[Olrik] (`0´)ノ  映画 2025 !

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Re: [Olrik] (`0´)ノ  映画 2025 !

Messagepar Olrik » Dim 14 Déc 2025, 13:12

lvri a écrit:Visiblement, on est en opposition totale sur le film. Ça rend ta critique d'autant plus intéressante me concernant.

2/10 est pour le moins sévère. Tu devais être fatigué ou de mauvaise humeur quand tu l'as vu.

lvri a écrit:C'est sans conteste un des Kubrick majeur avec lequel j'ai le plus de mal. J'ai toujours une sensation de film qui ne vieillit pas bien.

L'aspect kitsch est souvent cité pour expliquer que le film est très ancré dans une époque, et donc très daté. Je trouve au contraire que le mélange pop/psyché/70's/ musique classique (originale ou passée par les synthétiseurs de Wendy Carlos)/inventivité formelle de Kubrick font du film quelque chose d'unique qui résiste au temps.
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C'est dur d'être un homme : L'oiseau bleu du bonheur - 6/10

Messagepar Olrik » Lun 15 Déc 2025, 16:08

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Tora-san 37
C'est dur d'être un homme : L'Oiseau bleu du bonheur
Yoji Yamada - 1986


Cela devait bien arriver : depuis la création de la saga, pour la première fois une année n’aura vu qu’un seul opus réalisé (contre les deux minimum de rigueur). La raison est probablement à chercher du côté de l’ambitieux Kinema no tenchi – qui fut d’ailleurs proposé aux Oscars pour le meilleur film étranger. Chose amusante, quand Sakura retrouve son frère, elle ne se prive pas de le gronder gentiment, lui disant que ça fait bien un an qu’il n’a pas donné de ses nouvelles.

En tout cas, Tora-san va bien, merci pour lui, et les spectateurs japonais ont dû savourer son retour pour les fêtes de la fin de cette année 1986. L’épisode n’a rien d’exceptionnel, il est même légèrement ronronnant avec cette idylle entre la madone du film (jouée par Etsuko Shihomi, plus habituée à jouer les castagneuses dans les films d’action de la Toei mais, la magie de Yamada aidant, elle se débrouille plutôt bien dans son rôle) et un jeune artiste peintre joué par le rockeur Tsuyoshi Nagabuchi — note de carnet rose : le film est d’ailleurs connu pour avoir été le terreau d’une vraie liaison qui se concrétisa par un mariage l’année suivante.

Ronronnant donc, mais tout de même plaisant, avec un personnage d’amoureux un peu impulsif, joueur d’harmonica à ses heures perdues et utilisant parfois son art pour dessiner des enseignes destinées à des clubs de strip-tease. De son côté Mitsuo continue de grandir, il semble plaire aux filles et, adolescence oblige, ignore sa mère, sa tante et même Akemi quand il les croise dans la rue. Mais finalement, assez peu de choses à se mettre sous la dent, et Tora ne m’a pas semblé apparaître tant que cela à l’écran. En tout cas le script ménage peu de possibilités à Atsumi pour faire briller pleinement son personnage.

Je gage que cette lacune sera réparée lors de l’opus 38 puisqu’il croisera de nouveau un personnage plus âgé que lui. Petit précision : le personnage en question est joué par un certain Toshiro Mifune. Tora-san VS Mifune, j’en transpire déjà d’excitation.
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Re: [Olrik] (`0´)ノ  映画 2025 !

Messagepar Mark Chopper » Lun 15 Déc 2025, 16:21

La saga Zatoichi s'est viandée avec Mifune en guest... Mais pas Tora-san. Et puis Yamada qui filme Hokkaidō... Comment dire ? Le 38 c'est un must.

J'ai prévu de mater Final Take pendant les fêtes sinon.
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Re: [Olrik] (`0´)ノ  映画 2025 !

