[Dunandan] Mes critiques en 2013

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Re: [Dunandan] Mes critiques en 2013

Messagepar zack_ » Mar 03 Sep 2013, 15:38

Elle où ta critique d'IM3 je la vois pas dans la base? :mrgreen:
zack_
 

Virgin Suicides - 8,5/10

Messagepar Dunandan » Mar 03 Sep 2013, 18:24

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Virgin Suicides, Sofia Coppola (1999)

Sofia Coppola nous livre ici un magnifique portrait sur la fin de l'adolescence, à la fois juste, délicat, et fragile. Basée sur un fait divers, l'une des forces de cette histoire est son point de vue distancié, sans personnage principal, prenant parfois la forme d'une étude de moeurs, évitant ainsi tout jugement moral (notamment sur les parents). Car loin de nous en délivrer toutes les clés, et selon une démarche humble, le propos principal du film est justement le caractère quasi insondable des sentiments et des motivations de ces jeunes filles ayant choisi l'irréparable, en dépit des circonstances évoquées qui nous laissent des pistes éparses (sans jamais nous permettre de compléter entièrement les pièces du puzzle), avec en ligne de mire une mère ultra conservatrice et un milieu de vie artificiel se laissant lentement gagner par l'ennui. En contrepoint, les médias reprennent l'affaire en manipulant les informations pour transformer l'ordinaire en sensationnel, alors qu'il s'agit bien d'un fait tristement ordinaire.

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Au lieu de suivre simplement le point de vue des filles, le récit s'enrichit donc de la perspective de quatre garçons qui fantasment sur leurs voisines, accompagnée d'une voix off moribonde qui anticipe déjà sur la fin. La réalisatrice sait très bien capturer ces petits moments de grâce et de rêverie où les adolescentes se laissent vivre (ou bien est-ce seulement dans la tête des garçons ?), portés par des images sublimes, et rythmés par le groupe Air (aussi planant que ce que son titre suggère) qui alterne doucement légèreté et mélancolie. C'est aussi un film sur le temps qui passe, l'ordinaire du quotidien, et les apparences trompeuses (très bien rendues par l'esthétique faussement rose bonbon), avec un sentiment d'étouffement de plus en plus palpable de la part des filles (rythmé entre autre par l'élimination des arbres), qui rend d'autant plus puissant leur désir de se libérer, particulièrement du cocon familial et résidentiel, mais aussi on le comprend, de leur propre condition d'adolescence qui se heurte à une réalité qui ne les comprend pas. Les points de vue qui se croisent (le psychologue, les garçons, les filles, les parents ...) sans jamais se répondre (ou passant à côté) expriment bien la difficulté pour chacun de communiquer et de comprendre ce qui se passe réellement.

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En dépit de son regard distancié, Sofia Coppola s'applique à donner son point de vue sur la différence des sexes. Or, elle saisit justement l'essence de leurs rapports, les uns (les garçons) cherchant simplement à coucher sans donner suite, tandis que les autres (les filles) sont de vraies femmes à l'intérieur et cherchent à faire durer un peu les choses. Après le bal de promo censé couronner la période adolescente, le malentendu entre les deux groupes se ressent d'ailleurs comme une petite onde de choc ... Mais leur point commun est aussi très bien reproduit, comme ces brefs moments de fantasmes ou de rêverie qui animent leur esprit adolescent, bol d'air nécessaire répondant à la banalité du quotidien, tranquille mais mortellement ennuyeux. A ce titre, la petite scène où les adolescents communiquent par téléphone via les chansons est un petit bijou de poésie. La fin, en dehors de sa soudaineté qui surprend toujours, est un retour à la prétendue normalité. La dernière séquence est une véritable métaphore acide sur le milieu banlieusard chic, qui veut extirper le moindre petit drame de sa petite vie creuse, en l'enrobant d'une bonne dose d'ironie nauséabonde.

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Sans oublier le casting qui est très bon. Kathleen Turner joue parfaitement cette mère qui, en agissant par amour (et selon sa religion), éloigne d'autant plus ses filles d'elle-même. James Woods est très bon dans ce rôle du père complètement dépassé par la situation. Kirsten Dunst tient ici l'un de ses plus beaux rôles (à l'instar de ses jeunes collègues), tout un symbole de cette adolescence en quête de liberté et de divertissement (puis d'amour), jeune et fraîche, et progressivement fanée de l'intérieur. Et Josh Hartnett est convaincant dans la peau de ce jeune playboy superficiel qui a la côte.

