[Velvet] Mes bafouilles lunaires 2016

Modérateur: Dunandan

Andreï Roublev - 8/10

Messagepar Velvet » Ven 22 Juil 2016, 14:14

Andrei Roublev d'Andrei Tarkovski (1966) - 8/10


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Alors que le monde s’écharpe dans des travers irrévocables, Andrei Roublev médite sur sa compétence à pouvoir ériger une quelconque retranscription du monde dans lequel il vit. Sa mission : peindre le jugement dernier. De prime abord, la lecture du titre du film est aussi intéressante que purement anecdotique : Andrei Roublev. Mais le film parle d’Andrei. Mais duquel ? Roublev ou Tarkovski. Le visionnage du film, monumental et étouffant, laisse songeur sur la place que se donne le réalisateur dans l’entièreté de son œuvre. Car aussi visible que cela puisse paraître, Andrei Tarkovski, sa réalisation, son regard tout en recul sur les phénomènes qui gravitent autour du moine, ne laissent aucun doute sur l'identification de l’auteur à l’artiste.

L’œuvre qui se présente à nous, n’est en rien un biopic comme un autre : Tarkovski ne dévoilera qu’à la toute fin, les prouesses picturales du peintre. Ce n’est pas un film hommage mais un film monstre qui se pose une question que tout créateur se pose au moins une fois dans sa vie : où et comment trouver l’inspiration ? Dans une Russie moyenâgeuse, qui perd ses valeurs aux yeux du moine qu’est Andrei Roublev, Tarkovski dilate son récit en plusieurs chapitres, qui marquent à chaque fois, une étape dans l’introspection du peintre dans sa quête d’éclaircis sur un monde qui semble si éloigné de lui et de ses préceptes : telle une montgolfière qui prendrait son envol, l’humain qui se rapproche des cieux et qui voit ses rêves s’écraser au sol comme s’effacerait la croyance en l’Homme.

Ce chapitrage est un procédé narratif qui permet à l’histoire d’avoir plusieurs films dans le film, de ne pas tomber dans une linéarité inféconde, passant alors de l’épique à l’errance, du questionnement au passage à l’acte, de l’hypnotique à la dramaturgie, comme si un nouvel horizon s’émancipait : un chapitre équivaut à une question pour une réponse, un regard pour une émotion. De l’attaque meurtrière des Tatars, de la fondation d’une cloche, d’un doute sur le bienfondé d’une création jusqu’à la tentation d’une fête païenne, le voyage initiatique d’Andrei Roublev n’est pas de tout repos et mettra sa conscience en l’Homme et en l’humain à rude épreuve. Tout comme l’assiduité du spectateur. Car Andrei Roublev est une œuvre exigeante, longue, concentrant son rythme (ou non rythme) sur une respiration opaque où le contemplatif se fait rare. Andrei Tarkovski propulse son film dans un spectre où la chair prend forme, où l’odeur de la boue se fait saisissante, où la misère s’enclave dans les esprits.

Une opposition de l’image assez singulière, filmant de près la matière alors qu’elle intègre ses protagonistes dans un environnement laconique, humble et presque vide de toute flamboyance, loin d’un décorum surchargé. Une œuvre de la sensation qui se marie parfaitement avec la prouesse visuelle qui se dessine devant nos yeux. Car si L’enfance d’Ivan n’était que le premier échantillon du génie d’Andrei Tarkovski, ce dernier semble déterminé à dépasser les limites de la perfection esthétique : travellings vertigineux, paysages expressionnistes, jeux de lumière fuyants, montage et capacité à manipuler le temps. Et la magie opère à de nombreuses reprises : lors de ce plan circulaire dans cette grange qui abrite la misère de la pluie et de l’oppression, cette séquence de festivité païenne où la forêt se voit remplir d’hommes et femmes nus dans un écrin lumineux assez prodigieux, les plans séquences chorégraphiques fondation d’une cloche. Mais Andrei Roublev est une œuvre aussi esthétique que philosophique.

Car si le réalisateur cherche la grâce absolue, il en est de même pour son personnage principal. Même si les questionnements qui jalonnent certains longs dialogues touchent du doigt le spirituel (sans être prêchi prêcha), il est beaucoup question de l’humain et de comment l’environnement va égratigner les certitudes du moine : la honte face à sa lâcheté, sa culpabilité de meurtrier, son silence face à l’avidité de l’autre, de sa croyance en lui-même, et de la volonté de l’artiste pour faire de l’art une arme pacifique contre l’ignorance et l’autoritarisme. Mais c’est dans l’un de ses derniers actes que Tarkovski se veut plus foisonnant dans sa description de l’art (la fondation de la cloche où il est difficile de ne pas penser à Ivan avec cet enfant-homme) et des sacrifices individuels et collectifs qui entourent la constitution de l’ouvrage artistique. Au lieu faire de l’art pour de l’art, pour le profit et haine de l’autre, Andrei Roublev se veut plus humaniste que Théophane : où un don de Dieu est la profession de foi en l’humain.
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Solaris (1972) - 8/10