Messagepar Olrik » Lun 15 Déc 2025, 16:45

Franchement, est-ce qu'il y a eu un seul guest qui ait fait tache dans cette saga ? Ça semble impossible.

Mark Chopper a écrit: J'ai prévu de mater Final Take pendant les fêtes sinon.


+1
Je suis en train de récupérer une belle copie d'Albanie.
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Re: [Olrik] (`0´)ノ  映画 2025 !

Messagepar Mark Chopper » Lun 15 Déc 2025, 17:42

Franchement, est-ce qu'il y a eu un seul guest qui ait fait tache dans cette saga ? Ça semble impossible.


Effectivement. Pour citer juste les plus grands (les icônes même), Yamada a réussi son coup avec Takashi Shimura, Ayako Wakao, Machiko Kyō, Toshiro Mifune...

Il fallait le faire.
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Satyricon - 6/10

Messagepar Olrik » Mer 17 Déc 2025, 18:49

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Fellini Satyricon
Federico Fellini - 1969


Il y a dans le visionnage du Satyricon cette sensation de voyager dans un magma visuel où chaque plan semble crier au spectateur : « Regarde-moi ! admire ma composition, mes couleurs ! remarque la petite mimique de l’acteur là, au premier plan sur la droite ! Maintenant, hop ! scrute l’arrière-plan ! T’as vu le geste que fait le figurant ? Plutôt cool, non ? Hé ! je suis comme ça, moi ! »

Cool, oui, il faut l’avouer, dans une certaine mesure du moins. Après avoir vu 8 ½ il y a deux semaines, j’aurais pourtant dû m’y attendre, mais je reconnais que lors de la première demi-heure, Fellini m’a eu. Sans cesse je me disais : « C’est magnifique ! Quelle inventivité ! Mais où va-t-il chercher tout ça ? Bordel ! Il va bien se calmer à un moment, non ? »

Mais non justement, Fellini ne se calme pas, Fellini continue. Et c’est sans doute toute la beauté du film, mais aussi sa limite, qui est aussi celle des films dont le postulat serait de faire pénétrer le spectateur dans un gigantesque univers onirique. Le risque est de tomber dans un tour de force abstrait qui, s’il suscite l’admiration par sa plasticité, peut aussi donner l’impression d’une histoire épuisante tournant à vide. Un peu comme Encolpe pénétrant dans le labyrinthe du Minotaure, j’ai eu aussi l’impression de me perdre dans celui de la narration fellinienne (d’autant plus désorientante qu’en moyenne, les plans doivent durer cinq secondes, accentuant le rythme frénétique). Ça peut être chouette, de se sentir perdu dans un film, mais là, au bout d’une heure, j’ai eu très envie de trouver la sortie pour passer à autre chose.
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Gambler's luck - 5/10

Messagepar Olrik » Dim 21 Déc 2025, 10:54

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Un ga yoke rya (Gamblers' Luck)
Yoji Yamada - 1966


Septième film de la filmographie de Yamada (sur 91), Un ga yoke rya rappelle que le réalisateur a été marqué dans son enfance par le rakugo, notamment grâce à trois précieux recueils offerts par son père, alors que la famille se trouvait en Mandchourie pour le compte de la compagnie ferroviaire de la Mandchourie du sud. Cette passion pour le rakugo, ce besoin de rire (car la jeunesse de Yamada n’aura pas toujours été simple et lumineuse), Yamada le trouvera tout naturellement dans ses premières comédies et ce septième film qui se veut un mélange de quatre pièces classiques de rakugo. Aspect sans doute précieux pour l’amateur de ce genre, mais plus obscur pour le néophyte qui trouvera l’histoire assez brouillonne et moyennement drôle.

