[Alegas] Mes Critiques en 2021

[pabelbaba]

C'est pas vraiment "nécessaire" d'ailleurs.

[Alegas]

Rocketman de Dexter Fletcher
(2019)

Dans les biopics récents, c’est clairement un des rares que je retiens. Alors oui, ce n’est pas parfait, et ça s’impose pas comme une référence du genre, mais à l’heure où les biopics se contentent d’être des successions de scénettes illustrant chaque moment important de la vie de la personne traitée, ça fait du bien de voir un film qui essaye de sortir des sentiers battus. Forcément, difficile de ne pas faire la comparaison avec Bohemian Rhapsody : même sujet (un chanteur british mondialement connu), mêmes thématiques (homosexualité, rise and fall, déboires amoureux, etc…), sorties à quelques mois d’intervalle et même réalisateur (Fletcher ayant pris le relais de Singer, quand bien même il ne soit pas crédité au final), mais là où ça me fait mal c’est de voir que le biopic sur Freddy Mercury a eu nettement plus de succès, avec récompenses à l’appui, alors que c’était le summum du film paresseux, et qu’à côté de ça celui sur Elton John a été largement zappé.

Une injustice d’autant plus grande que Rocketman réussit un point qui me paraît fondamental : à la vision de ce dernier on a vraiment l’impression de voir un film à l’image de son sujet, avec l’exubérance et la folie que cela suppose. Exit le biopic à la narration montée sur des rails, on est ici dans une sorte d’introspection aux allures de comédie musicale, on peut passer d’une scène intimiste à une grosse séquence dansée d’une minute à l’autre, et le plus dingue c’est de constater que ça ne fait jamais artificiel vu que chaque chanson s’inscrit parfaitement dans ce qu’elle raconte de la vie d’Elton John (j’imagine que ça a dû être un sacré casse-tête de réussir à tout lier), le must étant que ce n’est pas forcément le chanteur qui élève la voix, mais aussi son entourage (la très jolie scène dans la maison familiale avec le père et la mère, mais aussi le dîner qui aboutit sur Goodbye yellow brick road). Et ça ne fait pas les choses à moitié : on sent le budget, on sent l’ambition (parfois même trop sur certains passages, le budget CG montre vite ses limites), il y a des raccords et des faux plans-séquences à foison, des petites scènes teintées de folie (la lévitation sur Crocodile rock), bref c’est pas du truc tout mou comme le Singer, y’a une envie de faire du cinéma.

Et puis bon, voir que Rami Malek a remporté son Oscar les doigts dans le nez alors que Taron Egerton, qui joue, chante et danse en même temps, n’a pas reçu la moindre nomination, c’est quand même bien honteux dans son genre (en plus les reprises sont vraiment réussies, notamment I’m still standing et Goodbye yellow brick road ). Les seul miscasts du film c’est Bryce Dallas Howard dont la transformation physique est pas convaincante et Richard Madden qui en fait des tonnes, mais le reste c’est du tout bon (ça fait plaisir de voir Jamie Bell dans un rôle autant mis en avant). Bref, pour peu qu’on aime la musique d’Elton John (c’est mon cas) et qu’on soit pas contre la proposition d’un biopic qui fasse certaines choses différemment (idem), c’est recommandable, même si encore une fois c’est clairement pas amené à être une référence du genre (ça reste encore trop classique dans son schéma rise and fall pour ça).

6,5/10

[Mark Chopper]

Taron Egerton, qui joue, chante et danse en même temps, n’a pas reçu la moindre nomination, c’est quand même bien honteux dans son genre

Oui, mais est-ce qu'il portait un dentier ?

[Alegas]

[Alegas]

Amistad de Steven Spielberg
(1997)

Revisionnage à la hausse, ça laisse de l’espoir pour Lincoln et BFG . Celui-là j’en gardais un souvenir bien pénible, genre trop long, trop académique, trop plat, etc… et même si je garde certaines réserves ça reste quand même du film à Oscars carrément regardable, et même surprenant par moment. Pour saisir un peu le comment du pourquoi de ce métrage, il faut forcément le remettre dans son contexte : Spielberg venait de lancer Dreamworks, la compagnie était déjà en train de préparer un gros catalogue très diversifié, et il fallait envoyer un message fort à Hollywood pour montrer que le studio comptait bien se faire sa place. Dans cette optique, Spielberg s’empare du projet Amistad pour en faire un film à récompenses, ce qu’il réussira à moitié (beaucoup de nominations, mais peu de statuettes), et du coup prend le moins de risques possibles. Ça donne un film pas désagréable à regarder pour le fan de Spielberg que je suis, mais il manque clairement un truc pour passer au stade supérieur.

