[Nulladies] Mes critiques en 2016

Modérateur: Dunandan

Cible (La) - 8/10

Messagepar Nulladies » Mer 13 Jan 2016, 06:36

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American Horror Glory.

Targets fait partie de ces films qui instaurent d’emblée une ambiance poisseuse comme seule l’Amérique sait en générer : terre des fantasmes, du trop-plein et de l’iconicité, paysage cinématographique par excellence, ayant su y créer sa mythologie du présent, le Nouveau Monde est le règne de l’ambivalence.
C’est sur cette problématique du regard que Peter Bogdanovich (qu’on a connu bien plus léger dans le chef d’œuvre La Barbe à Papa ou la récente friandise Broadway Therapy) fait ses armes, avec un budget dérisoire et des contraintes dont il va faire sa force.
Targets ménage deux récits parallèles : celui d’une star vieillissante devisant sur ce lieu commun des gouffres entre l’apparat et la réalité, et le parcours d’un bon fils de famille, sorte de clone inquiétant de Matt Damon, s’initiant au rôle de sniper fou, posture désormais tristement connue aux Etats-Unis.
La démonstration se fait sans ambages (au risque d’une certaine saturation) : les écrans sont partout, les médias omniprésents, voix-off de la radio, téléviseurs, cinéma, talk show ; ce qui reste du réel est une famille trop parfaite pour être honnête, et qu’on sacrifiera, et à l’autre bout du spectre, un petit monde occupé à alimenter cette illusion dans la grande usine à rêve hollywoodienne.
L’atmosphère noire renvoie à des petites pépites brutes comme The Offence de Lumet ou That Cold Day in the Park d’Altman, premiers échos du Nouvel Hollywood, où l’on décape le vernis pour y fouiller dans les zones d’ombre.
Si les parties dévolues à l’acteur vieillissant peuvent sembler un peu longues, la progression vers la folie du sniper occasionne une traversée du paysage urbain superbement cadrée. A l’intimité retorse du massacre familial succède une séquence de tirs hasardeux depuis un réservoir sur la freeway qui cite explicitement l’un des grands films ayant fait basculer Hollywood vers sa nouvelle ère : le documentaire de Zapruder sur l’assassinat de JFK.
Le final, lui aussi un brin didactique dans sa mise en abyme, répond à l’ouverture qui se faisait sur la fin d’une projection : il s’agit désormais de projeter un film dans un drive-in, et de faire venir le comédien qui sera donc à la fois à l’écran et parmi les spectateurs, dont on commence par établir une sorte de panorama sociologique. Les identifier, c’est aussi l’occasion pour le tireur de définir ses cibles, crevant au sens propre du terme l’écran pour faire advenir l’horreur dans le réel. Bogdanovich le souligne à plusieurs reprises, l’horreur baroque des films de série Z est bien plus séduisante que celle des faits divers dans cette société qui engendre des monstres.
Le montage, de plus en plus rapide, alterne jusqu’au vertige les allées et venues entre les deux mondes, le virtuel et le réel, jusqu’aux décharges sacrificielles.
Au-delà de la thèse et du jeu de massacre, c’est par son épilogue que Targets marque : de la même façon qu’il insistait jusqu’au malaise sur la façade trop brillante de la famille américaine, ce plan final sur le parking déserté du Drive-in est à lui seul une démonstration frappante de l’inconscience avec laquelle le monde se déshumanise : par le vide.
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Mistress America - 7/10

Messagepar Nulladies » Ven 15 Jan 2016, 06:39

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Puisque ces mystères nous dépassent, feignons d'en être l'organisateur.