Mais pour l’amateur d’une certaine saga ultérieure, l’intérêt est autre. Le film est brouillon, oui, mais on peut le voir aussi comme « un brouillon » de ce que seront les épisodes de Tora-san. Se situant à l’ère Edo, le film décrit le quotidien d’un quartier pauvre peuplé de petites gens (on songe à Shibamata). On y trouve Chieko Baisho (troisième collaboration avec Yamada et, à partir de ce film jusqu’au premier Tora-san, elle sera toujours à l’affiche de ses films) dans le rôle… d’une sœur. Et qui dit sœur, dit frère, précisément un grand frère. Il ne s’appelle pas Torajirô (tora = tigre), mais Kumagorô (kuma = ours). Plâtrier de son état, il est fort en gueule, est capable de se mettre en colère de manière virulente (surtout quand il boit), et est le chef d’une petite bande de bras cassés qui le voient comme leur chef. Et, on le devine, il est très attaché à sa sœur pour laquelle il va se battre afin de lui permettre d’avoir le meilleur mariage, c’est-à-dire non pas un mariage lui permettant une situation plus argentée, mais un mariage satisfaisant son cœur. Ce sera Gosuke, modeste travailleur en charge des corvées du quartier, préfiguration de Hiroshi. Sinon Kuma, par ses facéties et ses maladresses, est comme Torajirô contraint de quitter le quartier, de se faire oublier avant de revenir, comme aimanté malgré tout par cet endroit où se trouve les personnes qu’il aime. Le tout sur une musique de Naozumi Yamamoto, dont c’est la première collaboration avec Yamada.

On le voit, cela fait beaucoup de ressemblances, ressemblances qui rendent le film amusant, mais guère plus car, inévitablement, on ne peut s’empêcher à songer à l’excellence de ce que sera la saga dans son mélange d’humour humaniste et de larmes mais aussi dans sa manière se sentir proche avec des personnages. Hajime Hana est sympathique dans le rôle de Kuma-san (qui est en fait un personnage du rakugo classique, un peu comme le Sganarelle des comédies moliéresques), mais rien de commun ce que sera Kiyoshi Atsumi, qui fait d’ailleurs une apparition dans le film. Baisho est sinon parfaitement à l’aise dans son rôle. Alors âgée de vingt-quatre ans, elle parvient à restituer avec brio toutes les nuances du caractère de son personnage. Il est vrai qu’elle devait déjà être à son cinquantième rôle depuis le début de sa carrière.
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Re: [Olrik] (`0´)ノ  映画 2025 !

Messagepar Mark Chopper » Dim 21 Déc 2025, 11:56

Mais combien de films Yamada et Baisho ont tourné ensemble ? Ils doivent tenir un record.
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Re: [Olrik] (`0´)ノ  映画 2025 !

Messagepar Olrik » Dim 21 Déc 2025, 12:13

A la louche, je dirais entre 60 et 70. Effectivement, je vois difficilement une autre actrice muse ayant autant collaboré avec un réalisateur.
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Re: [Olrik] (`0´)ノ  映画 2025 !

Messagepar Mark Chopper » Dim 21 Déc 2025, 12:18

Du coup, je devine que tu as commencé le livre ?
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Re: [Olrik] (`0´)ノ  映画 2025 !

Messagepar Olrik » Dim 21 Déc 2025, 12:31

Yep, reçu seulement il y a quelques jours, et je ne regrette pas l'achat. Bien écrit, profusion d'infos, excellente maquette, bon papier (le livre doit avoisiner le kilo), superbe qualité d'impression qui permet d'avoir toute une iconographie de qualité (aucune image pixellisée). Il va être une des perles de ma bibliothèque consacrée au cinéma, aux côtés du Hitchcock/Truffaut et du livre de Ciment sur Kubrick. Il tombe vraiment à point nommé pour les vacances.
Seul regret, la section filmographie un peu délirante (presque 200 pages). J'aurais préféré 100 pages de moins et cent autres consacrées, je ne sais pas, à des témoignages sur l'oeuvre de Yamada.
Grosse bibliographie aussi, Leblanc a vraiment fait un énorme travail de rat de bibliothèque (je crois d'ailleurs que son livre a été traduit et publié au Japon).
Du coup, pas impossible que je me penche sur les autres livres du bonhomme consacrés à Garo et Ishinomori.
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C'est dur d'être un homme : En route pour Hokkaidō ! - 9/10

