "monde" (que ce soit le monde entier, un pays, une ville) au bord de la catastrophe. Il y a quelque chose de fort à retirer de tout ça.

Et je me suis donc revu Assaut hier. Quelle claque ça reste, ce film. Épure à tous les niveaux, ou pas loin, pour un film d'action quasiment parfait qui contient déjà tout le style de son auteur, où on prend son temps pour installer une ambiance et des personnages, un rythme qui va crescendo dans l'angoisse, rythmé par une B.O. inoubliable. Les personnages sont caractérisés en quelques gestes et dialogues, mais se révèlent de plus en plus dans l'action et leur interactions; les dialogues sont brillants, la mise en scène est d'une classe absolue; plus je le vois, plus je me demande si Carpenter a fait mieux. Mais je me dis ça devant pas mal de ses films en fait.

Prochaine étape: Halloween.
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Re: [maltese] Mes avis en 2020

Messagepar pabelbaba » Dim 22 Mar 2020, 16:58

Je te trouve encore assez burné, nous on est en mode bisounours avec au programme ce soir... Pinot Simple Flic. :chut: :mrgreen:
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Sinon, oui, j'aime les nibards. :chut:
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Re: [maltese] Mes avis en 2020

Messagepar maltese » Dim 22 Mar 2020, 18:06

Ben je me sentais plus proche de ta team à la base, j'ai eu une grosse envie de 22 Jump Street en milieu de semaine :mrgreen:

Je crois que je vais alterner, mais ouais, le besoin de comédies se fait ressentir.

Ce soir, je pense que ce sera un Miyazaki :)
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Grande évasion (La) (1941) - 7/10

Messagepar maltese » Sam 04 Avr 2020, 17:27

High Sierra

(La Grande évasion)


Raoul Walsh, 1941


Film de gangsters à l’histoire plutôt classique (enfin, surtout avec le recul), avec ce bandit qui sort de prison, bien décidé à se ranger mais qui doit faire un dernier gros coup avant ça – on s’en doute, tout ne se passera pas comme prévu.
High Sierra se démarque toutefois bien, présentant toutes des thématiques et un imaginaire qui fera la force des grandes œuvres futures du genre : solitude des grands fauves, héros ambigu mais intraitable sur son code d’honneur, l’impossibilité d’accéder à une seconde chance, fatalisme ; tout y est, au service d’une œuvre particulièrement noire. On ne s’en étonne guère d’ailleurs en découvrant les forces en présence. Raoul Walsh d’abord, qui avait signé deux ans plus tôt l’une des plus formidables fresques de gangsters avec Roaring Twenties, et dont la mise en scène nerveuse contribue à donner une intensité dramatique forte au film (notamment une poursuite en bagnoles mémorable dans le final). Mais on assiste également ici à la « rencontre » de cinéma entre John Huston et Humphrey Bogart (qui étaient déjà amis avant cela), quelques mois avant Le Faucon Maltais. Huston est ici au scénario, et Bogart trouve son premier grand rôle (alors qu’il était jusque là cantonné aux seconds rôles – la Warner ne lui faisait d’ailleurs pas particulièrement confiance puisque la tête d’affiche n’était pas Bogie mais Ida Lupino, bien que tout le film tourne autour du personnage de Bogart).

Pour un premier « premier rôle », c’est une révélation ; ça paraît évident avec le recul, mais Bogart bouffe l’écran dans ce rôle d’éternel loser, jouant à merveille de sa « double face », pouvant apparaître à la fois gentil et tendre, puis dur, froid et violent la seconde d’après. A côté de lui, il faut bien dire que le reste du casting a un peu de mal à exister, à part Ida Lupino donc, dans un beau rôle de femme brisée et elle aussi en recherche d'une nouvelle vie. L’histoire parallèle au préparatif du braquage (le perso de Bogart cherche à aider une famille de pauvres fermiers dans laquelle il se reconnaît, étant issu du même milieu), bien qu’intéressante, nécessaire même, et traitée de façon assez inattendue au final, donne des petits coups de mou au film. Mais elle contribue à présenter un monde où quoi qu’on fasse, c’est le règne du chacun pour soi ; il n’y a pas de place pour une rédemption dans ces conditions. L’aspect plus moralisateur de certains grands films de gangsters des années trente n’est pas ou peu présent ici, on est déjà dans le « film noir », où les contours du bien et du mal deviennent de plus en plus flous.

