DRIVE-------------------------------------------
Nicolas Winding Refn (2011) |
7/10 Le héros sans nom, campé par Ryan Gosling, est un personnage mécanique, insensible et froid, comme les voitures qu'il conduit et qui le conduisent au gré d'une vie millimétrée, chronométrée, entre jobs de cascadeur pour le cinéma, employé d'un Bryan Cranston garagiste et seul ami, et conducteur lors de braquages nocturnes et silencieux, son côté sombre. Ce héros mutique nous est présenté tel quel, sans passé ni avenir, mais avec tout cette complexité. Une opacité sombre et mélancolique. Mais la chaleur des rapports humains va venir s'immiscer et dérégler ce papier à musique triste, prenant les traits d'une jolie petite blonde au regard aussi triste que lui (Carey Mulligan très bien), de son fils, puis ensuite du mari sorti de prison. Et la partie va très vite s'envenimer, et basculer dans une violence incontrôlable et la tristesse muer en fureur. Film de genre avant tout, avec des scènes de violence âpres et sanglantes (à la History of violence), Drive est pourtant aussi une chronique toute en retenue de la solitude des hommes et des rapports contradictoires dictés par la raison (jeux de masque et de pouvoir mafieux, amitiés/amours silencieux, poignées de main sales et hypocrites).
Film d'une beauté glaciale et d'une langueur minutieuse dans sa 1ère partie, Drive souffre cependant de plusieurs défauts, notamment des méchants ratés avec un Perlman honteux, et un dénouement franchement grandiloquent. Heureusement la beauté plastique de la mise en scène, son côté électrique, suscite la curiosité autant dans l'action que la contemplation; et si le héros abandonne la conduite beaucoup trop vite malheureusement, c'est pour mieux perdre son calme stoïque et laisser apparaître son humanité et ses paradoxes, comme dans cette scène grandiose de l’ascenseur où Refn filme tout en lumières et perspective un trio de silence, de sensualité touchante et de violence meurtrière.
Un exercice de style méticuleux sur fond de série B romantique et triste, qui constitue malgré des défauts une belle claque graphique, noire, violente et teintée de rose.