[Dunandan] Mes critiques en 2013

Modérateur: Dunandan

Donation (La) - 7,5/10

Messagepar Dunandan » Sam 09 Mar 2013, 02:48

La donation

Réalisé par Bernard Emond

Avec Elise Guilbault, Jacques Godin, Eric Hoziel

Drame, Canada, 1h35 - 2009

7.5/10

Résumé :
Lorsqu'il envisage de prendre quelques semaines de vacances, le Dr. Rainville passe une petite annonce afin de trouver un remplaçant qui accepterait de prendre sa place à Normétal, en Abitibi. L'urgentologue Jeanne Dion, de Montréal, accepte l'offre et se rend sur place, où elle entre en contact avec la clientèle âgée et solitaire du médecin.

Bernard Emond termine sa trilogie avec le même niveau de qualité que les deux autres. Il nous expédie cette fois-ci en Abitibi (équivalent de nos profondes compagnes) avec le docteur de la Neuvaine (interprété par la même actrice), toujours hanté par sa quête de sens dans son métier (peut-elle sauver et accommoder tout le monde ? Comment faire face au mal et à la mort ?). L'entre-aide est ainsi plus que jamais au coeur de ce film, conçue ici comme un vrai sacerdoce laïque (titre très intéressant d'ailleurs, qui peut signifier héritage, transmission). Confirmation que la charité, dernière vertu théologale, est le résidu religieux validé par le réalisateur.


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Alors que le premier film incarnait une sorte de fuite de l'âme, et le second une résistance des corps contre l'adversité, le troisième est celui de l'acceptation et de la responsabilité. Acceptation d'abord de cet appel enfoui au plus profond de Jeanne, mais aussi de ce terroir québécois, capturé par une caméra qui met en valeur cette géographie austère, terre des pionniers, et dont la beauté doit s'apprivoiser souligne le Dr Rainville. L'esthétique sobre et simple mise en oeuvre reflète une vraie philosophie du regard qui s'expurge de toute image en trop. Et de cette réserve, le film en est rempli, gardant ses respectueuses distances avec les personnages et s'intégrant dans leur intimité pas à pas, jusqu'à capturer leur fragilité gravée sur les visages, la tendresse de leurs rapports, où chaque geste simple est investi d'un sens sacré immanent. Bref, la condition humaine dans toute sa splendeur et gravité.

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Le film est centré sur Jeanne qui visite des patients à domicile, à l'hôpital, ou dans la rue. Nous découvrons ainsi la pratique médicale de l'intérieur, sans fards mais avec discrétion, à la rencontre de situations assez variées et intéressantes (violence, avortement, drogue, maladie d'un riche vivant isolé, celle d'une mère ...) qui exige souvent une belle dose de jugement, guidé par la valeur de la dignité humaine. Jeanne, en répondant à l'appel du médecin qui veut prendre sa retraite, touche à des questions très actuelles sur la médecine de proximité (dans un rapport ancien/héritier à la manière de Barberousse) : jusqu'où peut-on côtoyer la douleur humaine sans se faire mal ? Où mettre la limite ? Une seule réponse donnée en retour : "il faut servir" (cette trilogie, plus qu'une belle revisitation humaniste du christianisme, est donc surtout un cri silencieux de résistance contre les valeurs dominantes de notre société, surtout l'individualisme). Et une consolation : la vie se renouvelle à travers la nature ou son prochain (avec une dernière image lourde de symbole). En outre, c'est un véritable film-somme (thèmes communs : perte de sens, handicap, culpabilité ...), qui n'oublie pas de conclure (chacun a trouvé sa place ou est en chemin).

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"Si tu ne crois pas en Dieu, ne t'avise pas de prendre sa place"

Un film qui prend son temps à nous renvoyer à notre humanité et nos racines, avec des visages et une nature filmés comme des peintures/panoramas. Avec grâce et pudicité, ce troisième épisode d'une trilogie originale renvoie à notre responsabilité, incarnation concrète de l'humain dans son rapport au sacré.
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Furies (Les) - 6,75/10

Messagepar Dunandan » Sam 09 Mar 2013, 22:14

Les furies

Réalisé par Anthony Mann

Avec Barbara Stanwyck, Wendell Corey, Walter Huston, Dame Judith Anderson, Gilbert Roland

Western/drame, USA, 1h49 - 1950

6.75/10

Résumé :
Nouveau-Mexique, en 1880 : l'héritage du riche Temple Jeffords doit revenir à sa fille Vance. Mais une intrigante, Flo Burnett, cherche à déposséder la jeune femme de son héritage. Les deux rivales se vouent une haine farouche.