On commence à bien connaitre l’univers de Baumbach, qui depuis Les Berkman se séparent, et surtout le succès de Frances Ha en 2013, promène avec constance son regard sur les adultes qui ne savent pas encore l’être. Cette comédie new-yorkaise, entre légèreté et air du temps, renvoie forcément à l’illustre ainé Woody Allen, et comme pour lui, mais de façon prématurée, on peut craindre les signes d’un certain ronronnement. C’est d’autant plus vrai que Mistress America explore les mêmes terres que le très récent While We’re Young, à savoir la confrontation de deux âges différents, ici une trentenaire excentrique (Greta Gerwig, parfaite dans un registre plus vivace que dans Frances Ha) et une étudiante de 18 ans qui s’apprête à devenir sa demi-sœur à l’occasion d’un remariage.
L’intrigue importe peu, et les personnages le revendiquent. La jeune apprentie écrivain voit dans sa nouvelle amie une muse, une créature de fiction dont elle s’empare immédiatement, et leur errance est l’occasion d’un portrait qui fait la part belle à l’oisiveté névrotique. On commence par ne rien comprendre à ce personnage contradictoire, saturé d’initiatives et de projets, multicarte et devisant sur la vie sans vraiment la connaitre. Le duo féminin fonctionne parfaitement et va entrainer à sa suite une sorte de communauté de fortune déboulant dans une riche demeure des environs de New York, en quête d’un financement pour le projet du moment.
C’est là que se concentre toute l’écriture de Baumbach qui évite ici l’essoufflement patent de son précédent essai. Il s’agit avant tout de restituer un souffle, une rapidité des échanges dont la dynamique formelle importe davantage que le contenu. Toujours à la lisière de l’absurde (qu’on pense à ce personnage de femme enceinte attendant son mari, et intervenant sans cesse et mal à propos), le comique est une mécanique parfaite huilée qui doit beaucoup à l’écriture dramaturgique. Le cinéaste investit l’espace et dissémine sa petite troupe avec une précision d’horloger, dynamite tout temps mort dans cette valse où chaque personnage parvient à exister en dépit d’un temps de parole fragmenté. On pense aux portes qui claquent dans le dernier Bogdanovich, Broadway Therapy, voire à la folle énergie de La Règle du Jeu. Baumbach réussit là où Rappeneau s’enlisait malgré lui dans Belles-Familles : ce n’est pas tant la légèreté que la dérision qui l’emporte, et la vivacité de ces personnages insolite provient surtout de leur décalage avec les enjeux traditionnels de la comédie. Ce qui l’emporte, c’est ce débit vocal (lui aussi emprunté aux meilleures performances de Woody Allen) où les piques fusent, ridiculisant autant les interlocuteurs que la névrosée qui les envoie. On n’est certes pas au niveau du screwball d’un Lubitsch, mais justement parce que dans cette ambiance mi hipster, mi post-moderne, les personnages ont pris conscience de leur manque de sérieux. Dans ce joyeux massacre, c’est l’élan qui prime, et le cinéaste parvient sans difficulté à entrainer le spectateur dans cette valse pétillante.
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Grizzly Man - 9/10

Messagepar Nulladies » Ven 15 Jan 2016, 06:41

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Into the child

Posons le contexte de ce documentaire : il restitue la vie de Timothy Treadwell, un écolo passionné qui passa 13 étés en compagnie des grizzlis d’Alaska, les fréquentant au mépris de toute prudence, et se filmant en permanence, jusqu’à sa mort, dévoré vivant avec sa compagne par l’un d’entre eux.

Werner Herzog, qu’on peut considérer comme un expert en matière de clivage mental, s’empare des centaines d’heures de rushes de l’énergumène et tente d’en brosser un portrait.

Le résultat est tout simplement incroyable.
Au-delà des images, déjà impressionnantes, des ours dans leur habitat naturel, et de la compagnie fidèles de quelques renards, l’animal qui va le plus attirer l’attention est sans conteste Treadwell. Ses confessions à la caméra donnent l’occasion rare de faire face à la folie dans toute sa splendeur Treadwell peut être considéré comme une version radicale et encore plus barrée de Christopher McCandless, le protagoniste d’Into the Wild. On abandonne ici tout lyrisme panthéiste au profit d’une immersion dans un délire d’une prolixité rare. Treadwell hait les hommes au point de souhaiter devenir un ours, leur parlant non pas tant pour les humaniser (ce qu’il fait, de façon aussi pathétique qu’insensée) que pour intégrer leur communauté. Avec tout ce que l’Américain névropathe peut avoir d’hystérique, à grands renforts de « I love you » et d’anthropomorphisme immature, le documentariste est un enfant, idéalisant un monde pour mieux fuir celui dans lequel il est inadapté.

