[Mr Jack] Deux mille vingt-deux

Modérateur: Dunandan

[Mr Jack] Deux mille vingt-deux

Messagepar Mr Jack » Dim 02 Jan 2022, 20:16

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Films

Janvier (17)

Mon nom est personne (1973) de Tonino Valerii [TV, FR3] : 6.75/10
Monkey Business (1931) de Norman Z. McLeod [BR] : 8/10
Ben-Hur (1959) de William Wyler [TV, TCM] : 7/10
The Towering Inferno (1974) de John Guillermin [TV, TCM] : 7/10
The Big Short (2015) de Adam McKay [Prime] : 7.5/10
Don't look up (2021) de Adam McKay [Netflix] : 7.5/10
Mon Oncle (1958) de Jacques Tati [TV, Ciné+] : 8/10
Magnolia (1999) de Paul Thomas Anderson [Albanie] : 6/10
Liberal Arts (2012) de Josh Radnor [MyCanal] : 7/10
Playtime (1967) de Jacques Tati [TV, Ciné+] : 10/10
The End of the Tour (2015) de James Ponsoldt [Albanie] : 5.5/10
The Age of Innocence (1993) de Martin Scorsese [VOD, MyCanal] : 7.5/10
Scream (1996) de Wes Craven [Albanie] : 7.5/10
Scream 2 (1997) de Wes Craven [Albanie] : 6.5/10
Scream 3 (2000) de Wes Craven [Albanie] : 4/10
Scream 4 (2011) de Wes Craven [Albanie] : 6/10
Boite Noire de Yann Gozlan [Albanie] : 7.5/10

Février (15)

Bac Nord de Cédric Jimenez [Albanie] : 6/10
Made in France de Nicolas Boukhrief [OCS] : 5/10
Adieu les cons de Albert Dupontel [Canal+] : 8/10
Une intime conviction de Antoine Raimbault [Albanie] : 6.5/10
La fille au bracelet de Stéphane Demoustier [Ciné+] : 7/10
Police de Anne Fontaine [Ciné+] : 3/10
Horse feathers de Norman Z. McLeod [BR] : 7/10
Duck Soup de Leo McCarey [BR] : 7.5/10
Les étoiles vagabondes de Nekfeu & Syrine Boulanouar [Albanie] : 7.25/10
Le discours de Laurent Tirard [Canal+] : 5/10
Le brio de Yvan Attal [Albanie]: 6.75/10
Au poste! de Quentin Dupieux [Albanie] : 7/10
9 mois ferme de Albert Dupontel [Albanie] : 6/10
The Father de Florian Zeller [Canal+] : 7.5/10
Médecin de nuit de Élie Wajeman [OCS] : 5.5/10

Mars (11)

Scream 5 de Matt Bettinelli-Olpin & Tyler Gillett [Albanie] : 4/10
Effacer l'historique de Benoit Delepine et Gustave Kervern [Ciné+] : 7.5/10
The Batman de Matt Reeves [Cinéma] : 7/10
Burning de Lee Chang-Dong [Arte] : 6/10
Le Grand Soir de Benoit Delepine et Gustave Kervern [Ciné+] : 8/10
Logan Lucky de Steven Soderbergh [Ciné+] : 7.25/10
Out of Sight de Steven Soderbergh [Albanie] : 8/10
I Feel Good de Benoit Delepine et Gustave Kervern [Albanie] : 6/10
Sleepers de Barry Levinson [Netflix] : 7.25/10
Kaamelott de Alexandre Astier [Canal+] : 7/10
The Deer Hunter de Michael Cimino [Albanie] : 9/10

Avril ()

Saint Amour de Benoit Delepine et Gustave Kervern [Ciné+] : 5/10

---

TV

Corporate (Comedy Central) - Saison 1 (en cours)
Curb your Enthusiasm (HBO) - Saison 11 : 6.5/10
L'Effondrement (Canal+) - Mini-série : 7/10
En Thérapie (Arte) - Saison 1 : 5/10
How I Met Your Mother (CBS) - Saison 1 : (en cours)
New Girl (FOX) - Saison 1 : 5/10
Oz (HBO) - Saison 1 : 8/10
Oz (HBO) - Saison 2 : 7.5/10
Oz (HBO) - Saison 3 : 8/10
Oz (HBO) - Saison 4 : 9/10
Oz (HBO) - Saison 5 : 7/10
Oz (HBO) - Saison 6 : 6.5/10
Seinfeld (NBC) - Saison 7 : 7.75/10
Seinfeld (NBC) - Saison 8 : 8.25/10
Seinfeld (NBC) - Saison 9 : 8/10
Starstruck (BBC 1) - Saison 1 : (en cours)
The Wire (HBO) - Saison 2 : 9/10
The Wire (HBO) - Saison 3 : 10/10
The Wire (HBO) - Saison 4 : 10/10
The Wire (HBO) - Saison 5 : (en cours)

