[Dunandan] Mes critiques en 2013

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Royaume de Ga'Hoole - la légende des gardiens (Le) - 7,5/10

Messagepar Dunandan » Lun 07 Oct 2013, 03:02

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Le royaume de Ga'Hoole - Légende des gardiens, Zack Snyder (2010)

Zack Snyder n'a pas perdu son identité avec ce film d'animation. Comme 300, c'est épique, avec un arrière-plan mythologique, certes simpliste et manichéen au fond (on se retape le combat du bien contre le mal, qui veut mettre en esclavage les faibles, tandis que les forts règnent en haut de l'échelle), mais le message est universel et conduit de manière puissante, avec le talent formaliste du cinéaste qui trouve ici l'écrin parfait pour exprimer ses idées de grandeur.

Ainsi, ce qui frappe de prime abord, c'est l'esthétique du film, et la tonalité plutôt sombre pour le tout public visé (l'atroce VF est d'ailleurs à éviter). Le design des chouettes est chiadé (avec des fourrures aussi bien reproduites que dans le Chat Potté), les environnements fantaisistes font penser rien moins qu'au SDA, et le déroulement de l'histoire guerrière et initiatique (deux chouettes à la recherche de leurs talents et de leur place respective) n'est jamais trop enfantin, voire grave (c'est même assez culotté dans l'orientation des affrontements pour les enfants). Dommage par contre que la psychologie des personnages soit un poil trop légère (les deux frères qui se retrouvent dans deux camps/familles opposés pour un bête besoin de reconnaissance).

On ne s'ennuie pas vraiment (j'ai trouvé que le tempo baissait durant un quart d'heure durant l'évasion mais c'est tout), jusqu'au climax guerrier de toute beauté où on voit ces chouettes (jamais ridicules au demeurant) s'affronter en armures toutes griffes sorties, au rythme des ralentis qui intensifient et font durer l'action jusqu'à une certaine extase. Enfin j'aime beaucoup le cadrage mythologique (avec un petit sous-texte sur la guerre pas aussi belle que dans les bouquins pas dérangeant du tout qui participe à la maturité du traitement).

Bref, une belle aventure fantasy/guerrière/initiatique, qui a pour seul gros défaut un fond vraiment léger et peu original, compensé par un ton globalement mature et sombre, et une beauté formelle qui va vous écarquiller les rétines, sans oublier la musique qui est dans le même ton (on peut entendre en outre la chanteuse de Dead can Dance).
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Perdita Durango - 7,5/10

Messagepar Dunandan » Ven 11 Oct 2013, 01:47

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Perdita Durango, Álex de la Iglesia (1997)

De La Iglesia nous livre ici un road-movie complètement barré, qui fait penser à du Bonnie and Clyde gonflé aux amphétamines où le sexe appelle la violence et vice-versa (du Tueurs nés espagnol pur jus, mais avec plus de cul et sans le sous-texte sur l'origine environnementale de la violence, et donc davantage premier degré sans une once de moralisation). Le scénario est foutrarque et nonsensique mais totalement jouissif, rythmé par les braquages, la sorcellerie noire, et le kidnapping de deux jeunes adultes qui vont apprendre la vie auprès de leurs deux démoniaques ravisseurs (j'adore la manière dont ils perdent leur innocence...). Ainsi, ce qui pourrait être un défaut dans le mélange des genres (western, road movie, horreur, comme Devil's rejects) et l'enchaînement chaotique des séquences (souvent réjouissants sur le papier mais bancals au final), paraît ici être une qualité, tant ces influences sont assumées et servent la folie psychotique de ses deux personnages principaux, ainsi que la générosité et l'humour féroce du réalisateur hispanique (ah, le gimmick de l'accident de voiture du flic qui les pourchasse !) qui s'applique à faire tomber tous les tabous pour le plaisir du spectateur.