A mesure que les bandes défilent, la personnalité démente du personnage prend toute la place : ses confessions, sa paranoïa contre les braconniers, ses impressionnants décrochages haineux à l’encontre des gardes de la réserve naturelle (dont les restrictions semblent cependant tout ce qu’il y a de plus raisonnable), tout concourt à un portrait hors-norme. On peut s’étonner de la position d’Herzog à l’égard de son sujet, ne prenant ses distances qu’à deux reprises, alors qu’on ne peut qu’être d’emblée saisi par sa folie.
Il faut bien entendu un égo surdimensionné pour tenir dans de telles circonstances : Treadwell ne cesse de rappeler qu’il brave la mort, qu’il est le seul à protéger les ours (ce qui est totalement illusoire) et qu’il comprend ce monde comme personne.
Ce qui passionne en outre Herzog est la posture du documentariste, métier qui occupe désormais toute sa carrière : la façon dont il dissèque la mise en scène de ce cinéma prétendu de vérité occasionne des séquences passionnantes. Obsession de Treadwell pour faire croire qu’il est seul quand ce n’est pas toujours le cas, nombreuses reprises de ses monologues, dérapages, découragement face aux intempéries, le personnage est scruté par Herzog qui fait un travail de montage remarquable. Alternant avec quelques témoignages de proches (la plupart au diapason de la démence du bonhomme, surtout les femmes), il ménage une dynamique démonstrative redoutable, dévoilant progressivement ses différentes facettes, de plus en plus inquiétantes.

La fascination du réalisateur s’explique facilement : il le dit lui-même, cet échange parfois violent avec la caméra le renvoie à ses propres expériences, à la différence près qu’il s’écharpait avec un comédien quand Treadwell joue sur les deux pôles. Le documentaire encadrant (celui d’Herzog) prend alors un sens salvateur : il a non seulement décrypté le travail de son collègue, en a révélé les limites, rendant au passage hommage à son courage inconscient, mais il a surtout permis d’accéder à une nouvelle vérité : celle de l’indifférence des animaux et de l’hostilité de la Nature.

Un documentaire absolument indispensable.
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Summer Wars - 6,5/10

Messagepar Nulladies » Dim 17 Jan 2016, 09:32

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Hosoda : le grand mix.

Avant la maturité mélancolique des Enfants loups, Mamoru Hosoda réalisait Summer Wars, un long métrage certes plus ambitieux sur les plans narratifs et visuels, mais finalement bien ancré dans une tradition dont il peine par instant à se démarquer.
Le récit suit une famille concernée de très près par l’attaque d’un gigantesque réseau social, sorte de fb nippon nommé Oz, vérolé par une A.I. bien décidée à détruire le monde.
La mise en place est assez longue, et occasionne une présentation de la famille dans laquelle on retrouve le folklore japonais traditionnel : humour assez limité, sentiments exacerbés (l’adolescence, les amourettes, les jalousies) et valorisation du clan autour d’une arrière-grand-mère représentant la sagesse séculaire auprès de laquelle on puisera les enseignements pour affronter ce nouveau monde numérique, qui finalement obéit aux mêmes lois qu’aux temps des glorieux ancêtres (et pour preuve, on nous cite même des répliques des 7 samouraïs…)
L’intrigue à proprement parler n’a rien de révolutionnaire : chaque personnage du monde réel a son propre avatar dans le virtuel, et va devoir joindre ses forces pour lutter contre l’IA, programme militaire américain qui tourne mal (et occasion, au débotté, de régler quelques comptes avec l’ancien rival.)
C’est dans Oz que le programme prend un peu de saveur. Jeu sur les proportions et la distribution spatiale, le monde épouse les formes imaginaires d’un OS, à la fois simpliste dans son interface (les avatars sont les mignonnes créatures comme il en existe tant dans le folklore vidéo-ludique nippon) et ambitieux dans ses potentiels, construit sur le principe de la circularité et des îlots. Plus le film avance, plus les incursions dans le monde prennent de la place : le contraste avec le monde réel, assez fade, est salvateur, et le déluge visuel occasionné par les différents combats (de carte, d’affrontement physique) rend l’ensemble plutôt divertissant.
Le scénario reste cependant lourdement convenu, et ce n’est pas la série de « rebondissements » (« on a gagné, ouais ! …mais… que se passe-t-il ? oh non en fait on pas encore gagné ! ») qui le délestera de ses maladresses.
Summer Wars est un film touche à tout, qui saupoudre un talent évident sur des domaines un peu trop hétéroclites. La suite de la carrière d’Hosoda confirmera, avec Les enfants loups et Le Garçon et la bête, que la modestie d’un angle précis, traité avec maturité, initie des œuvres bien plus fertiles.
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Garçon et la Bête (Le) - 8,5/10