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Sofia Coppola devient avec ce film une référence du teenage movies, en élaborant un portrait de cette période sensible, à la fois distancié et doté d'une poésie sombre.
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Re: [Dunandan] Mes critiques en 2013

Messagepar Dunandan » Mar 03 Sep 2013, 20:24

zack_ a écrit:Elle où ta critique d'IM3 je la vois pas dans la base? :mrgreen:


J'ai donné un petit avis ailleurs, mais sérieusement c'est un film que j'ai vu brainless et en VF. Je serais donc bien incapable de pondre une critique un peu plus développée :chut:.

(et sérieusement, la patte de S. Black, je persiste, est bien présente dans Iron Man 3 :mrgreen:)
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Re: [Dunandan] Mes critiques en 2013

Messagepar Mark Chopper » Mar 03 Sep 2013, 20:28

dunandan a écrit:J'ai donné un petit avis ailleurs, mais sérieusement c'est un film que j'ai vu brainless, défoncé à la coke, avec 5 grammes de sky dans le sang et en VF. Je serais donc bien incapable de pondre une critique un peu plus développée :chut:.


Fixed.
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Re: [Dunandan] Mes critiques en 2013

Messagepar Dunandan » Mar 03 Sep 2013, 20:31

Shit, you got me ! :chut:
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Re: [Dunandan] Mes critiques en 2013

Messagepar Jed Trigado » Mar 03 Sep 2013, 20:34

Tu devrais dire : Hostie de calice tabarnak' !
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Re: [Dunandan] Mes critiques en 2013

Messagepar Dunandan » Mar 03 Sep 2013, 20:41

Ou bien : caline de bine, arrête de faire ton niaiseux ! :mrgreen:
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Re: [Dunandan] Mes critiques en 2013

Messagepar zack_ » Mer 04 Sep 2013, 15:46

dunandan a écrit:
zack_ a écrit:Elle où ta critique d'IM3 je la vois pas dans la base? :mrgreen:


J'ai donné un petit avis ailleurs, mais sérieusement c'est un film que j'ai vu brainless et en VF. Je serais donc bien incapable de pondre une critique un peu plus développée :chut:.

(et sérieusement, la patte de S. Black, je persiste, est bien présente dans Iron Man 3 :mrgreen:)


Je disais ça pour avoir un peu de soutien à ma critique :eheh:
zack_
 

Lost in translation - 10/10

Messagepar Dunandan » Mer 04 Sep 2013, 17:45

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Lost in Translation, Sofia Coppola (2003)

Après sa brillante adaptation du roman éponyme Virgin Suicides, Sofia Coppola confirme avec l'un de mes grands coups de coeur, qui m'a fait découvrir cinématographiquement la péninsule japonaise avec Battle Royale et les films de Takeshi Kitano. Plus encore que son précédent essai, la réalisatrice nous fait échouer sur une terra incognita (pour les protagonistes), en filmant leur ennui et leurs flâneries avec une délicatesse exquise. La base de l'histoire est toute simple, nous racontant les pérégrinations de deux américains, l'un est une star de cinéma venu faire des pubs, l'autre est une étudiante fraîchement débarquée de l'Université accompagnant son mari photographe, deux individus de génération différente échoués sur cette planète à la fois proche par ses accointances occidentales, et lointaine pour sa culture profondément différente en creusant un peu. Mais faut dire que Sofia Coppola filme l'ennui et l'attente comme personne, tel un désir non consommé.