Les furies est le tout premier essai de Mann dans le genre, et comme La porte du diable, porte encore le sceau de l'esthétique du film noir. Ainsi la réalisation est de haut niveau, pas de doute là-dessus, même sans la présence d'Alton, et la zik mexicaine apporte du tonus et du romantisme. Par contre l'histoire est assez bancale malgré sa densité. Western psychologique, il est la préfiguration féminine de L'homme de la plaine (pour son bras de fer ambigu entre la figure paternelle du ranch et sa fille), et du Petit arpent du bon Dieu (pour cette relation quasi incestueuse et son ton tragicomique). Le récit porte sur les relations familiales et les problèmes financiers du ranch, puis se resserre autour de l'opposition père-fille après qu'une femme vienne envahir le cercle paternel et menacer son propre pouvoir.

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Pour la première et dernière fois chez Mann, le rôle principal est attribué à une femme, Barbara Stanwyck (connue surtout pour ses films noirs comme Assurance sur la mort), qui bouffe le casting par une énergie flamboyante, tyrannique, et obstinée très masculine. Elle est la seule à pouvoir retenir l'autorité de son père qui gère son Empire comme Napoléon (père de John Huston qui joue bien le mégalo un peu fou fou), sans négliger sa féminité en courant deux lièvres à la fois. Ce qui pose problème, chacun ayant une dent contre son père (et pour ce courage il la respecte et la considère comme son héritier à la place de son fils) : un mexicain (interprété par Gilbert Roland dont on retrouvera les risettes pour le meilleur et le pire dans Le port des passions), ami d'enfance, qui occupe illégalement avec sa famille (dont une grand-mère à moitié folle qui est le pendant féminin de TC) "Les furies" pour survivre, et un patron et joueur de saloon qui a des vues sur le meilleur bout du ranch tout en nourrissant une vengeance personnelle.

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Ce triangle amoureux est intéressant non seulement pour le type d'amour qu'ils représentent (amour platonique, amour-passion), leur caractère opposé qui rejaillit sur l'identité de la femme (le premier est paria mais sincère, l'autre manipulateur et intéressé), mais aussi pour le jeu de pouvoir qui a lieu entre la fille et le père (qui lui offre de l'argent pour guider son choix), qui va exploser au grand jour avec l'arrivée d'une prétendante à ce dernier. Chez Mann, les histoires d'amour sont toujours un pattern qui révèle les tensions qui habitent les personnages, et là ça ne manque pas, et on se retrouve loin de l'amour fleur bleue puisque la fille se retrouve finalement par s'allier autant (plus ?) par intérêt que par amour, pour se liguer contre la figure paternelle toute puissante.

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Le problème c'est qu'on se désintéresse assez facilement des autres personnages, vu que le film repose surtout sur le duo père-fille en sacrifiant les autres (à part peut-être les deux prétendants). Et la tonalité mi-comique, mi-tragique, rend l'empathie parfois difficile en dépit des dialogues teintés d'ironie qui font parfois mouche (les ressorts dramatiques tiennent d'ailleurs plus du film noir que du western), et surtout donne l'impression que certains rebondissements sont trop brusques, (le père, conciliant puis sanguinaire ; la fille, enfantine puis vengeresse ...), comme des sautes d'humeur incontrôlables (bien que ce soit cohérent avec la photo qui capte parfois la nature comme un élément déchaîné). Dommage pour ce problème d'équilibrage, car l'histoire compte quand même des séquences fortes (exemples : le discours du joueur sur l'amour et les cartes - honnêtes au contraire des femmes -, la chambre de la mère interdite aux non-familiers puis souillée par sa remplaçante et donnant lieu à une vengeance sadique, l'attaque musclée contre le repaire des mexicains superbement filmée en plongé/contre-plongé, le combat épique du père contre la reine du troupeau), d'un esprit de composition et d'un symbolisme retentissants.

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Enfin, la conclusion ressemble vraiment au Petit arpent de Dieu, entre rédemption paternelle à travers les enfants, et vengeance qui tourne mal, mais de nouveau trop brusque dans son retournement pour être convaincante. Définitivement pas un grand Mann, mais à voir pour ce qu'il préfigure dans sa carrière (thèmes du territoire, des conflits familiaux, de l'obstination, de la rédemption), et son mélange des genres assez rafraîchissant.