Messagepar Velvet » Sam 23 Juil 2016, 13:41

Solaris de Andrei Tarkovski (1972) - 8/10


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La science-fiction. Un vaste sujet, un genre aisément identifiable mais difficilement déchiffrable. C’est alors qu’Andrei Tarkovski décide de s’adonner à la tâche. Sauf que l’auteur russe, avec Solaris, met en image sa propre idée de la science-fiction. Première évolution dans le cinéma de Tarkovski, c’est l’apparition de la couleur : ce qui n’était pas le cas avec L’enfance d’Ivan et Andrei Roublev (sauf à la fin). Mais est-ce une véritable révolution ? Cela ne saute pas aux yeux car le cinéma du réalisateur soviétique n’a pas forcément vocation à s’exprimer par la symbolique de la couleur. Chez lui, la couleur n’est pas vectrice à émotion ou à interprétation sensitive.

Même si le réalisateur jouera parfois avec le contraste, avec la luminosité, le passage de la couleur au noir et blanc, la frontière étroite entre le rêve ou la réalité, Andrei Tarkovski reste proche de ses thématiques visuelles et narratives précédentes. S’esquisse alors un naturalisme obsédant qui fera de Solaris est une ode à la nature face à sa proximité avec la conscience humaine. Le début du film est symptomatique de cette volonté d’intégrer l’humain dans un environnement connu, familier de lui-même : un étang, des algues, une faune tempérée qui ferait office de temple bienveillant. Le philosophe Kris n’est pas encore parti pour Solaris. La Terre reste un espace apaisant. Qu’on se le dise, Andrei Tarkovski dans Solaris, n’utilise jamais les codes de la science-fiction pour créer un espace lunaire ou stellaire qui affranchirait la notion visuelle que l’imagerie collective peut avoir de l’espace.

Même si le film nous emmènera sur Solaris, une planète recouverte d’un océan infini et sur la station orbitale qui gît sur ce dernier, Tarkovski se fait très succinct dans la caractérisation de son décorum : des couloirs spatiaux technologiques, une salle de séjour, une chambre blanche et vaguement moderne, un code vestimentaire terrestre. Ni plus ni moins à quelques exceptions près. Un philosophe est amené à se rendre sur Solaris pour continuer ses recherches et voir ce qu’il reste d’un équipage désarçonné. Solaris ne joue pas la carte du modernisme. Que ça soit dans la forme et dans le fond, Solaris s’avère alors la contre proposition cinématographique parfaite au 2001 de Stanley Kubrick. Et c’est peu de le dire.

Dans la folie douce, l’aliénation contagieuse qui s’instaure sur la station, obligeant même l’un des scientifiques de l’équipage à se suicider, Andrei Tarkovski va motiver son empreinte d’auteur sur une œuvre aux multiples questionnements. Afin d’assimiler le style au sujet, le papier à la plume, Andrei Tarkovski va s’épancher esthétiquement, continuer la veine presque monacale de ses plans jusqu’à un point encore jamais défini dans son cinéma : l’évanescence et le contemplatif. Alors que le silence était de mise dans ses deux précédents films, Solaris joue sur l’hypnotisation, sur sa bande son et son importance : sa capacité à immiscer l’angoisse de l’inconnu, la retenue de la tension narrative. Le mystère. La barrière entre ce qu’on le voit et ce qu’on ne décèle pas fait toute la sève d’une œuvre qui est avant tout : une recherche de l’homme par l’homme.

Andrei Tarkovski trouve l’osmose parfaite encore la rigueur formelle de son cadre et la pulsation sonore par la contemplation comme le témoigne cette somptueuse scène d’autoroute tokyoïte. C’est qui est incroyable dans les premières œuvres du réalisateur, c’est de ne jamais tomber dans la surenchère esthétique. Rendre le beauté, humble et reconnaissable à tous n’est pas donné à tout le monde. Solaris marche alors dans les pas d’Andrei Roublev, dans son aptitude à étirer son récit sans jamais le rendre redondant, avec ses questions sur l’homme et sa connexion à quelque chose qui le dépasse, la croyance et son miroir qu’est le savoir, l’expérimentation à la sensation.