Globalement, le métrage manque de passion, de personnalité, il semble rouler sur des rails déjà tout faits, et finalement seules les flashbacks de l’Amistad donnent l’impression de retrouver le Spielberg de Schindler’s List, avec une violence bien graphique (la lame pleine de sang qui traverse la voile, les ongles qui s’arrachent pour tirer le clou de la délivrance, le sang qui gicle sur les visages à chaque coups de fouet), des prises de risques (les quinze premières minutes avec seulement du mende et de l’espagnol) mais aussi des scènes d’esclavagisme qui vont assez loin dans une représentation malheureusement réaliste, le must étant le coup des esclaves jetés à l’océan pour effacer les traces (c’était l’une des rares scènes que je gardais en mémoire, et je comprend pourquoi ). Le truc, c’est qu’à côté de ça, les scènes de procès qui sont une partie non négligeable du métrage ne sont pas aussi réussies. Certes, la photographie de Kaminski est superbe, mais à côté de ça la mise en scène manque de l’inventivité spielbergienne, à quelques exceptions près ça donne l’impression que ça aurait pu être réalisé par n’importe qui.

Heureusement, ça se rattrape sur les passages en prison avec la relation d’amitié qui se crée entre Hounsou et McConaughey, et ça donne lieu à quelques jolies scènes (Hounsou qui s’éloigne dans la cour pour montrer à quel point il vient de loin). Par contre, grosse incompréhension sur le dernier acte avec l’arrivée de Anthony Hopkins, je ne m’explique pas du tout l’écriture de cet arc narratif, où on te montre pendant tout le film que Hopkins est l’homme de la situation mais qu’il veut pas venir, et dès que tout semble perdu il arrive comme un deus ex machina et règle effectivement tout en dix minutes . Côté casting le film est clairement porté par le duo Hounsou/McConaughey (Spielberg a eu le nez fin d’ailleurs pour ce dernier, c’était l’époque où il était encore juste un beau gosse aux yeux de tout le monde), Hopkins cabotine, et Freeman a malheureusement un personnage pas assez mis en avant (on voit bien ce qui est voulu avec ce personnage, mais ça se perd au milieu de l’histoire à mon sens). Sinon, il y a une jolie galerie de seconds rôles (Ejofor, Postlethwaite, Skarsgard, Milian, Paquin), et le score de Williams a quelques passages assez mortels (ceux qui illustrent les voyages de l’Amistad ). Un Spielberg très académique certes, mais qui a quand même de beaux restes.

6,5/10

[lvri]

Ça fait longtemps que je veux le revoir, mais que les avis négatifs me freinent. Je pense que je vais le revoir

[Mark Chopper]

le film est clairement porté par le duo Hounsou/McConaughey (Spielberg a eu le nez fin d’ailleurs pour ce dernier, c’était l’époque où il était encore juste un beau gosse aux yeux de tout le monde

A vrai dire, non. Il avait déjà décroché le rôle principal de Le Droit de tuer ? et, aussi impensable que cela puisse paraître aujourd'hui, c'était considéré comme le jackpot et un film de premier plan... Tous les jeunes premiers de Hollywood étaient sur les rangs pour obtenir ce rôle (La Firme et L'Affaire Pélican, adaptés d'autres romans de Grisham, avaient été des cartons monstrueux).

Je crois d'ailleurs que c'est Grisham qui avait le dernier mot sur le casting.

[maltese]

Revisionnage à la hausse, ça laisse de l’espoir pour Lincoln 

C'est très bien Lincoln, tu devrais vraiment le revoir à la hausse je pense. Le film a un peu pâti des attentes qu'on pouvait en avoir (quelque chose de plus "épique" sans doute), mais c'est un solide film bavard et intelligent sur les mécanismes du pouvoir, je le trouve passionnant dans sa représentation des jeux politiques pour arriver à ses fins et la manière dont Spielberg joue avec la figure de Lincoln.

[Alegas]

le film est clairement porté par le duo Hounsou/McConaughey (Spielberg a eu le nez fin d’ailleurs pour ce dernier, c’était l’époque où il était encore juste un beau gosse aux yeux de tout le monde

A vrai dire, non. Il avait déjà décroché le rôle principal de Le Droit de tuer ? et, aussi impensable que cela puisse paraître aujourd'hui, c'était considéré comme le jackpot et un film de premier plan...

Du coup vu ta phrase et la carrière de Matthew, j'en conclus que finalement c'était pas le jackpot ?

Revisionnage à la hausse, ça laisse de l’espoir pour Lincoln

C'est très bien Lincoln, tu devrais vraiment le revoir à la hausse je pense. Le film a un peu pâti des attentes qu'on pouvait en avoir (quelque chose de plus "épique" sans doute), mais c'est un solide film bavard et intelligent sur les mécanismes du pouvoir, je le trouve passionnant dans sa représentation des jeux politiques pour arriver à ses fins et la manière dont Spielberg joue avec la figure de Lincoln.