Messagepar Olrik » Dim 21 Déc 2025, 17:07

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Tora-san 38
C'est dur d'être un homme : En route pour Hokkaidō !
Yôji Yamada - 1987


J’évoquais dans le précédent film de Yamada visionné un certain Kuma, eh bien je retombe sur un autre ours dans cet opus 38 de Tora-san. Ours encore plus mal léché du fait qu’il est incarné par Toshiro Mifune, alors âgé de 67 ans. Veuf depuis dix années, pratiquant le rude métier de vétérinaire rural à Hokkaido, l’homme est un rien âpre et renfermé dans une tanière qui a tout du taudis. L’affiche laisse supposer une confrontation Kiyoshi Atsumi VS Toshiro Mifune, mais ce n’est pas exactement cela dont il s’agit. Il croise un jour la route de Tora-san et, la magie de l’inénarrable colporteur aidant, le voilà tout à coup plus enclin à s’humaniser… et peut-être à avouer son amour à une vieille amie qui est employée dans une gargote de son bled…

Cet opus ne faillit pas à sa réputation, c’est effectivement un des tout meilleurs épisodes de la saga. Il faut dire que le charisme de Mifune y est pour beaucoup, et l’avoir dans le cadre en même temps que Tora san est particulièrement savoureux. « C’était la rencontre entre la souplesse et la rigidité du samouraï », plaisantera plus tard Yamada. Mais ce que je retiendrai surtout, c’est la petite société que Tora est amené à côtoyer. Associée aux paisibles décors naturels du nord-est d’Hokkaido, elle a un côté « deuxième famille » à côté de laquelle celle laissée du côté de Shibamata paraîtrait presque mesquine. Cela peut sembler une hérésie, mais c’est vrai que, pour la première fois, les proches de Tora m’ont semblé bien lourds pour accorder trop d’importance à ses maladresses, à s’en formaliser plutôt qu’à les accueillir par un gigantesque éclat de rire. La seule capable d’être en phase avec le bonhomme me semble être Akemi (toujours impeccablement jouée par Jun Miho dont on sent le réel plaisir à se fondre dans cet univers). À l’inverse, le neveu Mitsuo, qui devrait pourtant par son âge être plus enclin à s’amuser des frasques de son oncle, surprend par son ton sentencieux quand il lui dit : « Réfléchis sur ton comportement » (provoquant un « Naaani ? » outré bien fendard). Si même les ados se mettent à parler comme des adultes, où va la fantaisie ? Autre exemple : alors qu’ils sont devant le TV, l’oncle, la tante et Sakura voient subitement apparaître Tora qui est interviewé par une journaliste qui se trouve à Hokkaido. Evidemment, le résultat est bouffon. Le spectateur est mort de rire, pas la famille Kuruma, absolument effarée. Inversement, alors qu’il raconte, chez le véténiraire que vient de rejoindre sa fille, une histoire sur un ami pétomane, le miracle arrive : un sourire se dessine sur la face granitique du taiseux vétérinaire ! Les Kuruma ont beau être touchés par le qu’en dira-t-on ?, le souci de leur réputation, il faut reconnaître qu’il est très agréable de retrouver une fantaisie que les bonnes gens d’Hokkaido possèdent pleinement, et qui explique pourquoi il ne faut pas plus d’une poignée de jours à Tora pour être adopté (assez curieusement, cette fantaisie se retrouve parfois à Shibamata chez quelqu’un d’assez inattendu, Gozen-sama que l’on voit dans cet épisode en train de faire des bulles avec des gosses du quartier).

