[Olrik] (`0´)ノ  映画 2025 !

Vos critiques de longs-métrages

Modérateurs: Dunandan, Alegas, Modérateurs du forum

Vache (La) - 7,5/10

Messagepar Olrik » Mar 09 Déc 2025, 17:11

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La Vache
Dariush Mehrjui - 1969


Dans un village, le paysan Hassan déborde d’affection pour sa vache, sorte de fille de substitution. Mais un jour, alors qu’il se rend en ville, son bovidé bien-aimé meurt de manière inexpliquée. Inquiets quant à la réaction d’Hassan quand il apprendra la terrible nouvelle, les villageois décident d’enterrer la bête et de tisser une fable difficile à gober : sa vache s’est enfuie ! Evidemment, le mensonge passe mal et Hassan, désespéré, sombre très vite dans la folie…

Parfois, pour avoir une bonne histoire, il ne faut pas chercher bien loin. Alors que, la veille, Tarkovski m’avait infligé trois heures de Rublev qui m’avaient laissé dans la même perplexité que devant ces œuvres religieuses orthodoxes concluant son pensum, j’avais besoin d’un terroir moins grandiloquent avec de petites gens mieux campées, comme dans une nouvelle de Maupassant (souvent fertiles d’ailleurs lorsqu’il s’agit de conter des histoires cruelles où il est question de bêtes). Et pour cela, La Vache de Dariush Mehrjui s’est avéré un excellent choix. On est attendri de voir cet homme un peu rogue envers les autres faire l’andouille devant sa vache qu’il va jusqu’à parer de colliers. Mais on apprécie aussi d’observer les différents membres de la petite société de son village. Ainsi le maire, pas vraiment efficace, ou bien tel villageois sincèrement désireux d’atténuer la peine de Hassan, ou encore tel autre sans illusion sur l’issue du stratagème et qui n’a de cesse de mettre les autres devant leurs contradictions. Pas vraiment de grandes envolées rubléviennes sur la destinée ou le sens de l’art. Juste des phrases de paysans entremêlant bon sens et superstitions, et cela suffit à rendre les cinq minutes touchantes et captivantes, portées notamment par une belle photographie et d’exotiques airs joués au santour qui donnent envie de suivre l’histoire une tasse de thé à la menthe à portée de main.
Apparemment, le Shah n’avait guère apprécié la représentation de la ruralité iranienne et avait aussitôt ordonné d’interdire le film. Inversement, l’Ayatollah Khomenei aurait confié sa grande admiration pour ce dernier. Double réception paradoxale qui, associée à des retours positifs qui ne se sont jamais démentis au fil des décennies (étonnant prix du meilleur film au festival de La Rochelle de 1994), explique l’aura particulière de ce film, perçu au passage comme le premier film de la Nouvelle Vague iranienne.
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Zéro de conduite - 6/10

Messagepar Olrik » Mer 10 Déc 2025, 15:24

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Zéro de conduite
Jean Vigo - 1933


Avant de revoir If… de Lindsay Anderson, je prends enfin le temps de découvrir Zéro de conduite, le pamphlet anarcho-libertaire de Vigo que la censure ne rata évidemment pas à sa sortie.

Rien que pour cela, la sympathie est de rigueur pour ce petit film qui suscita l’ire des tenants de l’ordre et de la patrie (il fut considéré comme « antifrançais »), mais aussi les sifflets lors de sa première projection – sifflets au milieu desquels un Jacques Prévert enthousiaste se manifesta en faisant entendre bruyamment ses applaudissements. Bien avant le floydien "Hey ! Teachers ! Leave de kids alone !" on avait un "Merde aux professeurs !" qui avait bien dû amuser le poète de Saint-Germain-des-Prés.