Bah c'est ce que je commence à me dire, que je suis passé à côté à sa sortie en ayant des attentes un peu trop démesurées. Chaque fois que je tombe sur des extraits ça me donne envie de retenter, donc c'est plutôt bon signe.

[Mark Chopper]

Du coup vu ta phrase et la carrière de Matthew, j'en conclus que finalement c'était pas le jackpot ?

Les adaptations de Grisham sont vite passées de mode. Et puis il se faisait voler la vedette dans ce film par à peu près tout le monde.

[lvri]

Revisionnage à la hausse, ça laisse de l’espoir pour Lincoln 

C'est très bien Lincoln, tu devrais vraiment le revoir à la hausse je pense. Le film a un peu pâti des attentes qu'on pouvait en avoir (quelque chose de plus "épique" sans doute), mais c'est un solide film bavard et intelligent sur les mécanismes du pouvoir, je le trouve passionnant dans sa représentation des jeux politiques pour arriver à ses fins et la manière dont Spielberg joue avec la figure de Lincoln.

Perso, j'avais été très étonné des retours mitigés, voire négatifs sur ce film. Il est clairement bavard, mais pas dans le mauvais sens du terme. Encore un film que j'ai envie de revoir... (Va falloir que je commande quelques nouvelles vies pour voir et revoir tous les films que j'ai en tête....).

[Mark Chopper]

Fais une année blanche

[lvri]

Encore un truc qui va me poursuivre...

[Dunandan]

En même temps c'est bien parti pour que 2021 soit une année blanche, autant en profiter.

[Alegas]

Valmont de Miloš Forman
(1989)

J’étais pas spécialement chaud à la base, n’ayant jamais été convaincu pour les adaptations du bouquin de Pierre Choderlos de Laclos, mais avec Forman à la barre je me suis dit que ça valait quand même le coup d’essayer, et bien m’en a pris car c’est clairement la meilleure adaptation que j’ai pu voir à ce jour. Pour la petite histoire, c’est un film sur lequel comptaient beaucoup Forman et Claude Berri, qui le produisait, et malheureusement la production sera tellement longue que le film finira par sortir quelques mois après l’adaptation de Frears, qui coûta moins cher et fit plus d’entrées. Résultat : un flop financier immense qui mit en péril la carrière des deux hommes à l'époque. Pourtant, ça s’avère bien meilleur que le Frears sur quasiment chaque aspect : l’adaptation est moins littéraire et se permet plus de libertés bienvenues, le casting est plus réussi, et enfin il y a une vraie mise en scène, là où c’était quand même bien plan-plan chez Frears.

Non pas que chez Forman ce soit de la réalisation de haute volée, mais au moins il y a du sens dans les plans ou dans des idées de scène, le meilleur exemple étant à mon sens la séquence où Valmont danse successivement avec plusieurs partenaires, et où la façon de danser, le façon de jouer, et les choix de cadre, vont signifier le degré d’attirance du personnage pour chacune des femmes qui l’accompagnent. Et puis comme dit plus haut, le casting enterre à mon sens celui du Frears : non pas que chez ce dernier ça jouait mal, loin de là (enfin sauf pour Keanu Reeves qui n’était pas du tout convaincant ), mais j’ai toujours eu du mal à voir en Malkovich un homme irrésistible, tout comme il était impossible pour moi de voir en Glenn Close une femme fatale. Ici, que ce soit Colin Firth, Annette Bening, Fairuza Balk ou Henry Thomas, tout le monde s’accorde très bien avec son personnage, et le seul bémol que j’aurais serait Meg Tilly en Madame de Tourvel qui n’a pas à mon sens la beauté nécessaire pour rendre l’obsession de Valmont crédible (pour le coup, ça marchait mieux chez Frears avec Pfeiffer).

Enfin, ça fait du bien de voir une adaptation qui se permet autant de libertés avec le matériau original : l’intrigue est la même, mais pas mal de scènes divergent avec ce que je me souviens du livre, notamment dans quelques détails érotiques (de mémoire, il y avait un passage où Valmont écrivait une lettre sur le cul de Cécile, maintenant il lui bouffe le cul pendant qu’elle écrit la lettre ), et puis toute la fin est repensée et pour le coup je trouve ça pas mal du tout, notamment dans le fait que la tragédie de Merteuil ne soit pas forcément la divulgation des lettres, mais bien la perte de celui qui était son rival et probablement ce qui se rapprochait le plus de l’amour de sa vie. Dommage que le film ait connu un tel sort à sa sortie, et a été en partie oublié à cause du Frears, ce Forman aurait vraiment mérité un autre destin que celui-là (même si j’ai l’impression que le temps a réparé un peu les choses depuis).

7/10