Spectacles/One-man show

Roman Frayssinet - Alors : 7.25/10
Hakim Jemili - Super : 7/10

---

Books

Race de Sarah Mazouz [Essai, société] : 6.5/10
La fabrique des filles : l'éducation des filles de Jules Ferry à la pilule de Rebecca Rogers & Françoise Thébaud [Documentaire] : 7/10
Premier sang de Amélie Nothomb [Roman, contemporain] : 5/10
L'oeuvre de Quentin Tarantino : du cinéphile au cinéaste de Guillaume Labrude [Bio, ciné] : 7.25/10
Les sentiers du désastre de Donald Westlake [Roman, polar] : 6.5/10
Le poète de Michael Connelly [Roman, policier/thriller] : 7.25/10
David Foster Wallace : biographie de D.T. Max [Bio] : 7/10
Apocalypse cognitive de Gerald Bronner [Essai, société] : 7/10
L'attrape-cœurs de J. D. Salinger [Roman, coming-of-age] : 6/10
La civilisation du poisson rouge de Bruno Patino [Essai, société] : 7/10
La Ferme des animaux de George Orwell [Roman, dystopie] : 6.5/10
Bright Lights, Big City de Jay McInerney [Roman, brat pack] : 6/10

BD

(à ajouter)


(gras) : découverte
(italique) : revisionnage
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Re: [Mr Jack] Deux mille vingt-deux

Messagepar Mark Chopper » Mer 26 Jan 2022, 20:16

Liberal Arts (2012) de Josh Radnor [MyCanal] : 7/10


Je vois que tu as bien aimé :super:
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Re: [Mr Jack] Deux mille vingt-deux

Messagepar Mr Jack » Mer 26 Jan 2022, 20:35

Oui, je rejoins ton avis, du coup. Ca m'a un peu fait penser à Midnight in Paris, en moins ambitieux, peut-être, mais sur l'illusion du sentiment mélancolique et sur le déni du présent, ça se rejoint un peu. J'aime bien le ton posé et calme, pour une romcom c'est quand même pas si courant de pas être bombardé de musique pour créer des transitions inutiles. Et puis le film évite les clichés et les tropes trop lourds (triangles amoureux, le classique "boy gets the girl, boy loses the girl, boy marries the girl). Par ex Olsen joue une Manic Pixie Dream Girl assez classique mais le personnage masculin est assez intelligent et conscient de lui-même pour se rendre compte de sa trajectoire avant de tomber dans le piège. Et puis les références aussi sont bien amenées. Infinite Jest n'est jamais explicitement cité mais les persos en parlent assez pour que tout le monde comprenne de qui on parle sans avoir besoin de souligner au sharpie. Et puis en effet, le film en parle bien sans glorifier à tout prix. "Stop reading this. Don't be the genius who dies young. Be the genius who dies old". :super:
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Re: [Mr Jack] Deux mille vingt-deux

Messagepar Mr Jack » Mer 02 Mar 2022, 11:14

Petit recap du mois de février. Je rajoute la TV et le reste que j'ai MAJ au fur et à mesure.

Films

Bac Nord de Cédric Jimenez [Albanie] : 6/10
Made in France de Nicolas Boukhrief [OCS] : 5/10
Adieu les cons de Albert Dupontel [Canal+] : 8/10
Une intime conviction de Antoine Raimbault [Albanie] : 6.5/10
La fille au bracelet de Stéphane Demoustier [Ciné+] : 7/10
Police de Anne Fontaine [Ciné+] : 3/10
Horse feathers de Norman Z. McLeod [BR] : 7/10
Duck Soup de Leo McCarey [BR] : 7.5/10
Les étoiles vagabondes de Nekfeu & Syrine Boulanouar [Albanie] : 7.25/10
Le discours de Laurent Tirard [Canal+] : 5/10
Le brio de Yvan Attal [Albanie]: 6.75/10
Au poste! de Quentin Dupieux [Albanie] : 7/10
9 mois ferme de Albert Dupontel [Albanie] : 6/10
The Father de Florian Zeller [Canal+] : 7.5/10
Médecin de nuit de Élie Wajeman [OCS] : 5.5/10