Beau film, prenant – on a fait mieux dans le style par après, mais ça reste vraiment intéressant à suivre.

7/10
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Re: [maltese] Mes avis en 2020

Messagepar Scalp » Dim 05 Avr 2020, 06:13

Sauf erreur il en a fait un remake western.
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Re: [maltese] Mes avis en 2020

Messagepar maltese » Dim 05 Avr 2020, 09:23

Oui tiens, La fille du désert, serais curieux de voir ça.
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Re: [maltese] Mes avis en 2020

Messagepar Scalp » Dim 05 Avr 2020, 09:26

Un des ses meilleurs films.
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Nus et les morts (Les) - 7/10

Messagepar maltese » Dim 19 Avr 2020, 12:00

The Naked and the Dead

(Les Nus et les Morts)

Raoul Walsh, 1958


Trois ans après Le cri de la victoire, Walsh livre un nouveau film sur la guerre du Pacifique avec cette adaptation de Norman Mailer. Si le précédent film ressemblait un peu trop à de la propagande pro-militaire, celui-ci est presque son exact opposé, présentant une vision assez dure et ambiguë des soldats américains pendant la guerre. Bien qu’on suit principalement trois personnages (un sergent sadique et impitoyable, un lieutenant cynique mais bourré d’idéaux et un général avide de gloire), l’idée est de montrer une vision globale de l’armée en plein conflit sur une île du Pacifique.

Comme dans pas mal de films du genre donc, on y suit aussi bien le quotidien d’une section, en patrouille ou non, que celui des officiers, et les interactions entre ces branches. Dans sa première heure, le film installe surtout ses personnages, n’hésitant pas à montrer des soldats américains se comporter en vraies ordures et être célébrés pour ça (il faut voir le sergent Croft, joué par un Aldo Ray plein de rage pitoyable, buter de l’ennemi désarmé et demander à leur arracher leurs dents en or). On fait aussi surtout monter la tension entre le lieutenant Hearn (Cliff Robertson) et le général Cummings (Raymond Massey) ; deux visions de la guerre, l’un étant plus idéaliste et insistant sur la solidarité nécessaire entre tous, l’autre qui croit uniquement dans l’autorité, la peur et le pouvoir qu’il a sur la chair à canon qui lui sert d’armée. La deuxième heure du film, où le général envoie le lieutenant en mission avec la patrouille du sergent Croft, est l’occasion de mettre ce conflit théorique en pratique ; qui s’en sortira, et à quel prix ?

Les « morts » sont bien là ; par contre, il sera relativement peu question de « nus » hormis dans une scène d’intro de spectacle de striptease et dans d’étranges rêves un peu kitschs de personnages, devant nous éclairer sur leur psychologie particulière et leur rapport aux femmes – on sent qu’il y a une volonté de réflexion sur l’absence des femmes en temps de guerre et sur l’impact que ça a sur les hommes (à la guerre comme à la ville), mais c’est traité en filigrane, sans doute censuré à l’époque.

Le rythme du film est quelque peu spécial, alternant fréquemment entre scènes d’actions et scènes plus intimistes, et délaissant certains personnages pendant un long moment avant qu’on y revienne. Ca devient plus linéaire et « simple » dans la deuxième partie avec la mission de reconnaissance menée dans le fond de l’île ; le conflit (intelligemment non-ouvert) entre Hearn et Croft génère une tension psychologique palpable entre les personnages, au milieu de scènes aventureuses franchement prenantes. Walsh filme la guerre avec son savoir-faire habituel, avec des scènes de bataille explosives (soutenu par la B.O. sombre et entrainante de Bernard Herrmann) dans des décors de jungle grandioses ; mais c’est impeccable également dans la description de la vie du groupe, chaque personnage de la patrouille ayant le temps de bien exister à l’écran.

Au final, on a affaire à un film de guerre au message antimilitariste, qui laisse tout de même quelques notes d’ambigüité fortes dans son récit (attention, SPOILER sur la fin). Bien que Mailer et Walsh défendent clairement l’opinion du lieutenant Hearn, il faut observer que la victoire finale de l’armée américaine dans cette bataille est due d’une certaine façon aux malversations du sergent Croft ; si celui-ci n’avait pas tout fait pour poursuivre la mission, en mentant et en se débarrassant du lieutenant Hearn, les soldats rescapés n’auraient pas pu donner les informations permettant la victoire à leur hiérarchie.