À cela s’ajoute enfin une discrète critique sociale. Si l’on sourit quand le personnage de Mifune dit à Tora que l’odeur de la bouse de vache est une « odeur sacrée », on comprend aussi, derrière son laïus sur la politique agricole faisant qu’une vache est envoyée à l’abattoir dès qu’elle n’est plus capable de produire de lait, qu’il se fait le porte-parole de ce que pense Yamada. Chantre d’un Japon rural, il se fend aussi d’une scène où l’on voit une famille d’agriculteurs expliquer au véto qu’ils sont obligés d’abandonner leur métier et de retourner à la ville, la situation étant devenue trop dure pour continuer sereinement leur activité. On n’en saura pas plus mais on devine que, pour le spectateur nippon de l’époque, la scène entre en résonnance avec une certaine actualité socio-économique.
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Strangers upstairs (The) - 6/10

Messagepar Olrik » Lun 22 Déc 2025, 10:04

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The Strangers Upstairs (Nikai no tanin)
Yoji Yamada - 1961


Le film qui a lancé Yamada à la Shochiku.Alors assistant auprès de Yoshitaro Nomura, Yamada se voit confier un SP (Sister Picture), moyen métrage que l’on plaçait alors en soirée avant le film principal, système qui permettait de tester les jeunes réalisateurs. Le script est de Nomura lui-même et est adapté d’un roman à suspense de Kyô Takigawa. Le but de Yamada : en faire une comédie.

S’il n’a pas été satisfait du résultat, tout comme les patrons de la Shochiku (Yamada devra attendre dix-huit mois avant son prochain film), il faut reconnaître que l’histoire est assez amusante. Un jeune couple, Masami et Akiko, vient de construire une maison. Mais comme il y a eu des frais, ils trouvent judicieux de louer une chambre à l’étage. Pas de chance, ils ont choisi d’y installer un autre jeune couple qui s’avère être champion dans l’art de ne jamais payer le loyer. Masami va passer par toutes les stratégies, y compris de donner la possibilité au jeune homme de travailler dans sa société (ce sera un échec car l’homme est un fainéant fini). La situation empire quand ses deux frères aînés (notamment celui qui lui a offert 200000 yens pour construire la maison) s’en mêlent ainsi que la maman qui ne trouve rien de mieux à faire que de passer gaiement ses journées à jouer au hanafuda avec le couple d’escrocs. Masami parvient à s’en libérer par la manière forte. Arrive alors un deuxième couple qui, eux, ont le bon goût de payer les loyers rubis sur l’ongle et même d’offrir de l’argent pour construire une petite salle de bain ! Evidemment, cela cache quelque chose…

Voilà, cinquante minutes pour traiter tout cela, il n’y a aucun problème de rythme. On peut, comme Yamada, se dire qu’il s’agit d’un film mineur (et il l’est certainement), mais il est aussi intéressant de voir comment certains éléments de ses thématiques à venir sont déjà esquissés. Ainsi le thème de la famille et des inévitables anicroches qu’elle peut susciter. Le fait qu’au sein de cette famille, il puisse y avoir une patate chaude. Ici, c’est à la mère que ce rôle est dévolu. Quand Masami, éberlué, la voit jouer au hanafuda avec le petit escroc à l’étage, j’ai songé à Sakura découvrant une nouvelle frasque de son frère Torajirô. La même mère n’est d’ailleurs pas sans évoquer physiquement tante Tsune, et encore plus quand elle se met à un moment à pleurer bruyamment.