TV

Corporate (Comedy Central) - Saison 1 (en cours)
Curb your Enthusiasm (HBO) - Saison 11 : 6.5/10
L'Effondrement (Canal+) - Mini-série : (en cours)
New Girl (FOX) - Saison 1 : (en cours)
Oz (HBO) - Saison 1 : 8/10
Oz (HBO) - Saison 2 : 7.5/10
Oz (HBO) - Saison 3 : 8/10
Oz (HBO) - Saison 4 : 9/10
Oz (HBO) - Saison 5 : 7/10
Oz (HBO) - Saison 6 : 6.5/10
Seinfeld (NBC) - Saison 7 : 7.75/10
Seinfeld (NBC) - Saison 8 : 8.25/10
Seinfeld (NBC) - Saison 9 : 8/10
The Wire (HBO) - Saison 2 : 9/10
The Wire (HBO) - Saison 3 : (en cours)

Spectacles/One-man show

Roman Frayssinet - Alors : 7.25/10
Hakim Jemili - Super : 7/10

---

Books

Race de Sarah Mazouz [Essai, société] : 6.5/10
La fabrique des filles : l'éducation des filles de Jules Ferry à la pilule de Rebecca Rogers & Françoise Thébaud [Documentaire] : 7/10
Premier sang de Amélie Nothomb [Roman, contemporain] : 5/10
L'oeuvre de Quentin Tarantino : du cinéphile au cinéaste de Guillaume Labrude [Bio, ciné] : 7.25/10
Les sentiers du désastre de Donald Westlake [Roman, polar] : 6.5/10
Le poète de Michael Connelly [Roman, policier/thriller] : 7.25/10
David Foster Wallace : biographie de D.T. Max [Bio] : 7/10
Apocalypse cognitive de Gerald Bronner [Essai, société] : 7/10
L'attrape-cœurs de J. D. Salinger [Roman, coming-of-age] : 6/10
La civilisation du poisson rouge de Bruno Patino [Essai, société] : (en cours)
La course au mouton sauvage de Haruki Murakami [Roman, réalisme magique] : (en cours)
L'idiot vol.2 de Fedor Dostoievski [Roman, classique] : (en cours)
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Batman (The) - 7,5/10

Messagepar Mr Jack » Jeu 10 Mar 2022, 11:44

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THE BATMAN (2022)

▔▔▔▔▔▔▔▔▔▔▔▔▔▔▔▔▔▔▔▔▔▔▔▔▔▔▔▔▔▔▔▔▔▔▔▔▔▔▔
Matt Reeves
7.5/10


Humain après tout.

Qu’est-ce que c’est, Batman ? Un des seuls super-héros qui n’a de super que le nom puisqu’il n’a aucun pouvoir. C’est un humain augmenté. Un enfant peureux, Bruce Wayne, qui a perdu son papa et sa maman dans une ville terrifiante et qui va se servir de son pouvoir et de l’argent familial pour se défendre avec ses gadgets. Un être traumatisé qui tente de servir le bien plutôt que de nourrir sa part sombre en lui. Un homme qui combat ses propres démons en même temps que de péter la tronche des voleurs de sac dans les ruelles puantes de Gotham. Un être d’ombre, donc, qui a appris à connaitre sa ville et finit par la dompter pour ne finalement ne faire qu’un avec elle et devenir les ténèbres. Mais Batman, ça n’a pas toujours été ça. Batman, c’est avant tout un mythe, une figure de la culture populaire.

Le premier long métrage de l’homme chauve-souris sort en 66. C’est la Batmania. La série TV sortie la même année est un carton, sorte de feuilleton pop kitch à l’humour maladroit. Adam West joue la chauve-souris dans les deux univers. Puis plus rien. Il faut la reprise en main par Frank Miller de l’univers Batman et ses fameux Dark Knight (1986) et Year One (1987) pour relire une véritable incarnation du héros. Le ton est cette fois plus sombre et violent. On revient aux origines. Alan Moore, autre génie du medium comics, se charge d’édifier le Joker en nemesis ultime et diabolique dans son non moins fameux Killing Joke (1988). Batman est redevenu hype, mais il ne fait plus rire personne. Il pète des gueules, il a du sang sur les mains et des cadavres dans le placard. Forcément, le cinéma lui refait des yeux doux.