Messagepar Nulladies » Dim 17 Jan 2016, 09:35

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Les fils sans homme

L’argument principal du Garçon et la Bête n’avait rien de surprenant, après la belle réflexion proposée par Les enfants loups : Hosoda approfondit le lien entre humains et animaux, les délaissant du père, dans la perspective d’en définir les singularités.
La cohabitation secrète de deux mondes est un lieu commun dans les contes : l’incursion du jeune garçon dans l’univers animal rappelle en cela la magie de Chihiro, après une séquence d’ouverture flamboyante dans tous les sens du terme, et les différences d’époque entre les deux évoquent l’une des pistes intéressantes de Lastman.
Mais à la différence de ses précédents opus, le temps que prend l’animateur est surtout dévolu à asseoir la relation entre le jeune garçon et son maitre, un ours rustre condamné à avoir un disciple pour pouvoir concourir à la succession au pouvoir.
C’est là le cœur du film : la relation tumultueuse entre les deux générations, trop semblables pour cohabiter en harmonie. Autodidactes, esseulés, gueulards, les deux fortes têtes instaurent un manège de décibels et de course poursuite d’un comique irrésistible, où la force dont on fait la quête se situe au départ dans la capacité qu’on a à répliquer avec insolence ou rabrouer brutalement.
L’initiation est bien entendu semée d’embûches : comme dans Dragons, mais avec bien plus de subtilité encore, il s’agit d’apprendre à enseigner, ou à devenir un élève humble, s’entraider dans cette hostile odyssée qu’est la vie sociale. Avec une infinie délicatesse, Hosoda trace les lignes de la maladresse ou esquisse la danse de l’imitation, dans une séquence magnifique où le garçon reproduit en cachette chaque geste de la bête pour tenter de lui ressembler.
Le monde dans lequel évoluent Ren et Kumatetsu est en outre peuplé d’êtres secondaires d’une rare pertinence narrative : les deux « sages », le singe et le cochon-bonze, commentant leurs débuts difficiles, le seigneur de la ville, un lapin facétieux, et la famille rivale candidate au pouvoir permettent la distillation d’une philosophie qui évite tous les pièges du didactisme. Au fil de l’intinitation, et notamment d’un court voyage auprès des grands sages du royaume, l’animation déploie des talents bigarrés, alternant entre une peinture traditionnelle et des séquences à l’animation très sophistiquée, de combats, de traversée d’une foule animale à hauteur d’enfant, ou d’attaque de baleine de pluie .
Cette simple quête de la maitrise de l’énergie jusqu’au combat final se suffirait à elle-même. Mais Hosoda n’a pas écrit l’histoire d’une fuite, et fait revenir Ren dans le monde des humains pour une série de va et viens qui va complexifier son apprentissage, entre paternité, amour et ouverture à l’apprentissage humain, c’est-à-dire intellectuel.
Sur sa dernière tranche, le film ajoute une dernière exploration de la part d’ombre inhérente aux hommes, la haine et le ressentiment, faisant intervenir un antagoniste dans une surenchère qui n’était pas forcément indispensable, et rappelle la difficulté qu’il avait à terminer l’ambitieux Summer Wars. Si l’animation est superbe, investissant le cœur piéton de Tokyo, les circonvolutions du scénario dérivant vers le manga pourraient faire oublier les sommets précédents, humbles et bouleversants que les personnages avaient atteints lors du combat tant attendu. Mais cela reste un détail.

La maturité a du bon. A 48 ans, Mamoru Hosoda réalise son chef-d’œuvre, et le regard sur la progression patiente de ses précédents films laisse présager de la suite dans son talent.
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A peine j'ouvre les yeux - 6,5/10