Il faut avoir véritablement ce contexte en tête pour comprendre ce que pouvait avoir de sulfureux cette collection de saynètes assez innocentes pour la plupart (clairement, on en a vu d’autres depuis). Sulfureux et poétique dans sa maladresse, le film témoigne de la volonté du réalisateur de faire feu de tout bois. Malade, sachant probablement qu’il n’en a pas pour longtemps à vivre, Vigo farcit son récit d’idées, créant un chaos à la limite du surréalisme et raccord avec cet esprit de liberté… mais un peu déroutant pour le spectateur qui parvient à saisir certaines idées mais peine à trouver touchants les galopins du film (à la même époque, Duvivier fera sur ce plan bien mieux avec sa deuxième version de Poil de Carotte, autre galopin révolté).

D’autant que la pauvreté technique du doublage n’aide pas. On a l’impression de se trouver face à un film bâtard entre le muet et le parlant. A un moment, le pion fantaisiste et permissif du film fait une imitation de Charlot dans la cour et l’on songe alors à la grande efficacité visuelle des grands maîtres comiques du muet, efficacité qui, un siècle après, a encore la capacité de faire ouvrir de grands yeux émerveillés. Je n’en dirais pas autant de l’art poetico-comique de Vigo qui touche à tout et ne fait donc qu’effleurer.

Mais encore une fois, dans le contexte de 1933, cet effleurement devait être ressenti bien différemment. Et cet aspect chaotique évoque finalement le cahier de brouillon d’un sale gosse pour qui le temps presse. Le collégien présent sur l’affiche originale, c’est un peu Vigo en fin de compte.
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Kaza-hana - 7,5/10

Messagepar Olrik » Jeu 11 Déc 2025, 20:46

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Kaza-Hana
Shinji Somai - 2000


Pour son dernier film, Somai fait le choix du road movie qui annonce le Vibrator d’Hiroki (en 2003) ou encore le Drive my Car d’Hamaguchi (bien plus tard, en 2021) en ce qu’il s’agit de mettre dans un véhicule, deux êtres, un homme et une femme, deux écorchés vifs au présent morose et se demandant sérieusement de quoi pourra être fait leur avenir.
La question est d’ailleurs si épineuse pour ce couple – qui s’est rencontré par hasard au cours d’une nuit bien alcoolisée – qu’il n’écarte la possibilité de faire de leur escapade dans des zones enneigées d’Hokkaido l’occasion de pratiquer un de ces shinjū, ces doubles suicides qui pullulent dans les traditions littéraire et cinématographique.
Seulement, voilà, si ces doubles suicides sont souvent liés à l’amour, rien de tel (a priori), ne semble lier Yuriko, prostituée qui a laissé depuis cinq ans la garde de sa petite-fille à sa mère, et Renji, employé au ministère de l’Education qui voit sa carrière ruinée à cause d’un grotesque vol à l’étalage dans un konbini. Cependant la radieuse beauté de Yuriko, ses sourires, laissent supposer que le taciturne ex-salary man lui plaît, esquissant la possibilité d’un nouveau départ dans la vie qui éviterait un fâcheux suicide. Mais en attendant de le vérifier, le voyage en voiture sera l’occasion, et pour lui, et pour elle, de ressasser des souvenirs qui ponctueront la linéarité du récit d’une myriade de courts flash-backs.
Cela demande un peu d’habitude, les vingt premières minutes peuvent paraître un brin languissantes, pas forcément passionnantes. Mais de fil en aiguille, Somai parvient à instiller du charme dans ce lent road movie au nord du Japon, comptant encore une fois sur le rayonnement de Kyoko Koizumi qui, alors âgée de 34 ans, désireuse de mettre en veille sa carrière de chanteuse au profit de rôles au cinéma, crève l’écran par sa beauté et la simplicité mi-enjouée mi-désespérée qu’elle a su mettre dans son personnage de mère prostituée. Avec à la fin un climax poetico onirique qui, s’il n’égale pas celui de Déménagement, sait conclure de manière apaisée et élégante à la fois ce film et une filmographie qui, on le sait, aura attisée l’admiration d’un Kore-eda et susciter son envie de faire des films dans le même esprit.
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Re: [Olrik] (`0´)ノ  映画 2025 !