Une vision de la guerre au format classique donc, spectaculaire, mais impitoyable et sans illusions. Bon, tout ça me fait penser qu’il faudra vraiment que je découvre Aventures en Birmanie maintenant, qui a l’air de s’imposer comme un must du film de guerre façon Walsh.
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Seuls les anges ont des ailes - 9/10

Messagepar maltese » Jeu 07 Mai 2020, 11:44

Only Angels Have Wings

(Seuls les anges ont des ailes)

Howard Hawks, 1939


Jusqu’à récemment, j’avais un peu du mal à cerner le génie de Hawks. Mais plus le temps passe et plus je réalise la force « simple » et classique de son cinéma, avec un style toujours relativement sobre à la mise en scène mais qui peut formidablement donner corps aux groupes de personnages qu’il présente, et ce dans chacun des nombreux genres qu’il a abordés au cours de sa carrière. C’est peut-être plus que jamais visible dans ce magnifique Seuls les anges ont des ailes, film d’aventures comportant des scènes d’aviation fortes et saisissantes, mais finalement plutôt « statique ». On y suit, dans un coin perdu en Amérique du Sud, le quotidien mouvementé d’aviateurs américains prenant tous les risques pour délivrer des courriers à travers le continent. Mais on reste l’essentiel du temps à terre, à suivre la vie de cette compagnie d’aviation dominée par un Cary Grant impérial en leader dur et cynique, qui va se retrouver perturbé par l’arrivée d’une femme étrangère à cet univers de têtes brûlées qui peuvent mourir du jour au lendemain. Certains des plus beaux plans du film seront alors des réunions de groupe dans un bar de studio qui retranscrit directement une Amérique latine d’époque fantasmée, et donnent une âme à cette compagnie du bout du monde.

Hawks était passionné d’aviation et avait rencontré des aviateurs travaillant pour une compagnie aéropostale. Fasciné, il s’est basé sur cette expérience pour développer son film, affirmant que tout ce qu’on y voyait, personnages et situations, était basé sur du réel. C’est peut-être ça qui confère cette authenticité à cet univers et à ces personnages auxquels on adhère immédiatement. Hawks prend pourtant bien son temps pour nous introduire à ce monde, qu’on découvre en même temps que le personnage de Bonnie (Jean Arthur), jeune new-yorkaise qui vient de débarquer de son bateau pour une escale. Loin d’être ingénue, elle découvre un monde indéniablement masculin et dur, fait d’amitiés viriles fortes, d’engueulades, d’alcool, de courage ; de solidarité surtout. La thématique du groupe toujours, chère à Hawks : ça passe dans l’entraide entre aviateurs, dans la manière de faire la fête dans le bar de la compagnie après la mort d’un ami plutôt que de le pleurer, dans la manière dont on rejette aussi celui qui est vu comme un traitre avant de lui donner la chance de faire ses preuves. Et ça passe aussi dans la sensibilité révélée par les femmes qui parviennent à s’immiscer dans ce monde.

Rythmé par les différentes « missions » d’aviation et par le début de romance entre Cary Grant et Jean Arthur, le film se présente donc surtout comme une chronique de cette compagnie, faisant la part belle aux nombreux personnages. Grant est excellent, mais il faut aussi mentionner les très beaux personnages du Kid (Thomas Mitchell), vieil aviateur sur le déclin, et surtout l’ambigu MacPherson, dont on ne sait pas quoi penser jusqu’au bout (formidable Richard Barthelmess). Jean Arthur est bien mais manque peut-être un peu de charisme pour tenir la comparaison – c’est un peu le rôle qui veut ça aussi.

Spectaculaire dans ses scènes d’aviation très prenantes (mélangeant prises de vues réelles et utilisation de maquettes), parsemé de répliques cinglantes, drôles et émouvantes, recréant en studio un univers exotique merveilleux avec une photo à tomber, ce film est un véritable chef-d’œuvre qui porte en lui tout ce qu’on peut aimer dans le cinéma hollywoodien classique, une sorte de Casablanca avant l’heure (plus « dur » et moins mélodramatique cela dit, mais rien que les personnages de Grant et de Bogart ont beaucoup en commun).
Et il conforte encore pour l’année 1939 son statut d’année dorée du cinéma américain.

9/10
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