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Film hybride et atypique de Mann qui oscille entre film noir pour son esthétique, drame familial pour son intrigue shakespearienne, et western pour son cadre, qui vaut surtout pour la présence énergique de Barbara Stanwyck, mais qui pèche par une histoire bancale et un développement inégal des personnages.
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Film: Furies (Les)
Note: 6/10
Auteur: Scalp

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Re: [Dunandan] Mes critiques en 2013

Messagepar Dunandan » Dim 10 Mar 2013, 14:39

Pour les indécis (je pense surtout à Heatmann s'il ne l'a pas vu, ça pourrait lui plaire), j'ai rajouté quelques captures :super:.

Ce serait bien d'ailleurs qu'une version française voit le jour, j'avais du mal à comprendre tous les détails avec les sta, ce qui est toujours un peu gênant.
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Desperate - 6,25/10

Messagepar Dunandan » Dim 10 Mar 2013, 18:54

Desperate

Réalisé par Anthony Mann

Avec Steve Brodie, Audrey Long, Raymond Burr, Douglas Fowley, William Challee, Jason Robards Sr

Film noir, USA, 1h14 - 1947

6.25/10



Résumé :
Après un casse qui s'est mal passé, un jeune couple prend la fuite, poursuivi à la fois par la police et des gangsters.

Bonne petite série B qui ne paye pas de pain mais très agréable à suivre et bien rythmée. Une histoire classique (un bon futur père de famille qui se retrouve au mauvais endroit et va tout faire pour mettre sa femme enceinte à l'abri) mais rondement menée, malgré quelques petits soucis d'interprétation, de crédibilité, et de suspens dans la seconde partie.





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Ce film est surtout le premier qui donne l'occasion à A. Mann de faire un peu ce qu'il veut (il en écrit d'ailleurs le scénario). Et en effet, ça le ressemble, à l'image de cette première partie où l'on découvre ce couple qui doit faire face aux dangers extérieurs (le garagiste escroc, le shérif suspicieux, le regard des autres qui donnent lieu à une touche d'humour) qui se surajoutent à la menace des gangsters. D'autre part, la planque de ces derniers est vraiment chouette, toute filmée en contrastes avec un beau jeu d'ombres (j'aime beaucoup l'ampoule qui balaye la pièce) et de bonnes sales gueules (on retrouvera Douglas Fowley et Raymond Burr camper d'autres badguy, l'un dans Armored car robbery, et l'autre dans Marché de brutes).

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Par contre, si le personnage principal (qui rappelle le bon gars malchanceux de La rue de la mort dans sa tentative de prouver son innocence) joue bien, sa compagne frôle le sur-jeu (faut l'entendre répondre à l'appel de son mari) et ne semble pas très futée. Ils forment néanmoins un joli couple. Passée la première partie, ça manque de tension et d'enjeux (une fois que le couple est apparemment en sécurité : il l'est trop !), d'autant plus que les pistes laissées aux truands sont ou bien grosses comme le Niagara, ou bien laissées à l'imagination du spectateur. Enfin ça manque d'ambiguité (gentils vs méchants). Néanmoins l'histoire est fluide, et l'intérêt revient avec un final bien orchestré, par la mise en scène (pour figurer le temps qui vient à manquer : le tic-tac de l'horloge, le plan à la Sergio Leone sur les yeux) et la réalisation (la course-poursuite dans les escaliers, lieu commun du genre, mais très bien mise en valeur par les cadres et contrastes).

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Bref, malgré tous ces petits défauts, il émane une véritable petite ambition de ce film de studio, qui avait déjà une sacrée ampleur narrative (ça se déroule sur plusieurs mois, avec filature, mariage, naissance, et duel final), et une relative solidité qui préfigure le meilleur.

Petit Mann qui souffre de problèmes de tension dans sa seconde partie et de petits défauts de cohérence/interprétation, mais tient quand même en haleine jusqu'au bout.
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Re: [Dunandan] Mes critiques en 2013

Messagepar Dunandan » Dim 10 Mar 2013, 19:43

Récap' de ma rétro sur A. Mann (non je ne me sens pas seul :mrgreen:) : me restent plus que Cimarron, Glenn miller story, et Les héros de Télémark. Jusqu'à présent je ne trouve aucun déchet, au pire des films mineurs :D (et même ceux-là sont souvent divertissants).