Messagepar Nulladies » Mar 19 Jan 2016, 06:39

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Chantons sans appuis

Les portraits de femmes contraintes dans leur épanouissement sous le joug d’une société phallocrate et influencée par l’Islam fleurissent ces dernières années. Après la saoudienne Wadjda et son vélo, les sœurs turques de Mustang et le match de foot, les prostituées marocaines de Much Loved, place à la jeune Farah, tunisienne désirant chanter sans censurer ses paroles contestataires, à la manière des Chats Persans.
Situé avant le printemps arabe, à l’été 2010, le récit prend le pari d’adopter le point de vue de sa protagoniste, ainsi que celui de son groupe : la jeunesse est fougueuse, semble assez libre de ses mouvements, et l’on se prend à croire avec elle à cet état de fait. Certes, les regards de l’ancienne génération se crispent dans les cafés pour hommes, et quelques avertissements parentaux auquel on n’accorde pas trop de crédit viennent ponctuer les soirées, la boisson et les joints sur la plage.
Surtout, la musique aide à l’expression d’une énergie irrépressible. Les morceaux combinent avec talent folklore oriental et rock, sur une dynamique de la langueur et de l’explosion, emportant avec eux un public qui laisse alors parler son corps.
Leyla Bouzid suit son héroïne, electron qui se croit libre, et qui dévoile uns à uns les verrous autour de son parcours. Avant que la police politique ne sorte de ses planques, c’est le rapport à la mère qui cristallise les tensions. A la fois complice et rivales, les femmes sont le centre de toutes les attentions, dans ces intérieurs où tout se dit, mais où l’on étouffe simultanément. De la grand-mère matriarche qui décide des études de Farah à sa mère qui tente de la protéger contre elle-même, en passant par la jeune femme de ménage qui partage ses aspirations à la liberté, le gynécée en ébullition raconte une autre vérité du pays, celle que les hommes, presque absents, font tout pour museler.
La caméra, furtive, investit l’espace avec fluidité et contribue à ces élans du personnage : accompagnant ses déplacements dans les divers lieux clos (garage de répétition, appartement) ou durant les performances musicales, elle restitue avec force l’énergie de la jeunesse.
La perte des illusions n’en sera que plus ravageuse : rappel à l’ordre venu de toutes parts (le petit ami, le groupe, l’indic, la mère), les cloisons se referment brutalement autour de Farah. L’intelligence de Leyla Bouzid est de ménager des voies de traverses et un espoir infime reposant sur l’ouverture fondée sur l’échange : en ménageant la possibilité d’un échange entre les générations, le retour du père et la maturité, certes blessée, de la jeune fille, elle infuse dans le brûlot libertaire une solidarité humaniste face à l’adversité, entrainant plus d’un spectateur à sa suite.
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Victoria - 6,5/10

Messagepar Nulladies » Mar 19 Jan 2016, 06:41

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Panic in the moonlight

Ce serait évidemment une erreur que de réduire ce film à son principal argument de vente, à savoir qu’il est constitué d’un unique plan séquence de deux heures et quart. Si l’on s’en tenait à cette seule dimension technique, on le saluerait comme un chef d’œuvre. Car la prouesse est réelle, et on a beau vouloir se concentrer sur ses autres qualités (et défauts, bien entendu), le mouvement continu de sa narration ininterrompue constitue un élément inévitable, qui alimente la tension qu’un récit assez pauvre, convenons-en, veut générer.
Victoria fait partie de ces films qu’on devrait voir sans rien en savoir, pour l’apprécier à sa juste valeur et sans s’accrocher à sa clinquante déclaration d’intention. La première séquence, floue avant une mise au point progressive sur la protagoniste fonctionne sur le même principe que celle qui ouvrait Le fils de Saul : elle exhibe clairement son dispositif, et cette déclaration un peu frimeuse peut éblouir autant que rendre prudent quant à sa capacité à se transformer en cache-misère.
La première partie sait pourtant allier avec talent forme et fond : ce poursuite continue dans une after de jeunes écervelés épouse à merveille leur errance dilettante, et le trajet à vélo flirte un moment avec la poésie mélancolique d’Oslo, 31 aout. Le rapprochement des deux protagonistes, sur le mode rom com, est lui aussi plutôt convaincant dans son authenticité et par l’audace avec laquelle il s’empare du temps réel : instant suspendu, durée sacrée dans la nuit, il rapproche les êtres rendus complices par cette faille temporelle.
Mais cela ne suffit pas à Sebastien Schipper, qui avoue d’autres ambitions : quitte à faire un film, autant tout y mettre, et la première fait en réalité office d’introduction à un thriller sur le mode Braquo ou 24 heures. Bien entendu, son parti pris technique est en cohérence avec un tel traitement, modifiant le rythme pour lui donner des allures de course folle, en voiture, sous les balles ou dans le sang. Le fait d’avoir fait intimement connaissance avec les personnages donne d’ailleurs un certain crédit à leur chute, même s’il faut s’armer d’une grande tolérance pour accepter la stupidité de chacun de leur choix. On pourra mettre ça sur le compte de la drogue qu’il consomme, et qui elle-même influera sur la frénésie du film, avec un retour dans la boite initiale qui donne une illusion de victoire assez intéressante, parce qu’on la sait bien entendu éphémère.
La bêtise de la jeunesse et les conduites ordaliques n’excusent cependant pas tout. Alors qu’on était embarqués depuis le début, et que tout le principe du film consiste à faire tenir ce filon d’une ligne étirée à l’excès, les grossières ficelles accrochées à la rescousse brisent l’illusion initiale. Le braquage en hors champ est une idée intéressante, mais la course mortelle sur le mode des amants criminels à la fois poussive et lassante, multipliant les traquenards et les méthodes à l’américaine pour s’en sortir.