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Sorte de rêve éveillé dont on aimerait ne pas se réveiller, ce film fonctionne d'abord grâce à la collaboration de ses deux acteurs. Scarlett Johansson (comme le fut Kirten Dunst), a rarement été aussi troublante et sensuelle à l'écran, sans jamais être vulgaire. Elle se révèle déjà comme un dépaysement en soi, un fantasme. Elle incarne aussi cette jeunesse fraîche et un peu paumée, qui cherche encore qui elle voudra être et ce qu'elle voudra faire. Ensuite, Bill Muray est génial dans la peau de cet acteur doucement dépassé par les évènements et désabusé, doté d'une incomparable classe, et d'un humour pince-sans-rire, et nous régale ainsi de ses petits démêlés avec son environnement (par exemple, le coup de la douche trop basse pour lui, les échanges incompréhensibles avec le personnel de l'hôtel, et surtout les passages décalés avec la télévision). Comme dans In the Mood for Love, on ressort transi de leur expérience commune qu'on peut qualifier de spirituelle et surtout de sensorielle. A l'instar de ce dernier, une potentielle Love story naît entre-eux, qui ne restera qu'à l'état de promesse, comme un amour platonique ou filial. Cette manière de les filmer avec tendresse aide beaucoup à ce que ce duo tout à fait charmant mais atypique fonctionne à l'écran.

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Au début, ils demeurent à l'hôtel, sans rien faire de spécial. Or, j'aime beaucoup cette façon de filmer l'immobilisme des personnages qui atteignent une sorte de grâce avec des "petits rien", et nous entraînent également vers un "ailleurs". Le personnage de Scarlett (Charlotte), résistant à l'appel du bouillonnement sensoriel de son nouveau milieu, et celui de Bill (Bob), lui aussi dans l'attente que quelque chose "d'intéressant" se passe tandis qu'il s'ennuie "tranquillement" avec des passe-temps où le banal et l'insolite se rencontrent. A signaler que la musique joue encore un rôle primordial, My Bloody Valentine devenant le groupe dominant pour nous faire planer, et nous donner de bonnes vibes, avec des airs romantiques et impressionnistes. Ils découvrent par la suite qu'il est plus facile, à deux, de s'évader de leur bulle (prison ?) dorée. Bob et Charlotte vont alors se perdre dans Tokyo, et gratter ce qui se passe sous sa surface, sa culture underground, en des endroits attractifs et décalés, composés d'individus qui ne le sont pas moins (bars, karaoké, stands de jeux-vidéos, etc.). Cette ville est superbement filmée, et S. Coppola, cinéaste de l'instant, sait très bien capturer les petits détails qui font la beauté d'une scène.

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Au final, ce film est une expérience qui parlera de façon différente à chacun. A la fois sensoriel et existentiel, il nous touche au plus profond de nous-mêmes. Car au-delà de la ballade exotique, tout comme dans son premier film, Sofia Coppola ré-interroge notre structure familiale, nos existences qui semblent fonctionner sans qu'on les remette en question, comme celle de Charlotte, qui n'est qu'à ses prémisses avec son mari et sa nouvelle vie, et désapprend d'elle-même, et celle de Bob qui connait un coup de mou dans sa carrière et n'a plus de connexion sincère avec sa famille, surtout sa femme qui se borne à discuter de choses parfaitement banales, superficielles, et inintéressantes (la couleur ou la forme du mobilier). Peu de dialogues ponctuent ce film (qui s'exprime surtout en images, silences et regards), et chacun y trouve sa place à la perfection, traduisant un décalage avec la réalité (la non-traduction de certaines phrases renforce par ailleurs ce point), ou au contraire une perception lucide de cette dernière (le magnifique échange entre les deux protagonistes qui nous parlent d'eux de façon plus verbalisée, mais ils ont déjà tout dit d'eux-mêmes par leur attitude ...).

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Un film planant, sensuel, dépaysant, spirituel, sur deux êtres aux antipodes, qui s'ennuient, se trouvent, et se retrouvent eux-mêmes dans un pays où tout est à la fois pareil et différent. Un magnifique essai sur la solitude et l'ennui, transcendé par la caméra "caressante" de Sofia Coppola, une musique aérienne, et des acteurs au top.
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Re: [Dunandan] Mes critiques en 2013

Messagepar osorojo » Mer 04 Sep 2013, 21:14

Bien chouettes tes deux dernières critiques Dun' :super:

Tu me donnerais presque envie de me faire un petit cycle ! :mrgreen:
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Re: [Dunandan] Mes critiques en 2013

Messagepar Mark Chopper » Mer 04 Sep 2013, 21:17

C'est après que sa filmo se gâte :mrgreen:
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Re: [Dunandan] Mes critiques en 2013

Messagepar Dunandan » Mer 04 Sep 2013, 21:31

osorojo a écrit:Bien chouettes tes deux dernières critiques Dun' :super:

Tu me donnerais presque envie de me faire un petit cycle ! :mrgreen:

Merci ça fait plaisir :wink:

Pour ma part, un cycle est déjà en cours :mrgreen:.