Je voudrais bien me faire aussi son Two o'clock courage mais il semble introuvable ici, faudra que j'attende d'être en France ...
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Re: [Dunandan] Mes critiques en 2013

Messagepar Scalp » Dim 10 Mar 2013, 19:44

Telemark tu verras c'est vraiment pas top, ptet bien son plus mauvais même.
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Re: [Dunandan] Mes critiques en 2013

Messagepar Dunandan » Dim 10 Mar 2013, 19:50

De ceux dont j'ai entendu parlé, c'est peut-être Strategic Air Command qui remporte la palme. J'ai essayé 5 min et j'ai abandonné. Les sous-titres décalés n'ont pas aidé et surtout c'est un gros film de propagande bas du front.

Et j'ai aussi entendu parlé de Serenade, voilà tout est dans le titre :mrgreen: (avec le chanteur préféré des filles de Créatures célestes en personnage principal).
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Re: [Dunandan] Mes critiques en 2013

Messagepar Mark Chopper » Dim 10 Mar 2013, 19:53

Reviens chez les bridés !
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Re: [Dunandan] Mes critiques en 2013

Messagepar Dunandan » Dim 10 Mar 2013, 19:54

T'inquiètes, j'ai beaucoup de bridés en réserve, surtout des japonais (une bonne petite douzaine sans compter ceux que je peux emprunter). Mais aujourd'hui je n'ai pas eu le temps c'est tout :wink: (c'est que ça dure longtemps ces bobines)
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Ésimésac - 6,5/10

Messagepar Dunandan » Jeu 14 Mar 2013, 04:40

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Esimesac, Luc Picard (2012)

Résumé : Les villageois de Saint-Elie-de-Caxton souffrent de la famine. Esimésac les incite à cultiver des jardins communautaires mais l’arrivée imminente du chemin de fer sème la zizanie …

Sympathique ce Ésimésac. Sorte de fable champêtre (mais avec un fond moderne) rappelant un peu Une grande séduction (pour les amateurs des galettes québécoises, c'est à découvrir), qui nous abreuve d'une belle petite poésie à la photographie ensoleillée, agrémentée de dialogues souvent truculents gorgés de jeux de mots bon enfant (style Marcel Pagnol), et de personnages hauts en couleur (pour les initiés de ce cinéma, l'accent ajoute beaucoup à la musicalité intrinsèque du texte).

Le message communautaire du film ("tous unis contre la misère") évite justement le misérabilisme par ses moments comiques et son aspect légèrement fantastique, apportant une légèreté de ton bienvenue. L'histoire se déroule au siècle dernier (dans un temps indéfini), qui est dès le départ contaminée par deux étranges personnages : l'homme le plus fort du monde, âgé de 2 ans (incarnant l'innocence paysanne), sans ombre, qui se confronte au forgeron (incarnant la technologie et le capitalisme), lui aussi très fort, à l'ombre écrasante.

Par ce biais incongru, le merveilleux se nivelle en plusieurs niveaux de lecture plus ou moins inspirants (politique, religieux, social, et surtout économique : c'est là que je me rend compte que la production québécoise compte essentiellement des comédies ou des films engagés) qui reflètent des revendications très actuelles : la chaleureuse communauté humaine qui cultive son jardin en unissant ses forces vs la vicieuse modernité qui construit son chemin de fer pour l'argent au détriment des relations humaines. Cette opposition de principe est représentée de façon très originale à l'écran : l'homme sans ombre vole celle d'un gland pour devenir quelqu'un (pour les esprits tordus, oui il y a des jeux de mots grivois qui tournent autour, avec surtout l'une des scènes d'amour les plus originales et poétiques que j'ai vu au ciné), et grossit peu à peu à mesure qu'il gagne en fierté et en ambition, mais du coup perd aussi en lumière (incarnée, elle, par une petite fille angélique, qui dépérit lorsque l'unité du village périclite).

Par contre, à trop vouloir en faire, l'histoire manque parfois de maîtrise dans ses développements (ça ne me dérange pas que tout ne soit pas expliqué, mais on sent que ça manque parfois de substance), avec notamment une notion du temps assez floue (un défaut récurrent des fables) ayant pour conséquence d'étirer en longueurs (surtout à la fin). Puis il ne faut pas espérer trouver un fond complexe malgré un riche enrobage. Mais à voir quand même pour sa poésie, ses personnages, et son petit message sympa (malgré la fin qui lorgne dangereusement vers le dégoulinant Joyeux Noël).