Car au final comment définir simplement Solaris : un homme qui voit le fantôme de sa femme resurgir. Mais non pas dans une hallucination mais une matérialité confondante et visible. Alors qu’ils sont presque abandonnés à eux-mêmes sur une planète difficile à décoder, la nature de leur recherche semble se concentrer sur eux-mêmes montrant aussi l’impuissance de l’Homme à comprendre tout ce qui l’entoure alors qu’il a encore beaucoup de mal à se définir par rapport à son environnement. La science-fiction s’efface au profit de l’humain, l’indéfiniment grand à l’indéfiniment petit, le savoir au profit de l’amour. La conscience n’est pas un ectoplasme comme les autres, et l’amour une donnée à la définition obscure. D’ailleurs, on sent dans Interstellar, une vraie influence de Solaris : la place de l’amour dans notre vision de la science et dans l’expérimentation purement objective qu’est la conscience et l’envie de s’affranchir.
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Re: [Velvet] Mes bafouilles lunaires 2016

Messagepar Velvet » Lun 25 Juil 2016, 11:01

Dans la suite de ma rétro Tarko', ma réécriture de sa quatrième oeuvre: Le Miroir
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Stalker - 8,5/10

Messagepar Velvet » Mar 26 Juil 2016, 15:50

Stalker d'Andrei Tarkovski (1979) - 8,5/10


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Depuis le début de sa carrière l’Homme est au cœur du cinéma d’Andrei Tarkovski : sa conscience, ses croyances, ses doutes, ses souvenirs. Avec Stalker Andrei Tarkovski s’immisce dans ce qu’il y a de plus troublant : le désir. Alors qu’il s’était déjà essayé avec Solaris à la science-fiction, le cinéaste réitère l’expérience avec Stalker : toujours avec la même ambition. Même s’il reste bien éloigné des carcans habituels, la science-fiction qui réapparaît dans cette œuvre est adéquate au cinéma d’Andrei Tarkovski : imaginer un monde mystérieux pour mieux remodeler sa vision du réel. La création de cet univers lui permet aussi de créer un espace-temps singulier, opaque et songeur qui s’alimente par la stratification de ses plans et le changement de couleur qui s’opère dans sa description des lieux : passer d’une réalité à un rêve, d’une conscience à une autre. Tout comme Solaris, Stalker emmène ses personnages dans un lieu qui interroge beaucoup l’humain. Le fait fantasmer sur ses possibilités, ses opportunités cachées. Les « Stalker » sont ces passeurs qui amènent des « malheureux » dans une Zone aussi mystique que dangereuse, que l’on dit sacrée, radioactive ou crée par une météorite : une zone qui réalise le désir des personnes qui y pénètrent. Un temple qui touche au sacré. Ou de la légende urbaine.

Andrei Tarkovski filme alors le périple d’un écrivain en manque d’inspiration, d’un physicien aux motivations troubles et leur « Stalker », guide spirituel habité par le respect inébranlable de la Zone. Un récit qui prend racine dans les profondeurs de l’humain et qui deviendra le portait fracturé de trois êtres aux certitudes mises en difficulté par leur orgueil, leur avidité ou leur souffrance quotidienne. Se rendre jusqu’à cette Zone n’est pas une chose simple à faire ; les autorités locales interdisent l’accès de cet antre car elles en ont trop peur. Le film d’Andrei Tarkovski débute dans cette perspective narrative, qui dans ses trente premières minutes prend des allures de films d’évasion. Alors que Solaris et Le Miroir avait mis la couleur au gout du jour dans le cinéma d’Andrei Tarkovski, c’est un sépia boueux qui tapisse les murs de Stalker. Et c’est foudroyant de beauté, donnant alors un cachet post apocalyptique à ce monde industriel en perdition : gorgé d’eau, pollué d’une fumée mutante, de bâtiment délabré par la misère. On retrouve alors chez Tarkovski cette capacité à exposer la perdition humaine dans ce qu’il y a de plus moribond, de plus cruel. C’est dans ces ruelles exiguës que nos trois protagonistes vont devoir éviter de se faire prendre par les patrouilles de police pour accéder à la Zone.

Mais si la tension se fait ressentir par le mystère qui entoure cette Zone, par le montage qui quadrille cette poursuite à l’aveugle, une chose à évoluer chez le réalisateur : une logique sensitive rencontrée avec Solaris. La contemplation mais dans un degré encore plus latent. Dès ses premiers plans, cette vue qui observe dormir la famille du Stalker, les mouvements de caméra sont moins amples, plus lents et rigoureux dans leur intonation. Comme si la contemplation avait laissé place à une ossature encore plus indicible : la méditation, comme si tout se déroulait dans la tête des personnages.

C’est prégnant, étouffant mais majestueux : comme lors de cette sublime séquence sur la draisine, qui ramène à la scène de Tokyo dans Le Miroir : ce moment d’apaisement et de doute avant d’arriver au lieu propice. Et c’est lorsque les protagonistes parviennent à atteindre leur but, se rendre à la Zone, qu’un tout autre film commence. Déjà par le biais de la couleur qui revient à l’écran, comme pour sacraliser la richesse naturaliste de la Zone, lieu qui selon le Stalker est le dernier endroit au monde qui permet de retrouver l’espoir. La végétation qui reprend ses droits sur l’industrialisation. Pour accéder à la fameuse chambre qui réalise les désirs de ceux qui pénètrent en son sein, le cheminement ne va pas se faire sans obstacles, aussi labyrinthiques que la mémoire d’Aliocha dans Le Miroir, comblé de pièges selon le « Stalker ». Pièges qu’on ne verra jamais, pour fausser les pistes, alimentant alors les doutes sur sa réalité divine et sur la dimension réelle de la puissance mystique de cette Zone. Quelque de chose de Supérieur y prend refuge. Ou pas. Et si tout n’était qu’un mirage, un espace aliénant qui n’est autre que la conscience humaine, le soi intérieur. Comme l’océan infini de Solaris.