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La réalisation nous gratifie ainsi de belles ambiances particulièrement réussies et malsaines, surtout la séquence de vaudou où les victimes sont dévorées au cours du culte devant un public en transe, poisseuse à souhait avec moult détails sataniques. Et le réalisateur savait déjà superbement filmer et diriger ses actrices, en nous régalant ici de séquences torrides qui cassent le verrou de la censure. Rosie Perez livre en effet une interprétation démente, une vraie garce nymphomane et dangereuse qui se prend progressivement d'affection pour l'inquiétant Romeo. Ce dernier est incarné par un Javier Bardem imprévisible et aux multiples atours, dessinant l'intrigue au fil de ses envies et créant donc un véritable malaise à chacune de ses actions. Certes, ce film n'est peut-être pas aussi maîtrisé que les oeuvres à suivre de l'espagnol (un paradoxe pour ce type d'histoire énervée, mais c'est tout un art de gérer le chaos, et il en fait parfois trop au risque de lasser). Mais c'est rare ce genre de bobine où on se permet presque tout, sans oublier d'insuffler un peu d'émotion dans ce qui devient une histoire romantique atypique et rock'n roll. Un idéal de cinéma dans le fait de nous attacher à deux personnages à moitié fou sans nous faire la morale.

Road-movie multi-genre qui brise tous les tabous, dont le chaos narratif n'est pas toujours maîtrisé en termes de rythmique, mais nous agrémente d'une double performance d'acteurs et de séquences délirantes qui font plaisir à voir.
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Re: [Dunandan] Mes critiques en 2013

Messagepar Alegas » Ven 11 Oct 2013, 01:48

Tu viens de le voir sur Arte ou c'est une coïncidence ?
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Re: [Dunandan] Mes critiques en 2013

Messagepar Dunandan » Ven 11 Oct 2013, 01:49

Totale coïncidence puisque je l'ai vu en DVD :mrgreen:
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Chute de la Maison Blanche (La) - 6,5/10

Messagepar Dunandan » Sam 12 Oct 2013, 07:44

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La chute de la maison blanche, Antoine Fuqua (2013)

Ah ben ça envoie du bois ! Du bon action-movie classique du style '90 mais avec les effets d'aujourd'hui, qui prend un scénario éculé (un agent spécial qui doit se racheter une conduite après avoir laissé tomber la femme du Président) et une bonne dose de patriotisme, comme prétexte pour transformer la Maison blanche en champ de bataille, et nous délivrer ainsi l'artillerie lourde, avec des séquences plus épiques et burinées les unes que les autres. En plus, il y a pire comme influence, un mélange de 24h, Commando, et de Die Hard.

Il faut bien sûr poser le cerveau pour jouir complètement de ce film d'action décomplexé, avec des situations et réactions invraisemblables (les agents qui ne se mettent jamais à couvert, le patriotisme jusqu'au-boutisme des prisonniers américains qui prouvent leur valeur sans que ça leur serve à quelque chose) et parfois débiles (le camion poubelle qui se transforme en bunker), et limite raciste (bon au moins ce ne sont plus des russes mais des méchants coréens).

Le fond limité et bas du front est donc là pour justifier des séquences d'action premier degré, épiques, ludiques, et "direct dans ta face". Deux invasions successives par les airs et le sol, un bodycount impressionnant qui n'épargne personne avec des corps soufflés par les explosions et des headshots à n'en plus finir, finitions au sol en prime, tout est orchestré pour envoyer la sauce sans que l'on se pose de questions. Gérard Butler, au milieu, est parfaitement à l'aise dans ce rôle de commando solitaire bad-ass, utilisant toute sa combativité et sa hargne pour buter du coréen à l'arme blanche et au flingue. Quant à la forme, elle est carrée et efficace, et il y a du shaky cam quand l'action arrive, mais cette dernière est toujours lisible et violente, servie par un bon sens du rythme grâce à un terrain de jeu qui varie de scène en scène. Certes les CGI ne sont pas folichons, mais ça fait partie du plaisir coupable qu'est ce genre de bobine.