@ Mark : jusqu'à Marie-Antoinette j'apprécie encore son travail (selon mes souvenirs) :oops:, mais je n'ai pas vu ses autres films, qui m'ont l'air considérablement moins intéressants. M'enfin, en bon complétiste je vais aller jusqu'au bout ^^.

Edit : je viens de lire la critique de Zack sur LIT qui est juste :shock: (bon, vieille de 7 ans ...)
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Re: [Dunandan] Mes critiques en 2013

Messagepar Velvet » Jeu 05 Sep 2013, 08:08

Bien sympathiques les critiques sur les deux premiers films de la Miss Coppola. :super:
Moi j'aime bien le Marie Antoinette. :D
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Marie-Antoinette - 7,75/10

Messagepar Dunandan » Jeu 05 Sep 2013, 18:58

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Marie-Antoinette, Sofia Coppola (2006)

Un film de Sofia Coppola qui divise forcément. Elle surprend non seulement son public en faisant une échappée historique, et met aussi à dos la manière classique de faire de l'histoire au cinéma. Et pourtant, il s'agit d'un sujet en or pour la réalisatrice qui s'approprie entièrement le personnage de Marie-Antoinette, pour traiter une fois de plus une jeunesse désoeuvrée d'un milieu favorisé, en abolissant les frontières spatio-temporelles, car ses soucis semblent bien être de ceux de notre époque. En effet, avant de faire de l'Histoire, dont elle reprend d'ailleurs les faits très librement pour les adapter à son sujet, elle réalise un portrait d'une adolescence devenue femme par la force des choses. Une première, car si l'intrigue fonctionnait autour d'une famille ou d'un duo (composantes qui n'ont pas disparu pour autant, mais sont en toile de fond), cette fois-ci elle se déroule autour de ce destin d'une future reine, trop jeune et inexpérimentée pour régner aux côtés de son époux qui ne l'est pas moins.

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Or, Sofia Coppola reproduit parfaitement le faste et le cadre superficiel de cette vie de palais, complètement coupés du "bas-peuple" (réduit à des rumeurs ou des brouhahas). Après une brillante exposition du douloureux passage à l'âge adulte (un changement de patrie et de famille qui sonne comme la fin d'une belle époque), l'intrigue se réduit à rien : la reine doit enfanter l'héritier de la couronne. Entre-temps, se déroule la morne répétition de l'étiquette qui poursuit les deux époux jusqu'à leur lit conjugal (!). Or, cette image colorée de la vie de palais, assez respectueuse de l'Histoire, permet surtout de reprendre la thématique de la réalisatrice. A l'instar de Virgin Suicides, celle d'une adolescence désillusionnée par la rigidité des codes de bonne tenue (dont l'excès est tourné en ridicule), frein à son expansion vitale. La façon de respecter ces conventions prennent tant de place qu'elle devient sujets de ragots, au point de remplacer la politique (presque absente du film). Autre réussite, le casting. Kirten Dunst est brillante dans la peau de Marie-Antoinette, qu'on croirait échappée d'un magazine de mode, glamour et juvénile. En contre-point Jason Schwartzman incarne un très bon Louis XVI, distant et un peu gauche. Un couple qui semble à mille lieux de comprendre ce qui se passe en-dehors de leur bulle pas si dorée.

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Ce qui m'a légèrement gêné par contre, c'est le rythme du film, dû je pense à sa structure narrative. Car la réalisatrice reproduit finalement la même façon de raconter ses histoires, avec peu de transitions et sans trop de repères (notamment sur l'évolution des personnages), ce qui est peu commun dans le genre historique. Ainsi, une chose que je n'avais pas ressenti dans ses essais précédents, c'est l'ennui qui pointe parfois son nez. Il manque peut-être un peu plus d'enjeux pour relever la sauce, même si je conviens que la redondance des scènes (le lever de la Dauphine auprès de la suite, le repas, la chasse, le choix des vêtements ...) révèle également le vacuum quotidien, constitué d'individus désincarnés et inintéressants, et surtout qui ne savent pas s'amuser (seul le Roi sénior semble se fendre la poire, mais bon c'est le Roi). Une longue introduction nécessaire pour expliquer ensuite les frasques (qui ressemblent à celles de la Jet set) de la nouvelle Reine qui précipitent (en complicité avec le Roi qui sous-estime le peuple) le Royaume vers la ruine.