Agencé comme une sorte de huis clos, dans ce personnage mouvant qu’est la Zone, cette deuxième partie de film est surtout pour Andrei Tarkovski un moyen de guetter ses trois protagonistes émettre des doutes sur leur condition, leur volonté et leurs désirs. Leur place dans le monde. Qu’est-ce que je souhaite réellement ? Pourquoi voudrais-je cela ? Suis-je celui que je décris ? A aucun moment du film les personnages sont nommés : leur présence s’efface au profit du leur concept : l’écrivain pour l’art, le professeur pour la science et le Stalker pour la foi. Ces trois notions vont alors se confronter, se questionner, se diluer dans des monologues aussi éreintants que fabuleux, faisant de Stalker un véritable récit initiatique sur la condition humaine et la remise en question de ses valeurs. Au retour de la Zone, le quotidien végète de nouveau, l'émotion se fait terrassante et la foi du Stalker est déchue devant le manque de croyance de l’humanité qui l’entoure. Et Andrei Tarkovski utilise le même processus impressionnant qu’avec Solaris : mettre l’Homme dans un environnement qui dépasse le cadre de ses connaissances pour mieux le faire réfléchir sur soi-même.
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Re: [Velvet] Mes bafouilles lunaires 2016

Messagepar Mr Jack » Mar 26 Juil 2016, 21:33

J'ai vu ma vie défiler devant ce film. Une expérience vraiment atroce.
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Re: [Velvet] Mes bafouilles lunaires 2016

Messagepar Mark Chopper » Mar 26 Juil 2016, 21:37

La pire expérience cinématographique de ma vie. Vraiment.

J'ai cru mourir d'ennui trois fois.
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Re: [Velvet] Mes bafouilles lunaires 2016

Messagepar Mr Jack » Mar 26 Juil 2016, 21:45

Pareil, en premier degré total, sans ironie. Je comprendrais jamais la lecture que certains ont sur ce film. Ca m'arrive de rester imperméable à un film, de pas réussir à m'attacher aux persos, aux thèmes, à l'humour...Parfois je trouve un film con, vide, dénué de sens, prétentieux, surcoté, agaçant, morbide, glauque, sans intérêt. Mais toujours, je me dis que c'est mon filtre personnel, c'est mon regard rempli de mes traumas, de mes peurs et de mes souvenirs, qui parfois font barrage à certains films voir certains genres (tout ce qui est ofni ou gore j'ai du mal à m'en approcher vu que je ne veux pas être bousculé de cette façon en regardant un film). Mais Stalker c'est le seul film qui m'a fait cet effet d'ennui morbide. Juste eu l'impression d'être tombé dans un puits ou d'être les yeux fixés devant un truc avançant avec l'immobilité d'un mort. Un film zombie qui remet en question la notion du temps.
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Re: [Velvet] Mes bafouilles lunaires 2016

Messagepar Mark Chopper » Mar 26 Juil 2016, 22:06

Juste eu l'impression d'être tombé dans un puits ou d'être les yeux fixés devant un truc avançant avec l'immobilité d'un mort


C'est bien formulé.

Du coup, je n'ai jamais tenté d'autres films du gars et ça n'arrivera jamais.
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Re: [Velvet] Mes bafouilles lunaires 2016

Messagepar Val » Mar 26 Juil 2016, 22:30

L'Enfance d'Ivan peut éventuellement plaire à ceux qui n'aiment pas Tarkovski.
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Re: [Velvet] Mes bafouilles lunaires 2016

Messagepar Velvet » Mer 27 Juil 2016, 08:17

L'enfance d'Ivan c'est vraiment accessible. Court, bien dialogué et Tarkovski laisse très peu de moments de creux. Et puis formellement c'est à tomber. Solaris, aussi, à moindre mesure, c'est possible si l'on se laisse porter par l'aspect contemplatif. Vraiment. Pour le reste de sa filmographie, je conçois qu'on puisse vite décrocher mais c'est une vision purement personnelle: j'ai du mal à m'emmerder au cinéma. Surtout devant ce genre de films où il y a toujours un détail à observer. Je rentre facilement dedans. Sans doute que c'est plus de la fascination que du plaisir en tant que tel (mais j'en prends aussi). Mais bon, vous avez vu Stalker, ne tentez jamais Nostalghia où ça sera le suicide. Car niveau lenteur, ça pose ses couilles. :lol:
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Nostalghia - 9/10