Bref, du Die Hard bourrin à la Maison Blanche brimée en Fort Alamo pour l'occasion, franchement ça ne se refuse pas. Un divertissement simple mais efficace (qui résume ici sa limite et son intérêt), parfait pour une soirée décérébrée détendue du slibard. Seul gros bémol : ça aurait mérité d'être dégraissé d'au moins vingt bonnes minutes. N'est pas McTiernan qui veut.

Note : 6.5/10
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Messagepar Hulkiss » Sam 12 Oct 2013, 08:06

"un agent spécial qui doit se racheter une conduite après avoir laissé tomber la femme du Président"

Ce n'était pas un accident lors duquel la 1ère dame meurt et pour laquelle il accuse une culpabilité de n'avoir pu la sauver???
Sinon, voilà le type même de film que je classerai dans les série B même s'il a pu jouir d'un budget exagéré pour le scénario digne d'un film tv, tout comme la promo. Des acteurs moyens pour des mecs qui se font buter comme des pigeons et du crash pour le plaisir de voir 2, 3 trucs sympas.
C'est resté un truc vraiment light pour moi, même en se disant que , allez, on réfléchit plus et on regarde les images...
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Re: [Dunandan] Mes critiques en 2013

Messagepar Dunandan » Sam 12 Oct 2013, 08:11

Bah c'est de l'humour caché ma petite phrase ^^.

Ben tu vois, j'apprécie ce genre de film pour la simple raison qu'il livre la marchandise (et selon moi toute la bêtise des agents qui se font avoir comme des bleus est un leitmotiv pour justifier l'action). Bon je comprends qu'on puisse rejeter ce genre de film qui ne brille pas par son intelligence, mais qui a le mérite d'envoyer la sauce, comme au bon vieux des temps des productions '80-90.

Mais sinon t'as raison, c'est une prod. B avec les moyens d'un blockbuster, mais c'est ça qui est bon, sinon ce film n'aurait jamais existé sous cette forme :eheh:
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Re: [Dunandan] Mes critiques en 2013

Messagepar Hulkiss » Sam 12 Oct 2013, 09:03

Oui, enfin, mettre 83.000.000 $ pour faire un truc pareil sans plus de consistance, ça n'a pas de grand mérite à mon goût !!!
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Re: [Dunandan] Mes critiques en 2013

Messagepar Scalp » Sam 12 Oct 2013, 09:28

C'est quoi un scénario digne d'un film TV ?
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Re: [Dunandan] Mes critiques en 2013

Messagepar Dunandan » Sam 12 Oct 2013, 15:43

Surtout qu'il y a de très bonnes séries meilleures que des films qui passent au ciné, alors je trouve que cette comparaison tombe un peu dans l'eau :chut:
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Re: [Dunandan] Mes critiques en 2013

Messagepar Snake Plissken » Sam 12 Oct 2013, 21:15

Hulkiss a écrit:Oui, enfin, mettre 83.000.000 $ pour faire un truc pareil sans plus de consistance, ça n'a pas de grand mérite à mon goût !!!


Le budget est de 70 millions, en attendant le film de Fuqua enterre celui de Emmerich qui malgrès son budget plus important fait allure de serie z et Tatum + Woods en mode Jean-Paul Gaultier, je n'en parle même pas.
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Fast and furious - 6/10

Messagepar Dunandan » Dim 13 Oct 2013, 03:59

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Fast and Furious, Rob Cohen (2001)

Je n'ai jamais été trop fan de cette franchise, qui se résume pour moi à une exposition de l'univers machiste des courses de tuning, objet de culte de tous les kékés de la planète (je me suis arrêté au second). Malgré tout , je dois avouer qu'il mûrit bien ce Point Break (une influence évidente dans l'écriture du script, mais en moins bien faut pas déconner) sur bitume. Si certaines courses valent le coup d'oeil, que je retiens comme modèles (d'un genre peu fourni) en termes de plaisir primitif de vitesse, de sensation, et de maîtrise des mécanismes de conduite, servies par de belles bagnoles montées comme les nénettes qui les accompagnent, je retiens surtout la petite mythologie autour qui m'a bien plu avec ses codes de respect et d'attitude, ce qui permet de transcender le matériau originel lorsqu'on n'aime pas trop ce milieu (ce que résume Toretto : ce n'est pas la façade qui compte (traduction : la carrosserie, les pétasses, la frime), mais la façon dont tu conduis).