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A part ce petit bémol, la mise en scène est une fois de plus brillante. La principale nouveauté et pas des moindres, c'est le fait d'alterner classicisme avec des tableaux fixes de toute beauté à la Barry Lyndon, et ambiance pop avec des plans vifs. Un anachronisme formel qui rend l'histoire intemporelle. Ces séquences sont soutenues par des tonalités musicales très variées (rock'n roll, opéra, et musique classique), reflet du cadre de vie étriqué ou des humeurs virevoltantes de Marie-Antoinette, rebelle dans l'âme, et surtout, à l'écoute de sa fibre artistique juvénile qui n'attend qu'une occasion pour s'exprimer (par la coiffure, la mode, les fêtes, etc.). Certes, tout ne fonctionne pas, mais l'intention est ambitieuse et rafraîchissante, et nous donne les moyens de mieux comprendre cette femme de façon contrastée, irresponsable non par méchanceté mais pour fuir l'ennui et la solitude. Ainsi, loin d'être un modèle, on voit bien où sa propre condition l'amène, avec l'excellente référence à Rousseau sur l'état de nature : toute tentative, même innocente, de se rapprocher de la réalité, est vouée à l'échec. D'ailleurs, sa représentation naïve de la paysannerie qu'elle assimile ironiquement comme paradis, montre bien qu'elle est à côté de la plaque (une image qui peut aussi se comprendre comme nostalgie re-fabriquée d'une jeunesse trop vite condamnée).

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Ce film ne laissera pas indifférent, de par son statut hybride. Amoureux de la vérité historique, passez votre chemin, ce n'est pas son propos. Tout ce qui intéresse Sofia Coppola dans Versailles, ce sont ses formes chatoyantes et superficielles, prétexte à dérouler une imagerie de la jeunesse éternelle qui se prête au fantasme et aux désillusions. Et Marie-Antoinette devient sa nouvelle égérie, symbole parfait de cette réalité fantaisiste, lui permettant de mettre en scène son mélange sucré et pop acidulé qui donne un peu le tournis. L'une des grandes réussites du film, c'est donc son esthétique, dépeignant à merveille la vacuité des conventions sociales d'un tel milieu, où tout est une affaire d'apparence et donc de regard, non sans une petite dose d'humour. Une seule réponse au vide : un divertissement qui frise l'insolence. Non moins vain et illusoire, mais peut-être nécessaire pour garder ses sensations et sa santé mentale intactes, du moins jusqu'à ce que le vent de l'histoire apporte une maturité balayant le superflu.

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Détournant les codes du genre historique tout en lui étant respectueux dans les grandes lignes, Sofia Coppola signe un film intemporel sur la jeunesse qui va et s'en vient, à travers un portrait féminin touchant et intimiste, à la fois rock'n roll et solennel, qui n'évite malheureusement pas certaines longueurs.
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Re: [Dunandan] Mes critiques en 2013

Messagepar Val » Jeu 05 Sep 2013, 21:04

Je me rappel avoir trouvé ce film absolument navrant. C'est un peu tout ce que je déteste.

D'ailleurs, le vrai film a faire est, selon moi, sur Louis XVI, personnage bien plus intéressant car constamment déphasé malgré sa bonne volonté. Un peu trop "moderne" dans ses réformes (l'égalité dans les impôts !), meurtri par la mort de son fils et héritier qui l'empêchera de saisir ce qui est train de se jouer lors des Etats Généraux, trop attaché aux traditions et à la religion, ce qui le conduira a commettre l'erreur de la fuite à Varennes et surtout complètement isolé et moqué par tous, ne trouvant pas auprès de sa femme les conseils ou le soutient qu'il aurait dû (trop occupée à le ridiculiser en se faisant sauter par toute la cour).

Un personnage plein de contradictions et donc forcément très intéressant.
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