Belle petite fable humaniste et communautaire très rafraichissante et plaisante qui reflète les maux de notre époque, mais qui pèche par la maîtrise de son récit, en dépit de sa (trop grande ?) simplicité de fond.
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Surveillance - 8,5/10

Messagepar Dunandan » Ven 15 Mar 2013, 23:26

Surveillance

Réalisé par Jennifer Lynch

Avec Julia Ormond, Bill Pullman, Pell James, Ryan Simpkins, French Stewart, Kent Harper, Michael Ironside

Thriller/policier, USA, 1h35 - 2008

8.5/10

Résumé :
Deux agents du FBI dans une petite ville perdue pour enquêter sur une série de meurtres. Ils retrouvent sur place trois témoins : un policier à la gâchette facile, une junkie complètement déconnectée et une petite fille de huit ans encore sous le choc. Les agents découvrent rapidement que les témoins donnent chacun une version différente des faits, dissimulant manifestement une partie de la vérité.
Avec ce film, J. Lynch s'inscrit dans une thématique propre à son père : le rapport à l'image. Mais alors que ce dernier nous offre des pellicules difficiles d'accès en malmenant son montage (nous laissant ainsi douter sur la vérité de ce que l'on regarde, entre rêve et réalité), sa progéniture développe une manière de raconter plus simple et lisible, plus proche de celle de Rashomon avec une histoire linéaire où tout est affaire de perspective, de faux-semblants, et finalement de déviance derrière une vérité bien policée. Un film que ne renierait pas David Fincher dans son principe, qui dans ses polars, porte aussi un constat contre ceux qui ne savent plus regarder et interroger la réalité.

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Ce concept d'histoire à tiroirs est parfaitement maîtrisée, à travers une enquête policière à base d'interviews et de surveillance par vidéo, qui est surtout un bon prétexte pour mettre en oeuvre cette idée. Dès l'arrivée des deux agents du FBI, on sent déjà une tension d'animosité entre forces de l'ordre et ces derniers, comme s'il fallait que chacun défende son territoire. Au fur et à mesure, on y découvre ainsi deux niveaux de vérité principaux, celle qu'il est possible de délivrer sans se griller, et un autre plus authentique, dévoilant un monde bien triste et noir, où toute morale est bannie : une paire de policiers qui joue au bon/mauvais flic pour effrayer les conducteurs ; un couple de drogués et hystériques qui ne s'émeuvent même pas de la mort d'une personne ; une famille qui ne s'écoute pas, et particulièrement la petite fille dont le regard (troisième niveau de vérité) est le seul à pouvoir lire clair au coeur des évènements. Or, un tour de force du récit, même son innocence apparente est remise en question, réduisant d'autant le peu de lumière et d'espoir qui résidaient un tant soit peu dans le film.

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L'une des grandes forces de la réalisation est sa gestion des tensions, des rebondissements, et d'une histoire qui demeure toujours fluide malgré une complexité qui s'installe. Même le twist que j'attendais un peu s'inscrit très bien dans le récit. Loin d'être simplement malin il apporte vraiment quelque chose, notamment en nous faisant relire certaines relations. Enfin, le casting est vraiment très bon et juste, des premiers aux seconds rôles. J'ai bien sûr été impressionné par les deux flics du FBI qui cachent bien leur jeu, mais aussi par les deux fans de la gâchette, véritables Hyde et Jekyll, imprévisibles et capables du pire, et incarnent ainsi par leur présence malsaine l'ambivalence de la vérité au coeur de ce film, l'un des meilleurs sur la psychopathie que j'ai vu jusqu'à présent. Un petit bijou de manipulation qui nous offre en même temps une sombre peinture de l'âme humaine. Dommage que cette réalisatrice n'a pas su gardé ce niveau de qualité dans la durée.

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Un film de serial killers à la sauce Rashomon parfaitement maîtrisé, porté par un casting de choc.
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Re: [Dunandan] Mes critiques en 2013

Messagepar Moviewar » Sam 16 Mar 2013, 09:36

Super critique ! :super:

Le film est toujours aussi bon à la revision !
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Blood Simple - 8,5/10

Messagepar Dunandan » Mer 20 Mar 2013, 17:39

Blood simple

Réalisé par les frères Coen

Avec John Getz, Frances McDormand, Dan Hedaya, M. Emmet Walsh, John Getz, Samm-Art Williams

Policier, USA, 1h36 - 1984

8.5/10

Résumé :
Le Texas, une femme, son amant, son mari jaloux et un privé pourri. Par intérêt, les uns et les autres vont se retrouver entraînés dans une spirale infernale. Ils découvriront en chemin qu'un meurtre est une entreprise très longue et très difficile à mener.