La Warner a l’idée un peu…farfelue de mettre en symbiose l’univers désormais sombre et violent de Batman à celui de Tim Burton, qui en 86, n’est encore personne. Il n’a réalisé que Pee-Wee (1985). Plus éloigné de l’univers de Batman c’est difficilement possible. Mais Burton a fait des clips et des longs-métrages, notamment Vincent (1982) où son univers proche de celui d’Edgar Allan Poe pouvait faire transpirer une certaine obscurité étrange. Mais Burton, déjà là, était plus proche des vieux films d’horreur narrés par Vincent Price que Marv, le détective bourrin de Sin City. En 89 sort donc le kitsch et rigide Batman, avec Keaton serré dans son costard et Nicholson emprisonné sous son maquillage outrancier. La direction artistique et (surtout) le succès phénoménal du film feront revenir Burton pour un second opus dont ce dernier ne voulait pas. Sentant bien que le studio ne voulait que surfer sur le succès du premier opus sans s’attacher à une image trop sombre et violente (le succès du film avait effacé le succès des comics de Miller et Moore) il exige les pleins pouvoirs. Il pond un film moins crispé et plus adulte, rempli de de sous-entendus sexuels mais se met à dos la Warner qui voulait surtout vendre des figurines et ne pas choquer la ménagère. Comme d’habitude, c’est le plus fort qui a le dernier mot. Burton est débarqué et la Warner va réussir à avoir son film parfait grâce à Joel Schumacher. Batman Forever est fabriqué pour les jeunes garçons, il est lisse et édulcoré, avec des couleurs criardes et des gadgets prêts pour les produits dérivés. S’en suivra une merde encore plus fumante avec Batman & Robin, summum du ridicule et du too-much. On est en 1997, l’ère de la virilité et du muscle saillant. Inutile de dire qu’en 30 ans, on ne s’est quasiment jamais intéressé à Bruce Wayne, ni à Batman en tant qu’autre chose qu’une figure d’action.

2005, la société a changé. La société américaine plus qu’aucune autre. Il est temps de tout effacer et de revenir aux bases. Les bases saines de Batman, c’est Year One, de Frank Miller. Entre temps est sorti sa suite, A Long Halloween (Loeb & Sale). Nolan, qui sera engagé par la Warner longtemps après avoir cherché un remplaçant à Schumacher, et qui avait fait défiler Aronofsky, Eastwood, Petersen et les soeurs Washowski avant de tomber sur le créateur de Memento. Pour comprendre le renouveau de l’homme chauve-souris, il faut se remettre dans le contexte. Le début des années 2000 est pauvre en film de genre et ce sont les succès des X-Men (2000, 2003) et surtout Spider-Man (2001, 2004) qui vont faire doucement revivre les super-slips à l’écran, avec un ton plus réaliste et brutal pour l’un, et léger et humain pour l’autre. A l’instar du renouveau d’autres franchises d’action comme Mission Impossible, James Bond et Jason Bourne, l’heure n’est plus aux gadgets et aux couleurs flashy, mais bien au réalisme et à la brutalité collant à un monde et une société anxiogène et violente. C’est David S.Goyer qui se chargera d’écrire avec Nolan le script de Batman Begins, reboot assumé de la franchise. Goyer avait déjà fait ses preuves avec l’âpre et ultra-violent Blade (1998). Le ton est donc plus posé. Begins est un film assez surfait et cheap dans la direction artistique de son Gotham, mais qui avait la qualité de redonner à Batman ses lettres de noblesse, avec un personnage plus réfléchi et torturé. Le film restait en surface et jouait sur la construction du mythe Batman en approfondissant le background relié à Ra's al Ghul.

