♦♦♦♦♦♦♦♦♦♦♦♦♦♦♦♦♦♦♦♦♦♦♦♦♦♦♦♦♦♦♦♦♦♦♦♦♦♦♦♦♦♦♦♦♦♦♦♦♦♦♦♦♦♦♦♦♦♦♦♦La vie, l'amour, la mortFilm de Claude Lelouch · 1 h 55 min · 1969 (FRA)
♦♦♦♦♦♦♦♦♦♦♦♦♦♦♦♦♦♦♦♦♦♦♦♦♦♦♦♦♦♦♦♦♦♦♦♦♦♦♦♦♦♦♦♦♦♦♦♦♦♦♦♦♦♦♦♦♦♦♦♦Je ne sais pas trop quoi penser de la mécanique narrative particulière du film, manifestement conçue pour servir un plaidoyer contre la peine de mort, encore en vigueur en France à la fin des années 60 (son abolition n’interviendra, rappelons-le, qu’en 1981).
Cette mécanique repose sur un choix radical : une absence quasi totale de contexte pendant une très (trèèèès) longue exposition, au cours de laquelle on fait la connaissance d’un protagoniste à l’allure bonhomme, à la vie apparemment banale, partagé entre un travail harassant, une maîtresse passionnée (Caroline Cellier, qui m’a étrangement fait penser à Virginie Efira, allez savoir pourquoi) et une petite famille à laquelle il semble sincèrement attaché.
Puis patatra, la machine se met en marche : après de longues minutes qui m'ont littéralement anesthésié, la police intervient et arrête le personnage, qui sera rapidement condamné à mort. À partir de là, la couleur disparaît, et le film se recentre sur l’attente, les errances mentales et la lente désincarnation d’un homme qui compte désormais les heures. Le procédé est plutôt bien foutu, on s'ennuie terriblement avec lui, assez triste pour son sort.
Lorsque Lelouch consent enfin à livrer un peu de contexte — et ce n’est pas très jojo— le portrait se trouble : l’homme ordinaire et presque aimable suivi jusque-là pourrait avoir un passé chargé, du genre étrangleur de la place Rillington. Cela change évidemment la donne. Mais comme le film ne tranche jamais complètement, notamment à travers l’usage de coups de téléphone anonymes et d’informations vaporeuses, cette zone d’incertitude agit comme un grain de sable dans toute tentative de justification rationnelle de la peine capitale.
Au final, le film est plus que respectable et souvent juste dans ses intentions, mais sa durée excessive m’a posé problème. À force d’étirer l’attente, la fin m’a presque paru être une délivrance plutôt qu'un vecteur d’émotion tragique, ce qui est tout de même problématique pour un propos censé atteindre, à cet instant précis, la pleine tristesse de son paradoxe — notamment lors de la plaidoirie finale, très éloquente, véritable point d’orgue au réquisitoire humaniste du cinéaste.
Un film sérieux et sincère, donc, mais qui m’a laissé l’impression que d’autres œuvres ont traité le sujet bien mieux, notamment
In Cold Blood de Richard Brooks, sorti deux ans plus tôt, auquel il est difficile de ne pas penser tant certains choix narratifs du film de Lelouch semblent s’en inspirer directement, jusque dans la dernière ligne droite.