Messagepar Velvet » Mer 27 Juil 2016, 15:21

Nostalghia d'Andrei Tarkovski (1983) - 9/10


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Dès l’ouverture de Nostalghia Andrei Tarkovski présente deux mondes disparates : la campagne russe et son somptueux sépia face aux luxuriantes prairies de l'Italie. Une opposition forte de sens, qui accentue le contraste entre les divergences du corps et de l’esprit d’Andrei. Dans Nostalghia, il n’est que l’ombre de lui-même. La beauté des décors, la pâleur des paroles l’écœurent au plus haut point. Ce ne sont pas des symptômes mais une véritable maladie.Celle du cœur, de l’âme qui divague et sombre dans le désespoir. D’un homme, d’un réalisateur en plein marasme qui doute du bien fondé de tout cet appareillage, de cette envie d’échapper à la censure, les désillusions de cet art qui demande des sacrifices émotionnels désastreux quitte à perdre les siens. De tout cet investissement qui se dérobe devant ses yeux.

Sa flamme a disparu, éteinte par la nostalgie. Un virus qui le consume à petit feu. Pourquoi tant d’efforts ? La définition même de son travail se dissipe de ses cendres. Car oui, Andrei Tarkovski voit en son art une énergie vectrice d’une spiritualité ineffable presque disparue dans le monde technologique d'aujourd'hui et son détachement inéluctable à la nature. D’ailleurs si Andrei Tarkovski nomme son double Andrei, il n’y a pas de coïncidence : le réalisateur est le personnage de ce film. En tout cas, par les émotions. Le réalisateur a toujours mis une part de lui dans ses films : son mimétisme artistique avec Andrei Roublev, ses résonnances mémorielles avec Le Miroir et ses concomitances spirituelles avec le Stalker. Mais cette fois ci l’identification se veut fantomatique voire mortifère. Il est Andrei : un homme sur la brèche. Chaque plan discerne cette perdition, ce mal être nonchalant, cette absence soudaine de continuer. Andrei Tarkovski quitte la Russie et tourne alors en Italie. Mais son pays natal lui manque. Son corps végète en Italie et son cœur diverge vers la Russie.

Se noue alors une disparité qui ne peut s’évacuer par le temps, ni par l’espace. Le temps a toujours été une thématique importante du réalisateur : saisir le moment, l’opportunité du rythme et d’une émotion. Mais Nostalghia apparait comme insensible à cette construction : le temps n’a plus d’importance, les plans immobiles se figent, la lenteur se fait encore plus tranchante, plus défaillante dans son étirement. A aucun moment Nostalghia est régi par la volonté de suivre un récit stable. La dynamique est exploratoire et est faite de rencontres qui fragmentent la montée vers une paix intérieure. Andrei Tarkovski radicalise sa narration et s’inscrit dans les pérégrinations de l’incommunicabilité de son personnage : en ce sens, pour moi, Nostalghia est à Tarkovski ce qu’est Knight of Cups à Malick, un chemin de croix qui exhorte la fluidité de son montage et la magnificence de ses plans par la représentation d’une émotion spectrale, repoussant alors les limites émotionnelles de son cinéma. L’expression d’un cinéaste et la retranscription d’une poésie intérieure qui vire à l’hémorragie. Un choix cornélien car très difficile à filmer. Mais fascinant d’un bout à l’autre.

La détresse s’épuise d’elle-même dans des ressorts narratifs et visuels qui virent à l’introspection. L’univers figuratif n’est qu’un brouillard qui s’étiole dans l’esprit d’Andrei. Lors d’une discussion avec Eugenia, son interprète, Andrei voit la communication se muer par l'abolition des frontières : thème exploré de façon similaire dans les précédents films de Tarkovski, Solaris et Stalker. Cependant, alors que Kris ou le Stalker coexistaient dans un domaine métaphysique entre la réalité et la conscience, Andrei est profondément conscient de sa séparation physique avec sa lointaine patrie bien-aimée qui consomme ses pensées et son désir inné de trouver l'unité intérieur en Italie. L’ironie de la chose veut que les actions deviennent inverses à ses propres réflexions sur l'abolition des frontières au vue de la création d’obstacles artificiels qui le poussent à s'isoler de sa réalité physique.

Alors qu’il parcoure l’Italie pour retracer la vie d’un musicien russe, le fatalisme guide les pas plombés de celui qui ne semble pas prendre la mesure de ce qui l’entoure sachant que le compositeur russe en question, Pavel Sosnovski, s’est lui-même suicidé suite à son amour à une esclave. Andrei Tarkovski, comme dans Stalker, change de densité chromatique lors des songes et achemine un sentiment omniprésent de mélancolie : Andrei devient profondément aliénée par le souvenir de sa belle compagne Eugenia, sa famille, son pays, et même lui-même. Ces songes qui semblent si lointains, un monde évaporé sous ses pieds. Andrei Tarkovski est assailli d’images comme l’était Ivan, garçon de son premier film : il veut être libre mais est emprisonné par ses souvenirs.