Puis vint le choc The Dark Knight, qui ne cachait ni ses influences narratives (le comics de Miller), ni ses influences cinématographiques (Heat). La force du film était alors de continuer l’approfondissement du mythe Batman, en faisant ressurgir ses contradictions et ses dilemmes moraux ; tout en l’affrontant à une figure démoniaque fidèle aux comics, à savoir le Joker, formidablement bien tenu par Heath Ledger. Un Joker opaque, terrifiant par son ambiguïté. C’est le premier film Batman qui montre le vrai chaos dans une ville à grande échelle. Gotham, calquée sur New-York, est détruite de l’intérieur et son âme est en péril. Nolan continuera à triturer cette idée dans le décrié Dark Knight Rises, en prenant la figure de Bane pour aller plus loin dans le chaos. Batman n’est que tout petit en face de la terreur à face mi-humaine, mi-ventilateur. Il a un dos, qui peut être cassé, et une ville, qui peut être détruite. C’était à mon sens la grande qualité de ce film, de détruire le mythe après l’avoir reconstruit pour mieux en saisir la puissance. Mais jamais, en trois films, Nolan ne s’est intéressé à Bruce Wayne, ce petit garçon traumatisé. Simplement parce que Nolan était plus intéressé par les outils que par l’humain. Par les gadgets, mais plus dans leur technicité et leur usage. Les engins, en fait : les voitures, les hélicos, les bateaux, les cargos, les avions. Nolan a toujours été plus ingénieur que psychologue. Batman joué par Bale était un surhumain. Et Bruce, dans tout ça ?

2022. Dix ans après Rises, Batman est entré dans l’univers DC, utilisé par Snyder pour se fritter avec Superman et toute la Justice League, et de manière furtive par David Ayer pour son affligeant Suicide Squad. Batman n’existe plus qu’au sein d’un collectif. Mais où est donc passé Bruce ?

Retour en 2017. La Warner, impactée par la crise de 2008 et la prise de pouvoir hégémonique de Disney sur le marché du divertissement, doit se démarquer. Elle a lancé l’univers DC pour coller au multiverse Marvel mais veut aussi faire des films plus ambitieux dans le contenu. C’est Joaquin Phoenix, acteur phare du cinéma dit d’auteur nouvelle génération, homme engagé et comédien descendant de la méthode Adler et Stanislavski, qui est à l’origine du Joker. Il a refusé les appels de Marvel pour ne pas rester enfermé dans un personnage appelé à revenir sur plusieurs films et souhaite « travailler » un personnage issu de la culture comics aussi fort que le Joker, avec un budget plus restreint. Todd Phillips, réalisateur du classique instantané The Hangover, et jusque là cantonné à des comédies pures, veut s’attaquer au mythe du Joker. Il fait War Dogs pour montrer qu’il peut sortir de sa zone de confort. Dans une interview à Vanity Fair, Phillips critique la culture « woke ». Selon lui, elle a tué la comédie. « It’s hard to argue with 30 million people on Twitter ». Difficile de lui donner tort. Il veut faire rire en choquant, mais le format qu’il connait bien ne lui permet plus de s’exprimer librement. « How do I do something irreverent, but fuck comedy? Oh I know, let’s take the comic book movie universe and turn it on its head with this. ». L’idée frôle la démagogie mais est intéressante. Elle en dit presque plus sur le système de production hollywoodien des années 2010 et 20 que sur sa vision du cinéma. Son pitch fait mouche à la Warner et il a le feu vert, avec Scott Silver au scénario (8 Mile, Fighter) et Scorsese à la production. La Warner agite le drapeau Marty pour attirer Leo DiCaprio en lead pour le Joker, mais Phillips et Silver n’ont qu’un acteur en tête : Joaquin Phoenix. Le scénariste dira quand même qu’il ne voulait pas faire entrer Phoenix dans l’univers du comics, mais faire entrer le comics dans l’univers de Phoenix. Déclaration un peu ambiguë qui là aussi en dit beaucoup sur le mythe de l’acteur Roi et qui explique en partie l’angle discutable du film -qui sera avant tout autre chose une tribune pour laisser Phoenix s’exprimer en toute liberté, pour le meilleur et pour le pire (surtout le pire). Joker est donc né. Précisons quand même que Scorsese quittera la prod, trop occupé à penser The Irishman, mais peut-être gêné par le fait que Joker n’est qu’un ersatz brouillon et maladroit de The King of Comedy. La caution De Niro ne sauvera pas le film du plus crado populisme sous-jacent à son incapacité totale à incarner un Joker inquiétant, trop occupé à faire du personnage une victime de la société corrompue. Joker est à mes yeux un film qui passe à côté de son sujet. Mais la volonté primaire, et on la retrouve chez The Batman (on y revient), était de déconstruire le mythe, et d’y insuffler de l’humain.