Messagepar osorojo » Jeu 11 Déc 2025, 21:09

Intriguant, tu le vends bien :chinese:
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Re: [Olrik] (`0´)ノ  映画 2025 !

Messagepar Olrik » Jeu 11 Déc 2025, 21:29

Après des déconvenues liées à l'année 1969 (dernière en date : Medea, de Pasolini), ça faisait du bien de revenir à des valeurs sûres (et au beau visage de Kyoko).
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Re: [Olrik] (`0´)ノ  映画 2025 !

Messagepar osorojo » Jeu 11 Déc 2025, 22:20

J'avais été assez déçu / ennuyé aussi par Médée même si je ne l'ai pas trouvé détestable. J'hésitais à tenter Porcherie, mais j'ai l'impression que c'est pas un bon cru Pasolinien non plus.
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Re: [Olrik] (`0´)ノ  映画 2025 !

Messagepar Olrik » Jeu 11 Déc 2025, 23:10

Je ne retiens que trois choses : Terzieff en centaure (je l'ai trouvé assez cool Lolo, en Chiron), de magnifiques décors et une ambiance sonore très étrange dans sa volonté de restituer une ère mythologique, mais pas déplaisante. Mais je l'ai plutôt subi.
Si je devais retourner prochainement à Pasolini, ce serait plutôt du côté de son Evangile selon Saint Mathieu que je me risquerais.
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If.... - 7/10

Messagepar Olrik » Ven 12 Déc 2025, 15:54

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If...
Lindsay Anderson (1968)


Au visionnage de If… il ne fait aucun doute qu’Anderson s’est inspiré du Zéro de Conduite de Jean Vigo. Par sa séquence finale sur les toits, mais aussi par une collection de saynètes dans lesquelles on assiste à des survivances de ce que la jeunesse peut avoir de fantaisie ou d’insolence. Le tout avec parfois des accents surréalistes qui culmineront avec la séquence de la fusillade du toit.
Car n’attendez pas un réalisme à la Elephant, mais plutôt une violence désamorcée par un humour qui donne à l’ensemble un côté Monty Python, notamment avec le type en armure de chevalier, le prêtre donnant des ordres guerriers ou telle bonne mère de famille se saisissant d’un fusil mitrailleur pour canarder les rebelles. Et quelques minutes plus tôt, après la première agression durant la parodie de bataille et que Travis (amusant ce prénom, quelques années avant qu’un autre Travis conducteur de Taxi fasse lui aussi sauter sa soupape intérieure) et ses deux « droogies » se font remonter les bretelles dans le bureau du proviseur, on voit ce dernier tirer un énorme tiroir duquel jaillit… le prêtre ayant été malmené par la petite bande. Il ressort de ce mélange des genres autant une impression d’imitation du film matriciel de Vigo qu’une volonté de donner un côté fable philosophique qu’Anderson poursuivra dans la suite de sa trilogie consacrée au personnage de Travis, toujours avec Malcolm McDowell.
Sinon le film n’y va pas avec le dos de la cuillère dans sa dénonciation de l’autoritarisme de l’establishment pour fabriquer de bon petits gentlemen qui sauront se sacrifier pour leur patrie. Il y a là-dedans un esprit fascisant (surtout incarné par les détestables petits kapos, ces « whips » qui sont des élèves chargés de faire respecter la discipline : autant dire que la fonction a vite fait de leur monter à la tête) qui donne à cette jeunesse un côté « jeunesses elizabethennes » avec défilés, pas de l’oie et main sur le cœur. La révolte à coups de mortier et de mitrailleuses est dès lors tout ce qu’il y a de plus normal et savoureux… même s’il ne fait aucun doute que Travis et ses compagnons d’armes seront submergés par le nombre. Pour reprendre une expression de Frédéric Dard, « safari sans espoir » que celui visant à anéantir l’establishment. La bête est bien trop grasse.
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