Et malgré les nombreuses invraisemblances de l'enquête menée par Brian O' Connor (les bagnoles qu'on lui file, la confiance que ses supérieurs lui donnent après les échecs qu'il essuie), on n'a pas le temps de s'ennuyer, entre les différentes courses-poursuites, la love story, l'infiltration du flic qui conduit à une amitié grandissante de respect réciproque avec Toretto (avec un running gag rigolo du bras droit lâche qui se fait voler sa place, bière et copine comprises !), ce qui laisse une bonne impression générale à la fin du film en dépit d'un déroulement plutôt prévisible et convenu.

Passons au casting qui est plutôt sympathique. Vin Diesel, avec Riddick, trouve ici son rôle le plus puissant, bad-ass magnétique qui éprouve ses valeurs au volant de ses bolides (j'aime bien la petite storyline autour de la bagnole de son père, trop belle en passant, monstre de puissance qu'il hésite à chevaucher de peur de perdre le contrôle, représentant la grande vague montée sur pistons). Par contre, Paul Walker, je ne l'aime pas trop avec son allure de beau gosse calibrée pour les midinettes, heureusement que son personnage, qui prend en affection cette bande de "durs" pas si méchants, est plutôt sympathoche. Ensuite, Michelle Rodriguez confirmait ici son statut de femme forte et sexy, elle fait parler les hormones. Les autres font figure de présence, mais ont une bonne tronche qui "colle" bien au monde des bagnoles "tunées".

Bref, F&F, ça passe bien tant qu'on cherche un divertissement qui fait "vroum vroum" sans se prendre la tête, avec en prime un code de relations basé sur le respect, réalisé de façon ludique sur le terrain (par la conduite extrême) qui me parle relativement, incarné par un gang qui a ainsi davantage l'allure d'une famille recomposée que de truands sans pitié (ce qui au fil des épisodes, je peux l'imaginer, permet de s'attacher à eux). La note peut paraître sévère, mais c'est exactement le genre de film que je regarde tous les 10 ans, au mieux.
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Hobbit : un voyage inattendu (Le) - 8/10

Messagepar Dunandan » Ven 18 Oct 2013, 03:32

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Hobbit : un voyage inattendu, Peter Jackson (2012)

Un film que j'attendais au tournant, car si le SDA m'avait parfois déçu dans le fond (le traitement comique de l'elfe et du nain, trop de balises pour les nuls et de manichéisme), j'avais tout de même hâte de me replonger dans l'aventure, tant Middle Earth m'avait paru incroyablement bien adaptée et vivante, avec un soin infini du détail, de quoi combler tout amateur de fantasy. Une petite appréhension tout de même au départ, à savoir le choix de couper le film en trois parties, tandis que le roman faisait trois fois moins de pages que son oeuvre cadette. S'il faudra attendre de voir les trois films (et en version longue!) pour les juger avec plus de recul, pour le moment l'adhésion l'emporte, en dépit de quelques petits choix malheureux et fautes de goût qui me restent un peu au travers de la gorge.

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Pour le résumer le plus simplement, la façon dont est traité ce film permet de faire rentrer la petite histoire de Bilbo dans la grande fresque du Seigneur des anneaux, un choix fort ambitieux et casse-gueule qui promet une nouvelle trilogie plutôt fameuse. Dès l'introduction, de petits ponts narratifs sont donc bâtis entre les deux oeuvres modifiant sensiblement la tonalité du roman original, qui était un conte avant tout destiné aux enfants, à savoir léger, facétieux, relativement peu profond, et bourré de péripéties enlevées et ludiques. Ainsi, notre film navigue entre la dramaturgie, la profondeur, et la gravité du SDA, et le comique et la naïveté du Hobbit.

