Suspiria - 6,5/10
Posté: Mar 21 Déc 2010, 14:02
Suspiria |
Réalisé par Dario Argento |
6,5/10 |
Résumé : Suzy, une jeune ballerine américaine, arrive à Fribourg afin de suivre des cours dans une académie de danse prestigieuse. A peine arrivée, l’atmosphère du lieu, étrange et inquiétante, surprend la jeune fille. Et c’est là qu’une élève est assassinée…
Pour ma part, Suspiria appartient à cette catégorie de film, qu’il vaut mieux avoir vu en son temps. Le découvrir aujourd’hui, après des décennies de critiques dithyrambiques laisse une profonde impression de déception, tant il ne dégage aucune impression d’angoisse ou de peur.
C’est donc ça le film culte du cinéma d’horreur italien, du Giallo , interdit au moins de 16 ans !!! Le chef d’œuvre de Dario Argento m’a laissé un goût d’amertume, au point que je ne pense pas voir ces autres films. Pourtant je ne suis pas une adepte blasée des films d’horreur, loin de là, je n’aime pas le gore, ni les films d’aujourd’hui à la surenchère malsaine, violente et sanguinolente. J’attendais de Suspiria des moments de sursauts, une impression d’angoisse et j’ai surtout vu des adolescentes histériques qui surjouent, des gros plans sur des regards qui génèrent plus un sourire que la peur, une sorte de comedia dell’ arte qui se voudrait horrifique.
Qu’on ne me dise pas que c’est une question d’époque, car j’ai découvert Rosemary’s Baby, Shining ou L’Exorciste, bien des années après leur sortie et pourtant ces films restent à tout jamais gravés dans ma mémoire comme des summums de la terreur. La folie paranoïaque de Jack et Rosemary, la déchéance physique de Regan, la croisade contre le mal des pères Karras et Merrin restent des moments incontournables et mémorables du cinéma, tant leurs interprètes sont habités par leurs personnages. Dans Suspiria tous les acteurs sont médiocres voir mauvais et peu convaincants. Les babillements effarés, les yeux exorbités et les gesticulations hystériques de ces demoiselles m’ont laissé de marbre.
Qu’on ne me dise pas non plus que c’est une question d’effets spéciaux. Je suis loin d’être hermétique au faux sang de couleur orangé et aux animaux en plastiques ou en cartons pâtes qui ont plus l’air empaillé que vivant. C’est tout simplement un problème de mise en scène. Le passage avec la chauve-souris dans la chambre est tout simplement risible, alors que l’on devrait être angoissé ; il en va de même pour l’attaque du chien. Les mêmes types de fausse chauve-souris et de faux chien sont utilisés dans les différents Dracula ou dans Le Chien des Baskerville de Terence Fisher et font beaucoup plus crédibles, car le réalisateur joue sur les ombres et les lumières, sur les effets de brouillard pour masquer les artifices, tandis que Dario Argento se moque que l’on remarque tout de suite qu’il s’agit d’une fausse chauve-souris ou d’un faux chien, il compte sur l’omniprésence de la musique pour imposer un sentiment d’angoisse. Et bien c’est loupé ! Car la musique du groupe The Goblins assourdissante, allant crescendo et accompagnée des murmures de la Mère des soupirs me donne une impression de soufflé au fromage. La tension générée par cette musique n’est généralement pas à la hauteur des évènements qui se déroulent. Il n’y a rien de plus désolant qu’un soufflé qui se dégonfle. La preuve la plus flagrante, cette scène où toutes les élèves dorment dans un dortoir commun, la musique va crescendo au rythme de la respiration de la Mère des soupirs et puis… rien, il ne se passe rien. C’est pourtant le principe même des musiques de l’horreur de faire monter la tension pour provoquer le sursaut au moment voulu. Jamais dans Suspiria, il n’y a de scènes de sursaut.
Ce qu’il reste vraiment de Suspiria aujourd’hui, c’est une esthétique, un décor d’opéra, une mise en scène graphique de la mort . Un film singulier nimbé de rouge, de jaune et de bleu. Une oeuvre visuelle. Chaque couloir, chaque pièce, de l’institut de danse concourent à une impression de mystère et d’étrangeté des lieux. Chaque effet de tonnerre, de lumière, de pluie semblent se mouvoir au gré des murmures et de la respiration de la Mère des soupirs. Sur ce plan là, Suspiria est une réussite. Un film envoutant sur le plan visuel.
Les images parviennent même à transcender un scénario banal. Certes, Suspiria n’est pas dénué de propos. Beaucoup d’éléments symbolisent le passage toujours délicat et plein d’imprévus de l’enfance-adolescence vers l’âge adulte : la douce mélodie de boîte à musique, jouet de l’enfance par excellence, les poignées de portent placées très hautes, la volonté d’émancipation des danseuses, de contrôler leur vie, d’avoir leur propre appartement et de ne pas être pensionnaire, le maquillage, l’exacerbation de la paranoïa, la volonté de braver les interdits. Il y a aussi une volonté de transgresser certains codes de la morale : un chien d’aveugle qui tue et dévore son maître. Quelques ébauches d’idées qui ne sont malheureusement pas approfondies.
On a l’impression que pour Dario Argento, Suspiria doit être une expérience visuelle et musicale, et que le reste importe peu. D’ailleurs le film se clôture par : « vous venez d’écouter « Suspiria ».
Donc 6/10 pour l’esthétique et 0,5/10 pour l’interprétation, le scénario et le manque de tension. Pour moi, Suspiria n’est en aucun cas un film d’horreur. Chaque mort est une œuvre d’art si esthétique et maniérée qu’elle en oublie de provoquer la peur. J’aurai certainement mieux jugé le film, s’il n’était pas précédé d’une si élogieuse réputation. Quant à l’interdiction au moins de 16 ans, elle me laisse vraiment perplexe, quand on sait que L’Exorciste ne fut interdit qu’au moins de 12 ans !!!