Alors qu’Eugenia tente de l'engager dans une conversation sur Arseni Tarkovski (le père de Tarkovski) et la poésie, Andrei rejette le livre, et éructe par le raisonnement que le simple fait de la traduction des poèmes fait perdre les nuances de la langue maternelle, montrant l’insociabilité d’Andrei. Même sein nu, enviable dans sa féminité la plus pure (divine Domiziana Giordano), Andrei la délaisse sans dire un mot : scène dans laquelle elle livre un monologue désabusé qui suggère l’antipathie et le dégoût qu’elle a pour la lâcheté d’Andrei. Révélateur de son état psychologique, la seule personne qui fait susciter l’intérêt d’Andrei est Domenico un fou qui aurait enfermé sa famille pendant sept ans parce qu'il pensait que l'apocalypse allait venir.

Peut-être le film le plus opaque de Tarkovski, Nostalghia est néanmoins l'un de ses plus personnels. Non seulement les propres sentiments de Tarkovski au sujet de quitter la Russie et sa famille se reflète dans Andrei, mais un autre côté de lui se symbolise dans Domenico. Lorsque Andrei visite la maison de Domenico, un espace bombardé par la boue et l’eau (récurrence chez Tarkovski), Domenico prend une bouteille d'huile d'olive, verse deux gouttes dans sa main, et énonce que l’addition de deux gouttes forme une seule goutte. Andrei et Domenico sont les deux faces de la même médaille : l'artiste et le fou se comprennent parce qu'ils font partie de la même personne.

En substance, ce voyage est un pèlerinage personnel pour trouver l'unité en lui-même face à cet abandon affectif, la perte de l'identité culturelle, l'aliénation et la nécessité artistique. La scène finale étonnante montre Andrei au premier plan et sa coexistence éthérée entre les deux mondes : comme la ferme russe devient encapsulé dans les parois arquées d'une cathédrale romaine. Il est à la fois idéalisé que les couleurs douces du paysage russe imprègnent maintenant les rues italiennes. Où l’esprit et le corps ne font plus qu’un par l’intervention du feu sacré.
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Re: [Velvet] Mes bafouilles lunaires 2016

Messagepar Dunandan » Mer 27 Juil 2016, 15:38

Mark Chopper a écrit:
Juste eu l'impression d'être tombé dans un puits ou d'être les yeux fixés devant un truc avançant avec l'immobilité d'un mort


C'est bien formulé.

Du coup, je n'ai jamais tenté d'autres films du gars et ça n'arrivera jamais.

Je suis tout à fait d'accord avec ce commentaire, et pour le seul film de Tarkovski que j'ai vu, Andrei Roublev, je trouve que ça collait bien avec la thématique mystico-religieuse. Pour ma part, j'avais l'impression d’être dans un sous-marin dans lequel je perdais tous mes repères :mrgreen:.
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Sacrifice (Le) - 8,5/10

Messagepar Velvet » Mar 02 Aoû 2016, 15:06

Le Sacrifice d'Andrei Tarkovski (1986) - 8,5/10


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La boucle est bouclée. Le Sacrifice se termine comme avait commencé L’Enfance d’Ivan : l’innocence de l’humanité vibrant autour de la simplicité du décor naturaliste. Sachant que ce film est le dernier du réalisateur, qui mourut peu de temps après, Le Sacrifice prend une tonalité encore plus dramatique. Alors que Nostalghia avait retranscrit le mal être profond d’Andrei Tarkovski, cette dernière œuvre continue cette remise en question : celle de toute une vie. Isolé sur une île agencée par de vaste plaine, un ancien comédien (Alexandre) commence à sentir le poids du monde sur ces épaules. Son regard est éteint de toute lumière. C’est un doux euphémisme : la torpeur est présente et ne demande qu’à éclore. Le décor, minimaliste et apaisant par son creux silence, n’est qu’un subterfuge assez malin, un enclos vide de toute industrialisation laissant place à l’introspection. Cela a toujours été le cas mais le christianisme est l’épicentre du dernier long métrage d’Andrei Tarkovski : le don de soi face au matérialisme et le consumérisme qui abrogent la morale de l’homme et qui le contraint à tomber dans une guerre qui pourrait éteindre l’Humanité.

Alors qu’on pourrait suivre ce discours d’un œil distrait par le prosélytisme un peu bigot qui suit la spiritualité d’Alexandre qui fait le serment de tout perdre si l’apocalypse nucléaire disparait, Andrei Tarkovski ne se veut jamais ostentatoire dans ses tirades existentialistes et fait preuve d’une humilité touchante dans la crise de son personnage. Sauver l’humanité contre la perte de tout ce que sa vie absconde a pu lui offrir. Dans la misanthropie qui caractérise parfois son cinéma, Andrei Tarkovski égratigne la sphère sociale, le socle communautaire d’une société qui se meure dans des mœurs individualistes et moribondes. Pour se faire, le réalisateur englobe son petit monde (Alexandre, sa femme, un ami etc…) dans la maison qui se trouve au centre de l’ilot pour schématiser les tensions qui lient les différents protagonistes entre eux : dans une caractérisation qui vire parfois au burlesque théâtral par le jeu maniéré et offusqué de certains acteurs (Valérie Mairesse).