Si j'ai bien quelques réserves, notamment l'humour peu subtil - décidément pas la spécialité de Peter Jackson - de certaines séquences (principalement Radagast, tartiné de crottes d'oiseau et abusant de champignons), rien de trop méchant au final car la magie opère, et le plaisir de suivre la compagnie est là, surtout grâce à des effets spéciaux de grande qualité qui contribuent à l'immersion du spectateur (à part quelques effets de lumière mal sentis, les effets visuels par ordinateur sont très réussis et font penser à des tableaux animés).

D'autant plus que Jackson, en se compliquant la vie en articulant ses deux trilogies, n'oublie pas l'univers et la trame narrative du Hobbit qui sont globalement respectés. Ce film trouve en effet le bon ton dès l'excellente introduction (portant sur l'histoire des nains des montagnes, qui nous prépare donc à quelque chose de grand si tout va bien), avec les deux chansons des nains qui nous présentent leur double visage, de nature joviale et rustre, ou grave et mélancolique lorsqu'ils repensent à leurs terres abandonnées au dragon friand de pièces d'or.

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La première fois que j'avais vu ce film, la structure narrative qui ressemble quand même beaucoup au SDA, m'avait passablement dérangé, mais le temps faisant bien les choses, ça passe beaucoup mieux à chaque révision. J'avais l'impression qu'en créant des liens entre la petite et la grande oeuvre, on conférait du coup au Hobbit une ambition et une profondeur qu'il n'avait pas à la base, au risque de trahir son esprit. Et ce n'est pas tout à fait faux, mais Tolkien lui-même ne voulait-il pas créer ce pont entre ses deux oeuvres maîtresses ? Donc, les intentions du métrage ne sont pas si malaisantes que ça au final.

Pour rappeler les faits, tandis que le roman se cantonnait à une petite chasse au trésor doublée d'une quête initiatique très classique dont l'intérêt consistait à faire vivre une petite aventure cocasse à ce pauvre hobbit qui n'avait rien demandé, Peter Jackson dédouble l'intrigue en développant la motivation de Thorin avec un honneur blessé à recouvrir et donc une destinée à remplir. Or, en revoyant le film, ça passe mieux, les intentions simples du métrage au premier plan de l'intrigue étant franchement touchantes : permettre à ces pauvres nains de retrouver leur foyer, et le ton de l'aventure, franchement hasardeuse, en grande partie déroulée en roue libre, achève de la rendre charmante et enlevante.

Par contre, ce qui me gêne toujours, c'est qu'on a affaire aux mêmes ressorts dramatiques que le SDA (en outre les thèmes musicaux se répondent), et à des personnages principaux fort semblables, ce qui donne une désagréable petite impression de redite (mais aussi de familiarité, et ça c'est cool). Mais bon, Thorin, essentiellement visé ici dans ma critique, est aussi au fond très différent d'Aragorn, à la personnalité plutôt complexe et loin de se réduire à cette simple comparaison, même si le thème de la destinée est bien présente (ce qui va se confirmer par la suite en anticipant un peu), à cheval avec son désir d'offrir à ses camarades la reconquête de leur foyer, encore une fois une intention belle et simple à la fois.

Autre soucis, en mettant Thorin en avant et en faisant de lui l'un des personnages-pivot, si l'idée fonctionne bien (surtout en connaissant la fin de l'histoire), cela crée en même temps un petit déséquilibre avec les autres nains qui, en dehors de lui et son bras droit, sont beaucoup moins étoffés (ce qui était aussi le défaut du roman centré sur le hobbit), mais heureusement graphiquement très réussis et au physique immédiatement reconnaissable (grâce notamment à des petits détails qui les caractérisent).

Dernier problème, comme dans le SDA, on crée un bad-guy qui n'était pas là (le chef des orques) pour créer un climax légèrement artificiel, ayant pour unique but narratif que de développer la relation mal embouchée entre le hobbit et Thorin (et aussi d'annoncer l'un des enjeux dramatiques de la trilogie...) et surtout de conclure avec panache cette première partie. Par contre, Bilbo et Gandalf sont conformes à ce que je m'imaginais, le premier est poli, maniéré, maladroit, et rusé, mais aussi différent de Frodon (loin d'être un héros, il doit trouver sa place au sein du groupe), tandis que le second va et vient au sein de l'aventure, facétieux personnage qui arrive toujours au bon moment, de justesse, pour sauver la compagnie.