The Batman nait dans l’enchainement de Joker, tout d’abord par Ben Affleck, qui jouait le rôle de l’homme chauve-souris chez Snyder. Affleck était prévu à la réalisation, au scénario et en lead. Mais embêté par des soucis d’alcool, de divorce et de production sur Justice League, lâche tout et Matt Reeves, connu pour sa qualité de faiseur sur Cloverfield et la trilogie de la Planète des Singes, mais un peu moins pour être le scénariste du très bon polar The Yards (James Gray) est appelé à la rescousse. Reeves repart de zéro pour le scénario de The Batman. Il veut replacer le mythe dans le monde réel. Ses influences majeures ? The Long Halloween et…Year One, toujours. Batman vit dans un monde en décrépitude, noir et sale. Mais ce qui intéresse Reeves, c’est Bruce Wayne. Il écrit le personnage en pensant à Kurt Cobain et Michael Corleone, deux figures coincées dans un monde en ruine, perdues au milieu des ténèbres. Un homme cassé par ses traumas, animé par sa volonté de se battre contre ses démons. Là où l’approche de Reeves est intéressante, c’est qu’il ne se contente pas de faire du Batman une victime, mais il en fait surtout un enquêteur. Batman est solitaire et laconique, d’accord, mais ici, il est surtout introverti, réservé. Il s’éloigne du héros régit par son instinct et préfère l’analyse a posteriori. Intéressante l’idée des images captées par des lentilles puisqu’une fois l’action terminée, il se pose et décrypte pour comprendre à l’instar d’un détective parcourant les indices dans un dossier d’enquête. Batman sous Bale, le surhumain, pouvait faire preuve de réflexion, mais il pensait ses coups a priori comme un voleur préparant un casse. Batman sous Pattinson fait pleinement partie de l’équipe des enquêteurs, et il déchiffre les mystères en se basant sur son intuition et sa cognition. On a un Batman alerte, plus intelligent que la moyenne, qui voit plus vite que les autres et qui déchiffre les codes plus rapidement que les autres. Même si parfois, ça parait un peu rapide, au moins Reeves fait autre chose du héros en noir et ça fait du bien. Sur le rythme du film, également, on a presque un bouleversement formel. Là ou Nolan et les autres étaient dans des variations du film d’action à gros budget, Reeves fait presque un néo-noir, un polar urbain en s’appuyant beaucoup sur Gotham. La ville sous Nolan était le miroir de New-York avec une palette de filtres assez sobre et une photographie assez réaliste des rues. Il filmait la ville à grande échelle mais cette ville aurait tout aussi bien pu être Chicago ou Boston. Là, Gotham ressemble à la vraie Gotham. Il fait sombre tout le temps, même le jour, il pleut souvent et les rues sont sales, miteuses. Les décors sont décrépis et la ville dans son entièreté ressemble à un sous-lieu underground d’un lieu plus grand qui l’aurait avalé puis digéré. Gotham est le repère véritable de Batman, et les ombres sont son refuge.