Autre point commun : la promiscuité, avec cet étage qui permet à un autre couple de vivre, mais aussi ce rez-de-chaussée qui permet de mélanger tout le monde. Le sans-gêne du couple de l’étage, qui doit aussi payer les frais de bouche (en vrai avatar de Sakura, Akiko prépare bien aimablement les dîners pour lui), évoque Tora-san qui joue le coq en pâte à chacun de ses retours de voyage (et qui, dans certains opus, est montré bien dédaigneux pour ce qui est de s’acquitter de sa note dans un petit hôtel). Évidemment, cela ajoute en tension, d’autant que, autre similitude, le film ne fait pas mystère d’une situation assez précaire concernant Masami et Akiko qui ont réellement besoin d’argent. Dans Tora-san, que ce soit le Poulpe qui gémit sur la situation de son entreprise, l’oncle et la tante Kuruma qui surveillent attentivement les comptes de leur boutique, Sakura et Hiroshi qui s’installent dans la vie avec une modeste bicoque ou Tora qui utilise souvent le mot « Binbō » (pauvre) pour parler de sa famille et les gens de leur quartier. Et on ne compte pas les innombrables rencontres qu’il fait dans la saga, pour lesquelles la recherche de bonheur est souvent contrecarrée par l’argent.

Mais pour surmonter la difficulté, dernier point commun, on peut compter sur l’humanité. Ce sera la petite conclusion inattendue que le script délivrera dans les dix dernières minutes et qui achèvera de donner une note torasanesque au film et au couple Masami/Akiko.

Sans prétention et donc loin d’être inintéressant. Cela dit, le prochain film de Yamada sera le premier à utiliser une certaine Chieko Baisho, de quoi forcément d’augmenter l’intérêt d’un cran, si ce n’est deux.
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Sunshine girl (The) - 7/10

Messagepar Olrik » Lun 22 Déc 2025, 17:34

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Shitamachi no taiyô (The Sunshine Girl)
Yôji Yamada - 1963


Et Yôji rencontra Chieko...

Dix-huit mois après son premier moyen-métrage, Yamada se voit offrir la possibilité de réaliser son premier long. Si Nikai no tanin possédait une certaine dose d’humour, ce ne sera pas le cas de Shitamachi no taiyô qui suit le quotidien de Machiko (Chieko Baisho), ouvrière dans une usine de cosmétique et vivant chez son veuf de père, avec sa grand-mère et ses deux frères, l’un sérieux (Kunio), obsédé à l’idée de réussir ses examens, l’autre (Kenji) faisant les quatre-cents coups. Configuration qui m’a vaguement évoqué celle de Tom Sawyer, avec Mary flanquée de Tom et de Sid, mais aussi celle, bien entendu, de Tora-san, avec un enfant terrible à gérer, Torajirô, et un plus calme, Mitsuo.

Dans ce rôle, Baisho est à la hauteur du soleil mentionné dans le titre. Elle rayonne véritablement. Surtout, elle est parfaitement à l’aise pour restituer les différentes nuances de son personnage, à la fois enjoué et inquiet. Car Machiko se trouve face à un dilemme. D’un côté, certes, elle aimerait mettre la main sur un bonheur qui serait fait d’un mariage, d’une situation financière plus aisée, de plus de calme dans son quotidien. Mais de l’autre, lui faut-il pour autant s’extraire de son quartier natal, quartier pauvre mais dans lequel se trouvent ses racines, son identité ? La pauvreté est-elle donc tant à fuir ? La quête du bonheur sera symbolisée par deux jeunes hommes. L’un, son petit ami, n’a qu’un rêve : devenir un salary man, acheter une jolie maison dans un beau quartier où sa femme l’attendra, en train de tricoter paisiblement tout en se versant de temps à autre du thé. L’autre, Ryosuke, grand Huckelberry Finn auquel s’attache le turbulent petit frère de Machiko, est un ouvrier bossant dans une usine sidérurgique. La richesse ? Il n’y pense pas trop. Lui, la seule chose qu’il comprend, c’est qu’il aime Machiko.