La prouesse reste entière : comme devant un spectacle live ou un numéro de cirque, la tension de la performance infuse clairement le projet. Elle ne suffit pas à ce qu’on s’aveugle devant ses manquements et ses facilités, mais nourrit une expérience méritante.
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De battre mon coeur s'est arrêté - 4/10

Messagepar Nulladies » Mer 20 Jan 2016, 06:36

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La rédemption pour les nuls.

Le sujet est porteur, les éléments convoqués plutôt fertiles. Pour son quatrième film, Jacques Audiard monte d’un cran un certain nombre de ses ambitions : un comédien alors incontournable (Romain Duris, fidèle à lui-même dans son registre intense et brut de décoffrage, pseudo naturaliste) un même terreau criminel, une forte dose de dénonciation et une thématique de la rédemption par les vertus toutes intellectuelles de la musique classique.
Présentés de cette manière, la condamnation pourrait être sans appel sur ce film dans lequel il reste pourtant des éléments à sauver ; les séances musicales compliquées par la barrière de la langue avec la répétitrice chinoise sont plutôt réussie, de même que la partition de Niels Arestrup est, comme à chaque fois, mémorable. L’atmosphère générale, dans cette urbanité décatie, servie par une photographie brute et un équilibre de la mise en scène qui sait ne pas trop en faire dans l’illusion du documentaire caméra à l’épaule, est elle aussi efficace.
Mais les maladresses restent légions. Audiard ne sait où donner de la tête tant il aborde de sujet simultanés : la dénonciation du cynisme des agents immobiliers, le sort des squatteurs, le rapport au père, aux femmes, au crime organisé… les épaules du protagoniste semblent bien fragiles pour supporter toutes la misère du monde, tout comme l’est la patience du spectateur de plus de quinze ans.
Voulant tout traiter, Audiard multiplie les raccourcis et le film perd en crédibilité : le parcours du personnage est une ligne droite vers la prise de conscience, des méchantes murges des capitalistes au musicien sensible qui sépare les bagarreurs, de fils soumis à l’adulte épanoui. C’est d’autant plus irritant qu’on sent clairement ce désir du réalisateur de ne pas rompre avec ce milieu qui le fascine tellement. Si Tom s’en affranchit, c’est pour mieux mettre en branle une mécanique tragique cousue de fil blanc où les criminels, de plus en plus dangereux, occasionneront de sa part une virilité à leur mesure : la scène ridicule avec Mélanie Laurent en témoigne, tout comme le final, déchainement dans une cage d’escalier qui nous fait penser que l’auteur de Dheepan a quelques fixations à régler s’il veut un jour évoluer vers un cinéma moins binaire.
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Aventuriers de l'Arche Perdue (Les) - 8/10