La fameuse enquête tourne autour du milieu mafieux géré par Falcone (Turturro) et le Pingouin (bluffant Colin Farrell) qui pervertit la ville ; et la présence de Riddler, sorte de serial-killer joué par un Paul Dano aux accents de John Doe. La référence Fincherienne est évidente. De Zodiac à Seven, on a une narration qui avance au rythme des meurtres avec une escalade vers une violence brutale et inquiétante. L’ambiance est aussi posée par la musique toujours impeccable de Giacchino (ça change des couloirs interminables de bruit sous Zimmer). Cette ambiance générale est la grande réussite du film. Elle fabrique un objet très singulier comparé à ce qu’est Batman à l’écran depuis ses débuts. Et malgré son évidente longueur (on aurait pu couper facile 30 minutes), sa lente minutie rassure dans le sens où Reeves rappelle à tous qu’un film populaire peut être exigeant et patient dans sa démarche. L’enquête est tenue par le duo Batman-Gordon. Jeffrey Wright est assez sobre dans son rôle et Gordon a une complicité naturelle avec Batman. On sent la volonté des scénaristes de moins en faire sur les personnages autour du héros et de se concentrer sur Bruce Wayne. Pour cela il fallait un acteur sobre et juste, et Pattinson fait largement le job. On retrouve cette modestie dans le rôle de Catwoman. Kravitz est dans la retenue, même si son histoire perso tient moyennement debout et on perd sa folie que seule Pfeiffer avait réussi à retranscrire à l’écran. Elle fait quand même le boulot et son alchimie avec Batman marche plutôt bien. Le personnage d’Alfred est lui aussi en retrait. Peut-être un peu trop. Mais n’avions-nous déjà pas tout dit dans la trilogie de Nolan ? La figure paternelle de l’homme en noir ne demandait pas plus qu’il ne le montre là encore. Quelques scènes touchantes portées par un Serkis toujours aussi efficace dans ce registre. Au niveau de l’enquête et de la narration, j’ai bien aimé les différents leurres proposés dans le script, notamment celui amenant au Pingouin, qui malgré sa relative inutilité, donne lieu à plusieurs scènes d’action de haute volée. Même si Reeves n’est pas le plus à l’aise pour filmer la scène de course poursuite en voiture, il a quand même quelques belles idées visuelles, notamment celle du plan où la Batmobile sort d’une explosion et de cette vue subjective très inquiétante du vigilante arrivant les pieds en haut, le feu rugissant dans son dos. Batman représente quelque chose de fort dans ce film. Pas seulement un mythe, mais un homme devant son destin, chassant ses démons. Reeves a réussi l’essai raté du Joker en proposant un Batman humain malgré tout, rempli de contradictions et d’états d’âme mais poussé par une volonté mystique et propre au personnage que l’on connait et que l’on aime tous. Ce vigilante fragile mais puissant qui combat les forces du mal, les siennes avant celles du monde.
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Re: [Mr Jack] Deux mille vingt-deux

Messagepar Mr Jack » Ven 01 Avr 2022, 15:07

Mars

Films (11)

Scream 5 de Matt Bettinelli-Olpin & Tyler Gillett [Albanie] : 4/10
Effacer l'historique de Benoit Delepine et Gustave Kervern [Ciné+] : 7.5/10
The Batman de Matt Reeves [Cinéma] : 7/10
Burning de Lee Chang-Dong [Arte] : 6/10
Le Grand Soir de Benoit Delepine et Gustave Kervern [Ciné+] : 8/10
Logan Lucky de Steven Soderbergh [Ciné+] : 7.25/10
Out of Sight de Steven Soderbergh [Albanie] : 8/10
I Feel Good de Benoit Delepine et Gustave Kervern [Albanie] : 6/10
Sleepers de Barry Levinson [Netflix] : 7.25/10
Kaamelott de Alexandre Astier [Canal+] : 7/10
The Deer Hunter de Michael Cimino [Albanie] : 9/10

TV (7)

L'Effondrement (Canal+) - Mini-série : 7/10
En Thérapie (Arte) - Saison 1 : 5/10
How I Met Your Mother (CBS) - Saison 1 : 6.5/10
New Girl (FOX) - Saison 1 : 5/10
The Wire (HBO) - Saison 2 : 9/10
The Wire (HBO) - Saison 3 : 10/10
The Wire (HBO) - Saison 4 : 10/10

Books (3)

La civilisation du poisson rouge de Bruno Patino [Essai, société] : 7/10
La Ferme des animaux de George Orwell [Roman, dystopie] : 6.5/10
Bright Lights, Big City de Jay McInerney [Roman, brat pack] : 6/10
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Re: [Mr Jack] Deux mille vingt-deux

Messagepar Mark Chopper » Ven 01 Avr 2022, 15:14

Bright Lights, Big City de Jay McInerney


Pas son meilleur, mais j'aime bien...

Beigbeder et d'autres bobos du Café de Flore l'ont pompé en long et en large.
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Re: [Mr Jack] Deux mille vingt-deux

Messagepar Mr Jack » Ven 01 Avr 2022, 19:11

Ennui poli. J'ai déjà quasi tout oublié du livre. :|
J'espère prendre plus mon pied avec les Savage.
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You have to believe.
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Mr Jack
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Re: [Mr Jack] Deux mille vingt-deux

Messagepar Mark Chopper » Ven 01 Avr 2022, 19:12

Les deux n'ont pas grand chose en commun.
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