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Le rythme de l'histoire est aussi un peu étrange avec relativement peu de péripéties (l'effet pervers d'étirer autant l'oeuvre), le tout ressemblant à une longue introduction car tout commence réellement quand ça se termine avec une amitié scellée et le gros de l'aventure à nos pieds, et plusieurs idées sont laissées en plan comme le Nécromancien, ombre du mal planante au-dessus des héros. Mais on s'ennuie rarement, captivés par la beauté des environnements, et il y a tout de même des moments intenses et sympathiques, portés par le magnifique thème musical des nains, comme le passage pittoresque de ces derniers qui vident le stock alimentaire du hobbit dépassé par les événements, les devinettes de Bilbo avec Gollum dans la grotte, ou encore le premier climax dans la caverne des Gobelins où la caméra se ballade un peu partout (et la chanson est terrible), qui confirme décidément Jackson comme un grand dans le genre de la fantasy, en dépit de tous les défauts qu'on peut lui reprocher (surtout lorsqu'on connait les aléas de la préproduction).

Ce qui reste au final, c'est le goût de l'aventure et le désir de continuer (l'essence du Hobbit et de Bilbo selon moi). Donc mission réussie, et j'attends la suite en espérant que l'ambition démesurée de Jackson (de faire deux films en un, avec une intrigue rallongée et enrichie) ne portera pas préjudice à l'oeuvre globale, mais permettra, comme je le pense, d'intensifier l'expérience de la première trilogie, tout en racontant une aventure intéressante en elle-même, un gros défi qui attend Jackson et son équipe.


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Une belle adaptation du Hobbit et une invitation à l'aventure, portées par une réalisation quasi parfaite, en dépit de défauts (?) imputés à l'ambition de faire le lien entre les deux histoires (mais qui offre également, ce faisant une profondeur parfois réussie à l'intrigue principale) avec le SDA.
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Re: [Dunandan] Mes critiques en 2013

Messagepar Alegas » Ven 18 Oct 2013, 11:07

dunandan a écrit:Tandis que le roman se cantonnait à une petite chasse au trésor très classique, Peter Jackson développe la motivation de Thorin avec un honneur blessé à recouvrir, lui attribue une destinée. Mais ce qui gêne encore plus, c'est qu'on a affaire aux mêmes ressorts dramatiques, avec le chef des nains, qui ressemble à s'y méprendre à Aragorn, sorte de Roi déchu qui, en reprenant son trésor, va reconquérir son trône.


Ouais mais justement toi qui as lu le roman tu sais très bien que ce n'est pas le cas, et que Thorin est justement un personnage qui mérite d'avoir cette mise en avant. Toute l'évolution géo-politique dans le troisième opus
une fois que le trésor sera récupéré et que Thorin deviendra fou
se basera justement beaucoup sur le perso qui, finalement, est quasiment le total opposé d'un mec comme Aragorn.

dunandan a écrit:ou encore le premier climax dans la caverne des Gobelins où la caméra se ballade un peu partout, qui confirme décidément Jackson comme un grand dans le genre, en dépit de tous les défauts qu'on peut lui reprocher.


:super:
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Re: [Dunandan] Mes critiques en 2013

Messagepar Dunandan » Ven 18 Oct 2013, 12:39

Justement j'avais oublié de mentionner qu'il me faisait aussi penser à Boromir et que j'aime bien cette mise en avant :mrgreen: (ma critique n'était pas claire dessus, fixed :wink:).

Malgré tous mes petits griefs, j'attends fermement la suite, car ce qui m'a surtout importé ici, c'est que Jackson a très bien su faire revivre la Terre du milieu, selon de nouveaux angles (certes avec quelques répétitions - et pourtant j'ai essayé de penser le moins possible au SDA-), et quelle introduction ! (sa grande spécialité selon moi)
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