Messagepar Nulladies » Jeu 21 Jan 2016, 06:28

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Well done to the jungle

Les aventuriers de l’arche perdue : derrière ce seul titre se cache toute une dimension du cinéma de divertissement que Spielberg et sa clique vont mettre en place pour les décennies à venir. Après le carton des Dents de la Mer, le lyrisme philosophico mystique du 3ème type annonçant le futur classique E.T. et une tentative échaudée sur le registre de la comédie (1941), Spielberg s’attelle à ce qui va devenir un mythe.
L’ouverture en est un bon exemple : la façon dont le cadrage diffère l’identification du visage du héros éponyme est une signature qu’on retrouvera dans tous les épisodes à venir. Le chapeau, le fouet vont faire le reste, le tout dans un décor de carton-pâte qui préfigure à peu près tout ce que le jeu vidéo va exploiter par la suite : des parcours semés d’embuches, une luxuriance exotique et une course euphorique… sans oublier le score mythique de John Williams, indissociable du personnage.
Indiana Jones pourrait se voir comme une nouvelle déclinaison du héros qui depuis plusieurs années fait déjà la loi sur le box-office : James Bond. Même invincibilité, même talent hors-norme, identique façon de sillonner le globe en enchaînant les cascades. Mais c’est dans ses distinctions que se définit l’enthousiasme sémillant du jeune Spielberg : son personnage est doté d’importantes composantes comiques, dont la dérision et l’aspect chien fou qui lui donnent un charme instantané. Dans des aventures assez proches de celles de Tintin, l’ennemi local grouille, on se cache dans des jarres, on est à la merci d’un singe espion et l’on découvre des secrets ancestraux. L’archéologue déboule la plupart du temps comme une boule de bowling en passe de faire un strike, y compris avec tout le mobilier qui aurait le tort de se trouver sur son parcours.
Le film est une ode au mouvement, convoquant les modèles d’Errol Flynn et les investissant d’une musculature volontairement moins fine, avec la même énergie que celle de Belmondo chez de Broca, empruntant cheval, avion ou camion et bastonnant avec enthousiasme un ennemi protéiforme, qui défile en attendant les coups.
Si le film a quelque peu vieilli dans sa gestion du rythme, occasionnant quelques légers temps morts, il occasionne de superbes scènes d’action dans des décors grandioses, et sait doser l’humour pour faire du personnage la synthèse parfaite de l’aventurier sortie des usines à rêves. Un mythe est né, et il a encore quelques belles années devant lui.
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Indiana Jones et le temple maudit - 7,5/10

Messagepar Nulladies » Ven 22 Jan 2016, 07:10

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Temple fun 2

Spielberg est désormais un maitre du nouvel essor pris par la jeune garde d’Hollywood, et peut à peu près tout se permettre. Les premières minutes de ce deuxième opus en attestent : c’est un grand gamin, féru de cinéma, qui est aux commandes.
Le divertissement de l’âge d’or et celui destiné aux enfants sont les deux grandes références de son ouverture : une splendide et clinquante séquence de comédie musicale, à la manière d’une ouverture opératique qui annoncerait les grands thèmes à venir, diffère une nouvelle fois l’identification du héros plus que jamais dans les traces de James Bond avec son costume blanc. S’en suit un cartoon électrisant, où une scène de panique collective occasionne un ping-pong entre diamant et antidote, méchants asiatiques criblant de balle des gongs, et pousse-pousse lancé à tombeau ouvert dans les rues de Hong-Kong, rafting chutant d’un avion pour traverser falaise, neige et rapides.
Ce rythme trépidant montre une envie folle d’en découdre et de briser toute possibilité de temps mort. C’est d’ailleurs à peu près ce qui se passera sur ce volet, sans que ce soit pour autant pour le meilleur. Toute la partie centrale dans le temple est joue sur une surenchère du dégoût, principalement destinée à faire hurler la femme, certes volontairement insupportable, mais insupportable tout de même, archétype des grandes gueules vides et choucroutées des 80’s. Insectes, animaux variés (il faut reconnaitre que la scène autour du feu de camp où elle croise l’intégralité de l’arche de Noé est assez drôle) banquet gore, cérémonies sacrificielles, tout y passe, et c’est davantage laid et poussif qu’émoustillant. Le mélange des genres n’opère pas forcément bien, et ce qu’on peut accepter avec joie dans Conan le Barbare fait ici un peu tâche, et l’on a hâte de passer à autre chose. De la même manière, les scènes de suspense à répétition confinent pour certaines à la lourdeur, que ce soit celle du plafond à piques qui redescend à plusieurs reprises, ou les allées et venues de l’héroïne dans sa cage au-dessus de la lave…
Au moment où l’on en viendrait à vraiment s’irriter, Spielberg reprend pourtant la barre : c’est, en écho à la frénésie du début, une course d’anthologie en wagon dans une mine, où toute l’inventivité visuelle du cinéaste est exploitée : aiguillages, rafales de mitraillettes, inondation sont convoquées pour un quart d’heure de frénésie rythmique. Cerise sur le gâteau, le récit nous gratifie d’une splendide séquence sur une passerelle, pour un retour en extérieurs jouant sur les dimensions les plus extrêmes.
Qu’on s’en tienne à ses deux extrémités, et l’on y verra une réussite digne de la saga, à qui on pardonne volontiers quelques errances poussives.
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Re: [Nulladies] Mes critiques en 2016