On le voit, le couple préfigure assez ce que seront Sakura et Hiroshi dans Tora-san, tout comme le quartier populaire où l’héroïne évolue, avec sa galerie de visages familiers, annonce ce que sera Shibamata. Au milieu de tout cela, un autre motif yamadesque : celui du train. Petit cousin de Doinel, Kenji se retrouve un jour au poste de police parce qu’il a tenté de voler un train électrique. Et quelques scènes plus tard, il pénètre dans un dépôt ferroviaire en compagnie de Ryosuke afin de monter clandestinement et jouer dans une vraie locomotive. Fantaisie qui n’est pas sans impliquer une richesse intérieure certaine, richesse que l’on retrouve chez Machiko, que ce soit lors d’une scène dans son quartier où elle tournoie sur une barre fixe sous les yeux de vieillards familiers qui apprécient la présence de la petite Ma-chan, où lors des derniers plans où l’on voit Baisho en train de jouer au volley-ball et s’agiter dans tous les sens. Le jeu, la puérilité, son ex petit ami devenu salary man ne pourra plus y prétendre et ce sera tant pis pour lui. Chez Yamada, la richesse pécunière n’est jamais synonyme de bonheur. Un truisme, certes, mais truisme qu’il sait déjà manier par de touchantes scènes (notamment un certain dialogue entre Machiko et son père lors du dernier quart d’heure) et un solide sens du casting permettant de rendre attachant n’importe quel personnage.

Et puisque l’on parle de bonheur, sans doute s’est-il dit alors que le vrai bonheur pour un cinéaste débutant, c’est de tomber sur une jeune actrice de la trempe de Chieko Baisho.
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Baka Muradashi - 5/10

Messagepar Olrik » Mar 23 Déc 2025, 09:43

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The Honest Fool (Baka Muradashi)
Yôji Yamada - 1964


Le film qui aurait pu mettre fin à la carrière de Yamada. Après deux films n’ayant pas vraiment rencontré le succès, le réalisateur est sur la corde raide, se demandant si, en cas d’échec, on ne va pas désormais lui demander de se contenter d’écrire des scénarios, domaine où il est plutôt bon. La pression est d’autant plus forte qu’on lui demande cette fois-ci de réaliser une pure comédie, genre à ses yeux plus difficile que n’importe quel autre. Il est tellement sûr que ça va être un four que le jour de sa sortie, il reste prudemment chez lui plutôt que d’assister à une projection afin de prendre la température.

Il a tort car un ami lui téléphone pour le prévenir que le film a l’air de plaire. Yamada se rend alors recta à un cinéma pour constater par lui-même : la salle est pliée de rire ! Ce sera le début d’une trilogie avec Hajime Hana dans le rôle du baka, trilogie qui permettra à Yamada d’acquérir plus d’importance au sein de la Shochiku et de transformer son contrat de manière à empêcher tout retour en arrière, c’est-à-dire en redevenant assistant directeur.

Pour le spectateur moderne, c’est un peu comme revoir une vieille comédie française d’antan, avec parfois des couleurs et un tempo un peu trop vifs. Ça demande un peu d’habitude et j’avoue que ce premier opus m’a cueilli à froid. J’ai cependant vu ce qui a pu plaire au public de l’époque. Cette profusion de personnages dans cette petite communauté que filme Yamada, ce souci du détail comique, le côté dessin animé de certaines voix, la variété des situations, un héros graphiquement réussi et attachant. Sorti après les fêtes de fin d’année, le film a dû donner un goût de prolongation de ces fêtes et permettre d’entamer l’année le cœur léger. Quant au connaisseur de Tora-san, il sera sensible au côté « madone et amour impossible », mais aussi à l’usage que fait Yamada de l’arme humoristique. Si sa grande saga à venir est moins outrancière dans ce domaine, elle n’hésite pas non plus à faire usage de procédés comiques, que ce soit de gestes, de mots, de situation ou de caractère, pour reprendre une classification bien connue.
Un film évidemment pas indispensable, mais important dans le nouveau statut qu’il permet à Yamada d’acquérir et dans la possibilité qu’il lui offre pour fourbir ses armes expressives.
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