Mais la solution se trouve peut-être ailleurs : la folie, la démence, comme celle de Domenico (Nostalghia) ou l’idiotie gentillette d’Otto ou la prétendue sorcellerie de Maria, la bonne d’Alexandre. Derrière cette insociabilité se cache une innocence à la pureté inébranlable. Chose magnifique chez Tarkovski : cette volonté de filmer et donner corps et grâce à ceux à qui on ne prête aucune intention. Le Sacrifice continue à radicaliser le discours du réalisateur, proche notamment de son personnage du Stalker, et l’émiettement de ses plans, qui s’allongent encore plus dans une économie d’effets intransigeante. Certes il est difficile d’atteindre la force picturale d’œuvre comme Stalker ou la construction visuelle monumentale d’Andrei Roublev mais Le Sacrifice est d’une épure impressionnante même si l’on retrouve ses habituelles et sublimes incursions oniriques en noir et blanc. Andrei Tarkovski se détache complétement d’une normalité narrative : seul l’aspiration du temps, cette sensation de perte de soi captive l’essence nouvelle du cinéma du réalisateur russe.

Derrière le soucis d’une caméra qui pose ses valises à travers des plans séquences saisissants, Andrei Tarkovski pousse le vice encore plus loin dans sa réflexion. Cette dernière passe par la symbolique mais aussi par une accumulation parfois grossières et inutiles de monologues philosophiques sur la mort et une humanité qui se détruit à petit feu, faisant perdre au cinéma d’Andrei Tarkovski sa puissance contemplative en voyant le réalisateur privilégier son écriture dialoguiste plutôt que son écriture esthétique. Mais la deuxième partie du film fera mentir cet argument tant la flamboyance visuelle écrasera tout sur son passage par ces ressemblances à « Le Miroir » avec cette lévitation au romantisme fébrile et cet incendie libérateur. Parfois bancal par son interprétation, obscur entre ses lignes, Le Sacrifice se révèle être peut-être le film d’Andrei Tarkovski le plus émouvant où la sobriété n’en est que plus religieuse. Une profession de foi inestimable.
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Film: Sacrifice (Le)
Note: 2/10
Auteur: Alegas

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Dark Knight Rises (The) - 8/10

Messagepar Velvet » Mer 03 Aoû 2016, 14:48

The Dark Knight Rises de Christopher Nolan (2012) - 8/10


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Le chevalier blanc est au centre du renouvellement de Gotham : Harvey Dent est le défunt visage d’une justice qui a repris ses droits dans la lutte contre le crime organisé. Cette ville voit la pègre disparaître grâce à de nouvelles lois et a fait de Batman un bouc émissaire qui ne peut plus remettre le masque. Pour le bien de tous. Mais c’est un mirage, un mensonge : et la recherche de la vérité est au centre des débats qui émanent de The Dark Knight Rises. La vérité, celle qui fera tomber la civilisation. Alors que Batman est « mort », Christopher Nolan va s’intéresser de plus près à la figure qu’est Bruce Wayne.

Et c’est en ce sens que The Dark Knight Rises se rapproche de Batman Begins dans la définition même du Batman, qui passe forcément par la caractérisation de Bruce Wayne. Une dualité schizophrénique à la puissance iconique sublimée. Et inversement. La première chose que Nolan construit, c’est la déconstruction du niveau de vie de Bruce Wayne : comment rester ou redevenir Batman quand la richesse de l’homme qui se cache sous le masque n’existe plus. Sa force physique non plus. Celui qui a l’argent est-il celui qui a le pouvoir ? Dans cette perspective, le réalisateur américain matérialise ses enjeux dans un affect plus actuel et véritable que ceux qui jalonnaient son prédécesseur The Dark Knight, le chevalier noir. Le deuxième opus de la trilogie est certes ancré dans un univers qui se veut réaliste mais théorise au maximum son intrigue pour faire de ses personnages des vecteurs à thématiques : comme la justice et l’intérêt général de la démocratie face à la confusion de chaos. Cette fois, Christopher Nolan décide de délaisser le costume et réfléchit sur la culpabilité d’un homme qui a vu des gens mourir autour de lui pour une cause héroïque parfois délétère : que ça soit ses parents ou Rachel Dawes.