Avec ce premier film, les frères Coen frappent un grand coup. Hommage évident au film noir avec ses ingrédients habituels (adultère, vengeance du mari, détective véreux engagé pour les tuer, scènes nocturnes ...), cet emprunt esthétique et narratif est surtout le terrain idéal pour poser les bases de leur univers, et ce, dès l'introduction : une représentation sombre de la nature humaine, teintée d'une bonne dose d'ironie, d'humour noir, et d'absurdité. Cette vision est portée par des personnages bien écrits et interprétés, tour à tour lâches, pathétiques, ou machiavéliques. La petite guerre nourrie entre les deux amoureux autour de cette femme va tourner à la grosse farce, causée par un gros soucis de communication, de non-dits, et de bêtise humaine.


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L'histoire, malgré une simplicité de fond qui permet aussi de faire des relectures de son inspiration première (exemple : la femme qui est l'anti-fatale par excellence, qui ne comprend pas ce qui lui arrive, la bêtise des hommes étant suffisante pour se mettre dans la merde), est brillamment écrite et mise en scène. Un phénomène devenu rare, l'attente est maintenue de bout en bout, nous demandant ce qui va arriver après. Ce temps-là est l'occasion pour placer l'atmosphère qui précède parfois l'introduction des personnages, à l'image de cette première scène à l'intérieur d'une voiture qui laisse les visages inconnus, dont l'espace est simplement rempli par le rythme obsédant des essuie-glaces et les voix de ces derniers, si identifiables à leur timbre et leurs paroles (l'une des grandes marques de fabriques des deux frères). Aucun temps mort malgré ce rythme légèrement lancinant mais essentiel, une manière aussi de marteler par petits coups la fatalité qui prend des allures jamais évidentes pour le spectateur.

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Pourtant, de petits indices (notamment le pistolet offert à la femme, de première importance) viennent ponctuer le récit sur la manière dont ce dernier va se dérouler. Mais l'une des plus grandes réussites du film, c'est l'ignorance mutuelle des protagonistes de leurs motivations, si bien que j'avais parfois accusé le film d'incohérences (notamment l'implication de l'amant que j'avais trouvé idiote), mais qui, une fois les pièces de puzzle rassemblées, renversent notre point de vue sur la scène globale du crime. D'autre part, les objets laissés sur leur chemin sont autant de voies qui ouvrent notre imagination (par exemple la nomination du détective privé par son briquet), et comblent d'autre part l'histoire d'absurdité par les non-dits mal interprétés, jusqu'au dénouement final qui est une merveille en ce genre, qui non seulement offre un plan absolument génial par son fond et sa forme, mais assoie durablement le style des deux frères.

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Si ce film fonctionne si bien, on le doit aussi aux acteurs. Frances McDormand joue beaucoup sur son joli minois (ces yeux bleus !), rendant d'autant plus intense sa scène finale, et forme un beau petit couple avec John Getz (étonnant la dualité dont il peut faire preuve), tous les deux habités par la culpabilité du désir consommé. Et Emmet Walsh est excellent dans le rôle du détective, tour à tour pervers et dangereux.

Un premier film des frères Coen et chef-d'oeuvre. Reprise brillante et personnelle du film noir incarnant déjà leur style par la sombre peinture humaine offerte, ses personnages gratinés, sa mise en scène maîtrisée, et son ironie dévastatrice.


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Re: [Dunandan] Mes critiques en 2013

Messagepar Jack Spret » Mer 20 Mar 2013, 18:17

:super:
Tu me fais bien plaisir là.
C'est clairement mon Coen préféré avec The Big Lebowski


"- Ça vous dirait un petit échange dans la ruelle, derrière le bar ?
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Re: [Dunandan] Mes critiques en 2013

Messagepar Dunandan » Mer 20 Mar 2013, 18:31

C'était l'un des seuls films des frères Coen que j'avais pas vu, et je me suis pris une belle petite claque :super: (j'ai aussi halluciné quand j'ai vu le petit budget alloué et la date de sortie)
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