Messagepar osorojo » Ven 22 Jan 2016, 09:19

Les Indy, pour moi, sont les maîtres étalons du film d'aventure familial faits pour plaire à TOUTE la famille, même les parents. On n'en fait plus des films comme ça :bluespit:

J'attends ta critique du 4 du coup, une bonne séance en perspective, prépare les binouzes et les Chamallow, sinon tu vas subir :mrgreen:
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Indiana Jones et la dernière croisade - 8,5/10

Messagepar Nulladies » Sam 23 Jan 2016, 06:54

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Récré Graal

Puisque l’exposition d’Indy est désormais une franchise, autant jouer avec les attendus. L’ouverture de La Dernière Croisade est ainsi un bel exemple de malice, piégeant le spectateur sur l’identité du personnage éponyme qui se révèle non pas l’archéologue pilleur de tombe, mais le justicier en herbe qui va vouloir restituer à qui de droit la précieuse relique exhumée.
Dans une folle poursuite séminale, les ingrédients fondateurs de la mythologie seront ainsi disséminés de wagons en wagons, sur un train lancé à vive allure, boite à merveilles dans l’univers du cirque occasionnant les trouvailles les plus folles, de la magie aux animaux ; après l’hommage à la comédie musicale du Temple Maudit, Spielberg paie son tribut à Chaplin et son inventivité légendaire, avant de lorgner du côté du western, notamment dans la rivalité d’un Harrison Ford parvenant, à dos de cheval, à contrer les tanks des nazis.
Pour l’instant, il s’agit donc de placer les accessoires fondamentaux de la figure : le fouet, le chapeau, la phobie des serpents et ce gimmick qu’on retrouve depuis L’Arche Perdue, à savoir que l’archéologue, en dépit de sa victoire, repart toujours les mains vides.
Ce troisième épisode renoue agréablement avec l’esprit du premier, oubliant les délires baroques du précédent pour se reconcentrer sur des thématiques plus archéologiques. Deux idées fondatrices viennent relancer la machine : la quête du Graal, de Venise au Moyen-Orient, en concurrence avec des nazis plus retors et motivés que jamais, et surtout l’irruption de la figure paternelle en la personne de Sean Connery. Le duo formé avec Jr. fonctionne à merveille, source d’un comique efficace et gratiné, qu’ils se partagent la même traitresse nazie ou proposent une certaine divergence dans les moyens à déployer pour éviter de nombreuses occasions de trépasser.
La dynamique habituelle n’est pas en reste, et c’est dans une alternance intelligente entre la tradition (cheval, bateau, hélices létales, balles et flammes) et la diversité (side-cars, zeppelin, chenilles de tank) que la jubilation se déploie. Des falaises autrichiennes aux autographes d’Adolf en personne, Indy marque l’histoire, jusqu’aux origines du Nouveau Testament. Enlevé, brillamment écrit, La dernière croisade est sans doute le meilleur épisode de la saga, et aurait dû tenir compte du premier terme de son titre pour s’achever sur un paroxysme.
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Messagepar Jack Spret » Sam 23 Jan 2016, 10:57

Content de voir que cet épisode à ses fans, il est souvent boudé :D
Cool ta petite rétro :super:


"- Ça vous dirait un petit échange dans la ruelle, derrière le bar ?
- Si c’est un échange de fluides corporels, je suis pas contre. Mais alors dans ce cas, tu passes devant."
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Re: [Nulladies] Mes critiques en 2016

Messagepar Dunandan » Sam 23 Jan 2016, 11:02

Je l'aime beaucoup aussi celui-là (le duo entre Connery et Ford fonctionne à merveille, la quête du Graal...), mais je le trouve quand même moins bien emballé que les deux premiers.
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Re: [Nulladies] Mes critiques en 2016

Messagepar Nulladies » Dim 24 Jan 2016, 06:48

Jack Spret a écrit:Content de voir que cet épisode à ses fans, il est souvent boudé :D
Cool ta petite rétro :super:


Merci, c'est cool d''avoir des enfants qui grandissent ! 8)

dunandan a écrit:Je l'aime beaucoup aussi celui-là (le duo entre Connery et Ford fonctionne à merveille, la quête du Graal...), mais je le trouve quand même moins bien emballé que les deux premiers.


Pour moi, c'est l’équilibre parfait : le premier n'a pas tout son rythme, le deuxième est un peu poussif par moments, là, tout est au poil !
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