D’ailleurs Batman/Bruce Wayne le rappellera à de nombreuses reprises à l’inspecteur John Blake: le « déguisement » ne sert pas de protection de son identité mais à la sécurité de ses proches. Chose qui alimente chaque plan, chaque discours du super héros : la conséquence de ses actes sur ceux qui l’entourent. Mais alors que Gotham pensait s’être débarrassé du mal absolu, c’est dans les bas fonds de ses égouts que va provenir la terreur. Dans TDK, le joker prenait le pouls de l’immatérialité presque philosophique de l’histoire : la marque d’un terrorisme théorique et indétectable. Le « méchant » est en total cohérence avec son sujet : le fond et la forme. Pour TDKR, c’est la même chose, Nolan reprend cette même volonté d’identification : Bane, terroriste contre le système et meurtrier de masse, est certes moins fort que le Joker quant à son charisme et sa profondeur mais est un mercenaire à la réalité presque palpable entraîné dans la dégringolade de la machine financière, comme lors de son arrivée terriblement iconique lorsqu’il s’attaque à la bourse.

TDK était volatile et évanescent alors que TDKR joue plus la carte de l’iconisation et de la puissance corporelle notamment par les combats à mains nus entre Batman et Bane dont les coups résonnent encore. Et voir Bane combattre le marché financier, symbole des inégalités sociales, faire à Bruce Wayne, richissime milliardaire qui perdra tout, est une dualité qui permet à Nolan de continuer à définir l’entièreté du combat que mène Bruce Wayne sans oublier de le mettre face à sa peur, sa culpabilité. Cette dichotomie est parfaitement mise en place par l’habituel harmonie du montage des films de Christopher Nolan qui prend les allures de film choral : permettant alors à chaque personnage de s’inscrire dans le décorum et un espace-temps bien délimité. Il est clair que TDKR parait moins ambitieux dans les idées qu’il brasse avec son opposition riche/pauvre, bien/mal mais il ne perd pas son souffle qui fait office de qualité, cette magie Nolanienne avec ce sens épique du suspense accoudée à cette musique lancinante et chevaleresque de Hans Zimmer. Car même si TDKR est prévisible, avec sa fin qu’on envisageait tous, cela n’empêche pas l’œuvre d’être d’une force centrifuge impressionnante dans sa montée en tension, dans sa capacité à faire cohabiter la trilogie dans un seul film tout en ayant sa propre personnalité.

Parfois en trop plein, TDKR n’en reste pas moins un divertissement qui est d’une cohérence impérissable malgré ses gros raccourcis et qui dévoile une caractéristique peu vue chez Nolan auparavant et qu’on détectera encore plus dans Interstellar : l’apparition de l’émotion, cette écriture en proie aux doutes, moins sérieuse ou théorique mais plus introspective comme durant ces moments déchirants entre Bruce et Alfred. Mais si la trilogie de Nolan s’acharne à vouloir mettre des mots sur les velléités de Batman, elle crée également un univers monde qui sont les causes des conséquences des super héros : et c’est ça qui est génial chez Nolan. Il a compris que le film de super héros n’était pas qu’une simple fumisterie mettant en exergue la puissance même de l’homme à la cape. Le film de super héros doit être représenté à travers son environnement, qui lui-même détermine les agissements et les motivations du super héros. Et pour se faire Christopher Nolan décrit Gotham sous les traits de New York : dans TDK le prisme de sa sécurité et la corruption de son système libertaire était au centre de l’intrigue. TDKR, lui, dépeint l’injustice sociale et l’illusion inégalitaire dans lequel la ville s’est enfoncée, qui prend aussi le visage de Catwoman, voleuse et solitaire (superbe et sensuelle Anne Hathaway).

Outre le marché financier, c’est aussi l’armement qui est au cœur de la culpabilité du Batman : des armes entre de mauvaises mains peuvent aliéner le monde et remet donc en cause tout le travail technologique entrepris par Bruce Wayne : l’ironie du sort voudrait que Bane s’arme avec celles créés par Wayne Enterprise d’où le questionnement de la place de l’occident dans la force militaire de ceux qu’il combat. Et c’est pour cela que Batman ne doit plus exister : il doit rester une statue pour ses concitoyens et devenir une idée, un exemple, un mythe qui engendre une nouvelle génération plus apte à faire respecter la loi dans des règles que Batman/Bruce Wayne n’a pas pu respecter. Mais il est difficile de dire si Christopher Nolan enfantera une nouvelle façon d’imaginer la science du super héros. Et quand on regarde ce que devient DC et Marvel, l’héritage a été dilapidé (par lui-même également).
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Re: [Velvet] Mes bafouilles lunaires 2016

Messagepar osorojo » Mer 03 Aoû 2016, 15:08

Tu le défends bien, mais j'en ai un si mauvais souvenir que je me demande si t'as pas vu un director's cut qui serait sorti dans l'ombre :mrgreen:

Et puis, il est toujours bon de rappeller que Cotillard y signe sa plus belle scène :



Je sais, c'est facile, mais ça me fait sourire, en ce moment, je prends ! :mrgreen:
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